Vaccination antigrippale : la priorisation est-elle obligatoire, ou pas ?

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Vaccination antigrippale : la priorisation est-elle obligatoire, ou pas ?

Publié le 16 octobre 2020
Par Magali Clausener
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Depuis plusieurs semaines, la Direction générale de la santé (DGS) demande aux pharmaciens et, depuis le 16 octobre dans un message DGS-urgent, aux médecins, infirmiers et sages-femmes, de prioriser la vaccination antigrippale auprès des personnes ciblées par les recommandations vaccinales. Pour cela, la DGS fait référence à la lettre du ministre de la Santé publiée dans le Bulletin officiel du 13 octobre, et fournit des « éléments élaborés et concertés avec les ordres », afin de répondre aux personnes non ciblées par les recommandations qui souhaitent se faire vacciner. Outre l’information sur les priorités, la DGS préconise « d’inviter les personnes hors cibles à reporter leur demande de vaccination », sachant que la campagne dure jusqu’à fin janvier, voire fin février. Pour autant, la priorisation suscite des questions.

Les pharmaciens sont-ils obligés de la mettre en œuvre ?

« Si le ministère avait voulu en faire une obligation, il aurait fallu passer par la voie réglementaire ou la voie législative », répond Pierre Béguerie, président de la section A de l’Ordre des pharmaciens. Pour autant, il insiste sur l’application des recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) et de la DGS : « Vacciner en premier les personnes à risque, c’est du bon sens et du civisme ». Les syndicats de pharmaciens incitent également les officinaux à mettre en œuvre la priorisation. De fait, un sondage réalisé par l’Ordre hier révèle que 50 % des répondants appliquent strictement la priorisation et 47 % dans la mesure du possible.

Dans le cadre de la priorisation, les pharmaciens peuvent-ils réserver un vaccin pour un patient non prioritaire ? « Non, car le vaccin n’est plus alors disponible pour les personnes à risque », explique Pierre Béguerie.

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Le pharmacien est-il en droit de refuser de délivrer un vaccin, qui peut être délivré sans prescription, à une personne hors-cible ?

C’est le sujet sensible qui inquiète un certain nombre de pharmaciens, sachant qu’il n’y a donc aucun texte réglementaire ou législatif pour trancher. « Un patient qui développerait la grippe et est en contact avec des personnes vulnérables peut attaquer le pharmacien qui a refusé de lui délivrer le vaccin », confirme Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). En clair, le pharmacien engage sa responsabilité en cas de refus. « L’avis de la Haute Autorité de santé n’est pas contraignant mais il peut être produit devant la justice, ajoute le président de la FSPF. La jurisprudence est fluctuante, c’est pour cette raison, que nous voulions quelque chose de plus solide. Même si la lettre du ministre donne des consignes plus précises. elle n’est pas protectrice. » Philippe Besset veut d’ailleurs revenir sur cette question auprès du ministère.

Pour Pierre Béguerie, « un pharmacien qui ne respecte pas la campagne vaccinale est plus répréhensible qu’un pharmacien qui refuse de délivrer un vaccin ». Il comprend cependant les conséquences éventuelles qui pourraient découler d’un refus : « Si un pharmacien est attaqué, l’Ordre le soutiendra ».