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La diverticulose

Publié le 1 décembre 2020
Par Marianne Maugez
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La diverticulose est une affection fréquente touchant le côlon. Silencieuse dans la majorité des cas, elle est le plus souvent diagnostiquée lors d’une poussée inflammatoire et/ou infectieuse appelée diverticulite.

C’est quoi ?

La diverticulose du côlon est un état asymptomatique qui correspond à une anomalie anatomique acquise du côlon, caractérisée par la présence de diverticules.(1)

La diverticulose désigne l’apparition de diverticules le long du côlon, plus particulièrement dans le sigmoïde, dernière partie avant le rectum. D’où les termes de diverticulose sigmoïdienne ou colique.

Les diverticules sont des poches muqueuses en forme de sac qui s’évaginent à travers la couche musculeuse de la paroi colique (voir encadré). Les couches internes fines de l’intestin font saillie vers l’extérieur et créent une hernie, à la différence d’un polype, qui siège dans la paroi. Les diverticules mesurent en général de 3 à 10 mm. Les géants, très rares, ont un diamètre de plus de 4 cm, et peuvent atteindre 25 cm !

Sur le plan physiopathologique, le diverticule est une hernie de la muqueuse à travers les fibres musculaires, au niveau des zones de faiblesse correspondant aux endroits où les vaisseaux sanguins pénètrent pour irriguer le côlon.

La diverticulose est la pathologie colique la plus fréquente des pays industrialisés. Sa prévalence augmente avec l’âge. Elle touche 30% des plus de 60 ans, et plus de 60% des personnes âgées de 80 ans et plus.

Quelle est son origine ?

Les causes exactes de l’apparition des diverticules sont inconnues. Une part héréditaire est pointée du doigt, mais elle n’explique pas à elle seule la survenue de la maladie. Une alimentation pauvre en fibres et riche en viande rouge, ainsi qu’un manque d’activité physique semblent jouer un rôle.

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Quels sont les symptômes ?

La diverticulose est asymptomatique. Ce sont ses complications qui sont à l’origine des symptômes avec, parmi elles, la diverticulite simple ou compliquée, et l’hémorragie diverticulaire.

La diverticulite simple correspond à l’inflammation d’un diverticule, ou sigmoïdite, car, en Occident, elle siège le plus souvent sur le côlon sigmoïde. Cette inflammation est due à l’accumulation de matières fécales à l’intérieur du diverticule, à l’origine d’un risque infectieux. Cette concrétion (voir Dico+) de matières fécales est appelée stercolithe.

→ La sigmoïdite se manifeste par une douleur importante dans le quadrant inférieur gauche de l’abdomen, d’où le terme d’« appendicite gauche », avec une sensibilité locale à la palpation associée à de la fièvre et à des troubles du transit, en général une constipation, dans 50% des cas.

→ La diverticulite peut se compliquer, à la phase aiguë, d’abcès, de perforations ou de péritonites (voir Dico+).

→ À distance de la crise, les complications sont les sténoses sigmoïdiennes diverticulaires et les fistules (voir Dico+).

En dehors des infections, les diverticules peuvent saigner et être à l’origine d’une hémorragie digestive basse. Le risque hémorragique est très rare en France.

Comment la diagnostiquer ?

En phase asymptomatique, la diverticulose est diagnostiquée de manière fortuite lors d’un scanner ou d’une coloscopie prescrits pour d’autres problèmes digestifs.

En cas de complications, le diagnostic de diverticulite sigmoïdienne aiguë est affirmé par un scanner abdomino-pelvien, avec injection de produit de contraste au mieux en ambulatoire.

Les signes cliniques, douleur, fièvre, et biologiques, avec hémogramme et dosage de la CRP (voir Dico+), même s’il s’agit d’une récidive, sont insuffisants pour poser le diagnostic.

Quelle prise en charge ?

Diverticulite simple. De récentes études ne recommandent plus d’antibiotique en première intention en l’absence de signes de gravité ou de comorbidité (insuffisance rénale chronique, immunosuppresseur, patient fragile sur le plan respiratoire ou cardio-vasculaire) et si le patient peut être suivi correctement les premiers jours. En l’absence de contexte social défavorable, la prise en charge est recommandée en ambulatoire.

→ Pour soulager, un traitement symptomatique par antispasmodique, laxatif et antalgique peut être instauré. L’antalgique de référence est le paracétamol seul, non associé à la codéine ou au tramadol pour éviter toute action sur le transit.

→ Si le traitement symptomatique est inefficace, une antibiothérapie par voie orale peut être mise en place : amoxicilline/acide clavulanique, à raison de 1 g trois fois par jour pendant sept jours, ou, en cas d’allergie aux pénicillines, ciprofloxacine 500 mg deux fois par jour, associée au métronidazole pour couvrir les germes anaérobies, 500 mg trois fois par jour pendant sept jours. En cas de signes de gravité ou d’immunosuppression, une antibiothérapie par voie parentérale IV est possible.

→ Aucune restriction alimentaire n’est recommandée.

→ Il n’y a pas de scanner de contrôle systématique.

Diverticulite compliquée. La prise en charge nécessite une hospitalisation. Une bithérapie antibiotique est mise en place d’emblée, avec soit amoxicilline/acide clavulanique + gentamicine, soit cefotaxime + métronidazole, soit ceftriaxone + métronidazole. En cas d’allergie : lévofloxacine + gentamicine + métronidazole. Un drainage de l’abcès est préconisé s’il est techniquement possible.

