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Les otites
Il existe plusieurs formes d’otites, dont la prise en charge diffère complètement. L’otite moyenne aiguë et l’otite séromuqueuse sont les plus fréquentes chez les enfants. L’otite externe survient, elle, souvent en été et/ou dans un contexte de baignades ou de traumatismes du conduit auditif externe.
La maladie
Rappels anatomiques
L’oreille est l’organe de l’audition et de l’équilibre. Elle est composée de trois entités anatomophysiologiques, l’oreille externe, l’oreille moyenne et l’oreille interne.
Oreille externe
• Elle est formée par le pavillon de l’oreille, le condit auditif externe et la couche épidermique du tympan.
• Le cérumen est un mélange riche en corps gras, produit par les glandes sébacées et les glandes sudoripares (cérumineuses) situées dans la peau du cartilage. Il est sécrété dans le conduit auditif externe, dont il lubrifie et protège la peau. De pH légèrement acide 5 à 7, il possède des propriétés antibactériennes. Il s’élimine naturellement vers l’extérieur, entraînant avec lui poussières et particules qui peuvent s’accumuler dans le conduit auditif.
Oreille moyenne
• Séparée de l’oreille externe par le tympan, elle comprend la chaîne des osselets, qui transmettent les sons vers l’oreille interne.
• L’oreille moyenne et le rhinopharynx sont tapissés par la même muqueuse respiratoire ciliée et communiquent entre eux par la trompe d’Eustache, ou trompe auditive.
• La trompe d’Eustache a la forme d’un canal étroit qui s’ouvre sous l’action de petits muscles, par exemple lors de la déglutition ou d’un bâillement. Ceci permet de rééquilibrer les pressions de part et d’autre du tympan, et de drainer des sécrétions de l’oreille moyenne vers l’arrière-gorge.
Oreille interne
C’est un ensemble de sacs membraneux remplis de liquide et situés dans les cavités osseuses. L’oreille interne transforme l’onde sonore en signaux électriques transmis au cerveau.
Physiopathologie
L’otite est une inflammation aiguë ou chronique de l’oreille. Ses trois formes les plus courantes touchent l’oreille moyenne ou externe.
Otite moyenne aiguë (OMA)
• C’est une inflammation d’origine infectieuse de l’oreille moyenne. Elle a souvent pour porte d’entrée une rhinopharyngite virale. Celle-ci provoque une diminution des mouvements mucociliaires et une inflammation locale favorisant l’adhésion et la multiplication de bactéries normalement présentes dans le rhinopharynx et qui peuvent coloniser l’oreille moyenne et entraîner une OMA purulente (voir Diagnostic).
• Les germes en cause sont des virus tels que virus respiratoire syncytial, rhinovirus…, ou des bactéries, notamment Haemophilus influenzae, Streptococcus pneumoniae, Moraxella catarrhalis.
• Fréquente avant l’âge de 3 ans, l’OMA est plus rare chez l’adulte.
Otite séromuqueuse (OsM)
• L’otite séromuqueuse, ou séreuse, est une inflammation chronique de l’oreille moyenne, évoluant depuis plus de trois mois.
• Elle se définit par la présence d’un épanchement de viscosité variable non purulent derrière la membrane tympanique.
• Cet épanchement est favorisé par un dysfonctionnement ou une immaturité de la trompe d’Eustache, d’où un défaut de ventilation et d’évacuation des sécrétions de l’oreille moyenne, qui s’accumulent. Il est aussi favorisé par des modifications de la muqueuse de l’oreille moyenne, tel un épaississement, suite à des infections ORL répétées comme des OMA ou des rhinopharyngites.
• Elle est très fréquente avant 6 ans, et surtout en hiver en lien avec des rhinopharyngites.
Otite externe
• C’est une inflammation aiguë du conduit auditif externe, le plus souvent d’origine bactérienne.
• Les germes en cause sont notamment Pseudomonas aeruginosa et Staphylococcus aureus, dont la prolifération est favorisée par la chaleur et l’humidité et/ou par une inflammation locale du conduit auditif externe, liée par exemple à des micro-traumatismes répétés : usage de bâtonnets dans les oreilles… Des champignons sont beaucoup plus rarement en cause.
• Elle touche plutôt l’adulte et le grand enfant.
