- Accueil ›
- Législation ›
- Droit des sociétés ›
- Remises de bonne foi sur le loyer
Remises de bonne foi sur le loyer
En période de crise sanitaire, le principe de bonne foi dans l’exécution contractuelle est d’autant plus central qu’il permet aux parties de négocier entre elles des adaptations. Ce qui fait pour l’heure autorité.
LES FAITS
Le 20 juillet 2018, la société PPM signe un bail commercial avec la société civile immobilière (SCI) M. La société PPM s’engage contractuellement à exploiter dans le local, situé dans un centre commercial, un fonds de commerce de parapharmacie. Le 8 juin 2020, la société PPM assigne la SCI M. pour obtenir du juge la suspension des paiements des loyers dus en raison de l’état d’urgence sanitaire. A défaut de cette suspension, la parapharmacie demande le report des 249 188 € de loyers et charges des 2e et 3e trimestres 2020.
LE DÉBAT
La parapharmacie estime que la crise sanitaire constitue un fait de force majeure rendant impossible l’exécution du contrat. Elle ajoute que le bailleur a manqué à son obligation de délivrance en lui interdisant l’accès aux locaux pendant la période de confinement. Ce manquement contractuel l’autorisait à ne pas payer son loyer en vertu du principe de l’exception d’inexécution prévu à l’article 1217 du Code civil. En réponse, le bailleur estime que, si l’ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire interdit l’exercice par le créancier d’un certain nombre de mesures d’exécution forcée pour recouvrer les loyers échus entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020, ce texte ne suspend pas l’exigibilité du loyer dû par le locataire commercial dans les conditions prévues au contrat. Le loyer peut donc être spontanément payé ou réglé par compensation. Le bailleur demande donc le paiement des loyers des 2e et 3e trimestres 2020.
LA DÉCISION
Le 26 octobre 2020, la formation de référé du tribunal judicaire de Paris estime que l’article 1104 du Code civil impose aux parties d’exécuter de bonne foi le contrat. Ce principe exige de vérifier si des circonstances exceptionnelles ne rendent pas nécessaire une adaptation des modalités d’exécution de leurs obligations respectives. Il ajoute que l’exception d’inexécution doit être appréciée à la lumière de cette obligation de bonne foi. En conséquence, le juge des référés considère que la demande en paiement des loyers afférents au 2e trimestre 2020 est sérieusement contestable, et n’est donc pas de sa compétence. Le bailleur doit demander au juge du fond de statuer sur le paiement de cette période. Au sujet des loyers du 3e trimestre, le juge condamne la parapharmacie à payer au bailleur 124 594 €. Si cette décision est dans la droite ligne de celle rendue dans une autre affaire par la même juridiction le 17 juillet 2020 (n° 02/04516), elle ajoute que la force majeure ou l’absence de délivrance du bien loué ne peuvent pas être opposées au bailleur. Dans l’affaire de juillet, le bailleur avait fait des propositions d’aménagement du paiement du loyer échu pendant la période de fermeture, mais le locataire n’en avait, pour sa part, formulé aucune en retour. Le juge a alors estimé que ces propositions démontraient la bonne foi du bailleur. Il avait donc condamné le locataire au paiement intégral du loyer du 2e trimestre 2020. Ces décisions montrent l’intérêt pour le locataire de se rapprocher du bailleur pour mettre en avant des circonstances exceptionnelles auxquelles il est confronté et de demander l’adaptation de son bail. Il évitera ainsi un contentieux de plusieurs années. La loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire permet aux locataires dont l’activité a été stoppée en raison du second confinement de bénéficier d’un report de loyer et de charges du 17 octobre 2020 au 16 février 2021. La pharmacie ne semble pas pouvoir bénéficier de droit de ce report puisqu’elle n’a pas fait l’objet d’une fermeture.
Source : TJ Paris, 26 octobre 2020, nos 20/53713 et 20/55901.
À RETENIR
Les loyers commerciaux du 2e trimestre 2020 sont dus.
Les parties ont l’obligation d’exécuter de bonne foi le contrat. A ce titre, elles peuvent négocier entre elles des aménagements du paiement du loyer échu.
La force majeure ne peut pas s’appliquer au paiement des loyers commerciaux.
- Financement des officines : 4 solutions vertueuses… ou pas
- Prescriptions, consultations : les compétences des infirmiers sur le point de s’élargir
- Dispensation à l’unité : chassez-la par la porte, elle revient par la fenêtre
- Quelles populations sont actuellement à risque de développer un scorbut ?
- Gilenya (fingolimod) : quelles conditions de délivrance ?

Regroupement : rêver d’un centre-bourg pour se réveiller en centre commercial