Quelle prévention ?

Place de la chirurgie prophylactique. La sigmoïdectomie élective représente 11 000 à 12 000 interventions chirurgicales par an. Elle consiste en l’ablation chirurgicale du côlon sigmoïde en dehors des périodes de crise de diverticulite.

→ Indiquée en prévention des rechutes de poussées de diverticulites, cette technique voit son intérêt de plus en plus remis en cause. Sont éligibles à la chirurgie(1) les patients présentant des formes sévères abcédées, des récidives fréquentes ayant un impact sur la qualité de vie, sous immunosuppresseur au long cours ou insuffisants rénaux chroniques, et les patients souffrant de symptômes digestifs récurrents suite aux poussées successives (smoldering diverticulitis, voir Dico+).

→ L’âge du patient et le nombre de poussées de diverticulites ne sont plus des critères d’indication de la chirurgie.

Autres mesures.

→ Aucun régime alimentaire n’est recommandé pour prévenir les récidives de diverticulites. La consommation de fruits à pépins, fruits à coque, tels que noix, noisettes, amandes, pistaches, etc., de blé ou de maïs n’est plus contre-indiquée. En revanche, préconiser 25 g de fibres par jour ; manger au moins deux fois par semaine lentilles (140 g équivalent à 6 g environ de fibres), haricots, pois chiches, céréales complètes…

→ Aucun probiotique n’a démontré d’efficacité dans la prévention des poussées lors des études portant sur le dérèglement du microbiote en cas de diverticulose.

→ Aucun médicament non plus. La rifaximine, antibiotique à large spectre, n’a pas démontré d’efficacité en prévention des risques infectieux. Aucun effet préventif contre la composante inflammatoire de la maladie diverticulaire n’a pu être mis en évidence pour la mélasamine, ou acide 5-aminosalicylique (5-ASA), dont l’utilisation n’est pas recommandée.

→ Les médicaments dits « diver ticulotoxiques » favorisent la survenue d’une crise de diverticulite ou l’aggravent (voir interview). Plus que la dose, c’est leur durée de prise qui est à prendre en compte. AINS et aspirine augmentent les risques de crise et de complications : abcès, perforations, sténoses du côlon, fistules. Corticoïdes au long cours et immunosuppresseurs sont également incriminés.

(1) Prise en charge médicale et chirurgicale de la diverticulite colique , Recommandations de bonne pratique, Haute Autorité de santé, novembre 2017.

Dico +

→ Concrétion : production solide se développant dans l’épaisseur des tissus dans un organe, un conduit ou une articulation au cours d’une affection.

→ Péritonite : inflammation et/ou infection du péritoine, membrane qui recouvre la cavité abdominale.

→ Sténoses sigmoïdiennes : rétrécissement du côlon lié à l’épaississement de la paroi d’origine inflammatoire et cicatricielle suite à un ou plusieurs épisodes de diverticulites.

→ Fistule : communication du côlon avec un organe voisin, vessie, intestin grêle ou vagin

Dico +

→ CRP, ou protéine C-Réactive : protéine synthétisée par le foie à la suite d’une inflammation.

→ Smoldering diverticulitis : douleurs chroniques liées aux poussées successives.

La paroi du côlon

Elle est formée de plusieurs couches.

→ La muqueuse tapisse l’intérieur.

→ La musculeuse correspond aux muscles. En se contractant, elle permet le brassage et la progression des selles. Les fibres circulaires, en se resserrant, diminuent le diamètre du côlon et les fibres longitudinales, en se contractant, raccourcissent le côlon.

→ La séreuse enveloppe le côlon.

Physiopathologie des diverticuloses*

1. Un moindre apport de fibres dans l’alimentation entraîne des selles moins volumineuses, et donc un travail musculaire plus important pour le côlon pour faire progresser les selles.

2. Les contractions musculaires plus puissantes augmentent la pression interne au sein du côlon.

3. Cette pression favorise l’apparition d’une hernie de la muqueuse au niveau des points de faiblesse anatomique des couches musculaires correspondant aux endroits où les vaisseaux sanguins pénètrent pour irriguer le côlon. Voilà pourquoi, dans certains cas, le vaisseau peut être lésé par le diverticule et entraîner une hémorragie diverticulaire.

(*) Source : www.hepatoweb.com

Interview

Les patients doivent signaler leur diverticulose

Dr Didier Loiseau, gastro-entérologue à Paris, auteur de La Diverticulose, Éd. Medi-Text.

Quel lien entre médicaments et diverticulose ?

On peut parler de liaison potentiellement dangereuse. Prescription et délivrance de médicaments « diverticulotoxiques » doivent s’accompagner d’informations sur les risques et les symptômes qui doivent alerter car, chez ces patients, le tableau clinique est moindre, ce qui retarde le diagnostic et accroît le risque de complications. Les patients doivent également signaler leur diverticulose. En automédication, il faut s’assurer que le patient n’a jamais eu de crise de diverticulite s’il demande de l’aspirine, ou surtout des AINS. Même avec une prise ponctuelle, le risque de déclencher une crise n’est pas exclu. Le rôle de l’équipe officinale est donc essentiel.