Facteurs de risque
Otite moyenne aiguë
Les principaux facteurs favorisants sont les antécédents familiaux, l’âge, notamment la précocité du premier épisode d’OMA avant 6 mois qui augmente le risque de récidive, le mode de garde en collectivité, le tabagisme passif, la carence martiale et « peut-être la présence d’un RGO car l’acidité pourrait altérer la muqueuse mucociliaire », précise le professeur Leboulanger, ORL à l’hôpital Necker, à Paris.
Otite séromuqueuse
• L’hypertrophie des végétations adénoïdes, qui jouent le rôle de « réservoirs » des germes, est le principal facteur de risque. Ces formations lymphoïdes, hébergeant des anticorps, sont localisées derrière le nez, en haut du palais, mais non visibles par la bouche. Particulièrement stimulées chez le jeune enfant, elles régressent spontanément, en général autour de la puberté.
• Autres causes : infections ORL à répétition, notamment rhumes et OMA, malformation congénitale, dont la fente vélo-palatine (voir Dico+ p. 33) ou la trisomie 21, dysfonctionnement de la trompe d’Eustache, d’où une mauvaise ventilation de l’oreille moyenne, obstruction nasale chronique, ou, chez l’adulte, tumeur du rhinopharynx ; dans ce cas, l’otite est unilatérale. Chez l’enfant, le mode de garde en crèche, une carence martiale, le tabagisme passif, un terrain allergique aux acariens, pollens, aliments… sont des facteurs favorisants.
Otite externe
• Les principaux facteurs favorisants sont la macération liée à une humidité excessive du conduit auditif externe en cas de baignades, de plongées…, et les traumatismes locaux, par exemple un nettoyage trop agressif du conduit auditif externe.
• Autres causes d’inflammation locale : une allergie de contact causée par un shampooing par exemple, un eczéma ou une dermite séborrhéique, le port d’une prothèse auditive ou l’usage fréquent de protections auditives.
Signes cliniques
Otite moyenne aiguë
• L’otalgie est plus ou moins importante, avec irritabilité, pleurs, réveils nocturnes, frottements de l’oreille chez l’enfant, et est associée à une hyperthermie. Des signes liés à l’infection virale déclenchante peuvent être présents : obstruction nasale, rhinorrhée, toux…
• Chez le nourrisson, la fièvre et l’otalgie sont inconstants et parfois seuls des symptômes digestifs sont présents, avec diarrhées, vomissements… Une otite associée à une conjonctivite est évocatrice d’une infection par Haemophilus influenzae.
• Une otorrhée, c’est-à-dire un écoulement de liquide par le conduit auditif externe, peut survenir. Elle permet en général la disparition de la douleur et une baisse de la fièvre.
Otite séromuqueuse
• Elle arrive de manière insidieuse, sans fièvre ni otalgie intense, mais une baisse de l’audition peut être constatée, plus ou moins grande et variable d’un jour à l’autre, ce qui explique qu’elle passe parfois inaperçue.
• Selon l’importance de la baisse d’audition, des troubles du comportement, du langage ou des apprentissages sont possibles. L’adulte ou le grand enfant peut se plaindre d’impression de « plénitude » de l’oreille, de bruit étouffé ou de déplacement de liquide dans l’oreille.
Otite externe aiguë
• La douleur peut être intense, irradiant vers la mâchoire, et accentuée par la manipulation du pavillon de l’oreille ou du tragus, le cartilage souple à l’entrée du conduit auditif.
• Il peut exister parfois un prurit, des otorrhées, des adénopathies en avant de l’oreille, c’est-à-dire une augmentation de volume des ganglions lymphatiques, une rougeur de l’orifice du conduit auditif, plus rarement de la fièvre.
Diagnostic
Il est essentiellement clinique.
Otoscopie bilatérale systématique
L’otoscopie bilatérale, qui visualise le tympan et le conduit auditif externe avec un otoscope, élimine d’autres causes d’otalgie auriculaire, avec bouchon de cérumen, corps étrangers…, ou extra-auriculaires, dont les otalgies réflexes lors d’angines, de pharyngites ou d’origine dentaire, etc. Un tympan normal est translucide, de couleur grise et légèrement concave. Son aspect varie selon le type d’otite
• Au cours de l’otite moyenne aiguë, tout dépend du stade de la maladie.
→ Otite congestive : le tympan est rouge mais non bombé ; il n’y a pas d’épanchement. Cette otite peut guérir spontanément ou évoluer vers une otite purulente.
→ Otite purulente collectée : le tympan est rouge vif, inflammatoire et bombé du fait de l’épanchement derrière le tympan.
→ Otite purulente perforée : le tympan se perfore sous la pression de l’épanchement ; il est alors peu visible car le conduit est plein de pus.
• Au cours de l’otite séromuqueuse : le tympan a un aspect mat, parfois bleuté, des bulles d’air ou de liquide sont parfois visibles à travers la membrane tympanique.
• Au cours de l’otite externe : l’examen est souvent difficile, car douloureux. Il révèle un conduit auditif externe rouge, irrité, souvent œdématié et rétréci.
Autres examens
• Une audiométrie, réalisée par l’ORL, évalue un éventuel déficit auditif en cas d’OSM.
• La paracentèse consiste à pratiquer une incision du tympan pour évacuer le liquide purulent accumulé dans l’oreille moyenne afin d’identifier la bactérie responsable en cas d’échec thérapeutique, d’otites récidivantes, de terrain particulier (nourrisson de moins de 3 mois, déficit immunitaire) et d’OMA non perforée et très douloureuse. Douloureuse, elle s’effectue souvent sous anesthésie locale.
Évolution
Otite moyenne aiguë
• L’évolution est souvent favorable en quelques jours, spontanément ou sous traitement. En cas d’otite perforée, la fermeture du tympan survient après huit à dix jours.
• Les complications infectieuses sont rares : mastoïdite (voir info+ p. 35), paralysie faciale, méningite, abcès cérébral… Elles sont plus à craindre chez l’enfant de moins de 2 ans, justifiant l’antibiothérapie systématique avant cet âge dans le cas d’une otite moyenne aiguë purulente.
Otite séromuqueuse
• Dans la grande majorité des cas, l’évolution se fait spontanément vers la guérison en quelques semaines à quelques mois. Toutefois, des épisodes prolongés d’hypoacousie peuvent avoir un retentissement sur l’acquisition du langage ou les apprentissages scolaires. L’hypoacousie est une mauvaise perception des sons malgré une transmission correcte.
• Rarement, l’OSM peut se compliquer de lésions de l’oreille moyenne aggravant l’audition : poche de rétraction du tympan (voir Dico+ p.35), perforation du tympan, cholestéatome (voir Dico+ p. 35), voire destruction des osselets.
Otite externe
• L’évolution est le plus souvent favorable en quelques jours sous traitement.
• Une vigilance s’impose chez les patients immunodéprimés ou atteints d’un diabète mal équilibré, chez qui l’infection peut s’étendre à l’os temporal ; on parle alors d’otite maligne ou nécrosante.
Le traitement
Objectif
La prise en charge vise à soulager la douleur, à éradiquer le foyer infectieux et à prévenir les complications.
Au cours d’une otite séreuse, une surveillance régulière s’impose pour dépister une possible baisse auditive.
Stratégie
Elle diffère selon le type d’otite.
Otite moyenne aiguë
Traitement symptomatiqueLe paracétamol est l’antalgique-antipyrétique de référence pour soulager la douleur et faire diminuer la fièvre. L’ibuprofène est une alternative si le paracétamol ne suffit pas.
Au stade congestifUne antibiothérapie générale n’est pas indiquée. Des gouttes auriculaires à visée anesthésique et antalgique (Otylol, Otipax…) peuvent éventuellement compléter le traitement symptomatique, avec désobstruction nasale, antalgiques/ antipyrétiques…
Les antibiotiques locaux sont inutiles.
En cas d’OMA purulente• Les gouttes auriculaires sont inutiles, sauf en cas d’otite perforée, pour laquelle sont indiquées celles à base de fluoroquinolones ou de rifamycine. Les aminosides comme la néomycine, dans AntibioSynalar, Panotile et Polydexa, et la framycétine, dans Framyxone, sont formellement contre-indiqués si le tympan est perforé du fait d’un risque d’ototoxicité, avec risque de troubles de l’équilibre, surdité.
• Selon l’âge.
→ Chez l’enfant de moins de 2 ans et l’adulte, l’antibiothérapie par voie générale est recommandée d’emblée.
→ Chez l’enfant de plus de 2 ans, elle est recommandée en cas de symptômes « bruyants », par exemple fièvre élevée, otalgie intense… Elle peut être différée dans les autres cas, sous réserve d’une réévaluation après 48 à 72 heures.
• Choix de l’antibiotique : amoxicilline en première intention pendant huit à dix jours avant l’âge de 2 ans et durant cinq jours après 2 ans. L’association amoxicilline/acide clavulanique est indiquée en cas de syndrome otite-conjonctivite, en raison de la forte probabilité d’infection par Haemophilus influenzae, bactérie productrice de bêta-lactamase.
En cas d’allergie à la pénicilline sans allergie aux céphalosporines, on recourt aux céphalosporines, avec la cefpodoxime chez l’enfant. En cas d’allergie aux bêta-lactamines, un sulfamide, le cotrimoxazole, est indiqué chez l’enfant. Le cotrimoxazole et la pristinamycine sont, eux, indiqués chez l’adulte.
• En l’absence d’amélioration après 48 heures ou en cas de réapparition des symptômes dans les quatre jours suivant l’arrêt de l’antibiotique, il faut suspecter un germe résistant. L’association amoxicilline/acide clavulanique est alors proposée si elle n’a pas été utilisée. Un avis ORL peut aussi être recommandé pour la réalisation d’une paracentèse (voir Diagnostic).
Otite séromuqueuse
Surveillance avant tout• L’otite séromuqueuse guérissant le plus souvent spontanément, une surveillance est mise en place, avec notamment des évaluations régulières de l’audition.
• Des traitements de fond de la muqueuse rhinopharyngée, avec lavages de nez, antihistaminique en cas de terrain allergique…, sont souvent préconisés, « bien que sans efficacité prouvée », note le Pr Leboulanger. Les antibiotiques par voie générale n’ont pas non plus d’efficacité démontrée.
• Si la baisse d’audition est gênante, une corticothérapie orale courte sur sept jours peut parfois permettre une amélioration.
Aérateurs transtympaniques• Les aérateurs transtympantiques, ou « yoyos », sont des tubes creux posés en travers de la membrane tympanique sous anesthésie générale et microscope en ambulatoire.
• Ils permettent de rétablir une ventilation correcte de l’oreille moyenne. Ils s’expulsent spontanément après six à douze mois en général ou sont retirés par l’ORL.
• Leur pose est recommandée lorsque l’otite séromuqueuse entraîne des otites moyennes aiguës répétées ou en cas de baisse d’audition d’au moins 25 dB, ou encore en cas de rétraction tympanique. Une adénoïdectomie, c’est-àdire une réduction chirurgicale du volume des végétations adénoïdes, peut y être associée si nécessaire chez l’enfant de plus de 4 ans.
Otite externe
Traitement général• Un antalgique de palier 2 peut être nécessaire pour calmer une douleur importante : paracétamol/ codéine chez l’adulte et l’enfant de plus de 12 ans, tramadol chez l’enfant à partir de 3 ans.
• L’antibiothérapie par voie générale n’est indiquée que chez les patients à risque de complications : diabète déséquilibré, personnes immunodéprimées…
Traitement local• Les gouttes auriculaires antibiotiques sont indiquées. La présence d’un corticoïde peut aider à réduire l’inflammation locale. Une otite externe n’entraînant pas par elle-même de perforation de la membrane tympanique, les aminosides peuvent être utilisés.
• En revanche, s’il existe une perforation du tympan associée pour une autre raison que l’otite externe, les aminosides (framycétine, néomycine), qui sont ototoxiques, sont contre-indiqués, tout comme les antibactériens et anesthésiques locaux. Au moindre doute sur l’intégrité du tympan, une fluoroquinolone (Oflocet) ou la rifamycine (Otofa) est indiquée.
Médicaments antibiotiques
Bêtalactamines
• Molécules. Pénicillines : amoxicilline, amoxicilline/ acide clavulanique. Céphalosporines : céfuroxime (deuxième génération, chez l’adulte uniquement), cefpodoxime et céfotiam (troisième génération).
• Mode d’action : inhibition de la synthèse du peptidoglycane, constituant de la paroi bactérienne. L’acide clavulanique inhibe les bêtalactamases, enzymes bactériennes sécrétées par certaines souches bactériennes qui empêchent l’action de l’antibiotique.
• Effets indésirables : troubles gastro-intestinaux, dont diarrhée, notamment en association à l’acide clavulanique, éruptions cutanées, candidose cutanéo-muqueuse ; rarement colite pseudomembraneuse due à Clostridium difficile et manifestations allergiques, avec urticaire, œdème de Quincke, voire éruption bulleuse.
• Surveillance : diarrhée sévère, douleurs abdominales importantes, fièvre élevée font suspecter une colite pseudomembraneuse.
• Conservation des suspensions buvables. Amoxicilline : sept jours à température ambiante après reconstitution ou au réfrigérateur pour certains génériques ; amoxicilline/acide clavulanique : sept jours au réfrigérateur ; cefpodoxime : dix jours au réfrigérateur.
Sulfamides et molécules associées
• Molécules : le cotrimoxazole associe le sulfaméthoxazole, un sulfamide, et le triméthoprime, un anti-infectieux agissant en synergie avec le sulfamide.
• Mode d’action : inhibition de la dihydrofolate synthétase, enzyme bactérienne qui permet la synthèse d’acide folique, co-facteur de la synthèse des bases de l’ADN.
• Effets indésirables : photosensibilisation, manifestations cutanées pouvant être graves, avec allergie croisée avec les sulfamides hypoglycémiants, syndrome de Lyell ou Stevens-Johnson (voir Dico+ p. 37), atteinte neurologique (convulsions), leucopénie et thrombopénie, atteintes rénales, avec cristalluries pouvant être prévenues par une hydratation suffisante lors du traitement.
• Surveillance : un érythème généralisé fébrile associé à des pustules impose l’arrêt du traitement et contre-indique définitivement les sulfamides.
Synergistines
• Molécule : pristinamycine.
• Mode d’action : inhibition de la synthèse des protéines bactériennes.
• Effets indésirables : troubles digestifs, allergies cutanées, candidoses buccales, toxidermies bulleuses rares mais graves.
• Surveillance : la survenue d’effets indésirables cutanés graves impose l’arrêt du traitement et contre-indique toute nouvelle administration.
La vie quotidienne
Observance
Antibiothérapie
Insister sur le respect de la durée prescrite, même après disparition de l’otalgie, de la fièvre… pour éviter les échecs thérapeutiques et la survenue de résistances bactériennes.
• Par voie générale, une prise en milieu ou en fin de repas peut aider à réduire les troubles digestifs tels que nausées, dyspepsies. La prise d’une levure, Saccharomyces boulardii (Ultra Levure…), et/ou de la souche microbiotique Lactobacillus rhamnosus GG (Babybiane Imedia, Probiolog DIA, Entestil, Smebiocta Protect…) peut être recommandée pour limiter la survenue d’une diarrhée sous antibiotique.
• Sous sulfamide, alerter sur la photosensibilisation et recommander vêtements couvrants et/ou crème solaire haute protection.
• Gouttes auriculaires : réchauffer le flacon entre les mains car des vertiges peuvent survenir si les gouttes sont trop froides. Pencher la tête et instiller le produit, en évitant le contact de l’embout avec l’oreille. Laisser la tête inclinée quelques minutes en tirant une ou deux fois sur le lobe de l’oreille pour favoriser la diffusion de la solution.
Après adénoïdectomie
• Privilégier les aliments mous, tièdes ou froids pour limiter la douleur à la déglutition.
• Pas d’aspirine ni d’AINS, qui pourraient favoriser les saignements les jours suivant la chirurgie. « Il est normal que l’enfant mouche “rosé” les premiers jours mais tout saignement important impose de contacter rapidement l’hôpital », précise le Pr Leboulanger.
Automédication
• Proscrire l’utilisation de gouttes auriculaires en automédication pour calmer des douleurs d’oreille… à moins d’être certain de l’intégrité de la membrane tympanique ! Ce qui peut être le cas d’une otite externe, suspectée lors de douleurs dans un contexte de baignade, et sans antécédent particulier d’intervention ou traumatisme de l’oreille.
• Pour soulager l’otalgie, proposer l’application de chaud, pack chaud/froid comme Coldhot, Actipoche…, et recommander de dormir en position semi-allongée. Le paracétamol est l’antalgique par voie orale de première intention. L’ibuprofène en automédication est à déconseiller dans un contexte infectieux.
Vie quotidienne
Bains et baignades
• Au cours d’une otite aiguë, otite externe ou otite moyenne aiguë, proscrire les baignades jusqu’à guérison complète pour ne pas majorer le risque infectieux.
• En cas de port d’un aérateur transtympanique, suivre les recommandations du médecin ORL, qui peuvent dépendre du matériel posé. « En général, pas de précaution particulière sous la douche mais il faut éviter que l’eau n’entre dans l’oreille lors des baignades en raison du risque infectieux », précise le Pr Leboulanger.
Des protections auditives siliconées « anti-eau » peuvent être utiles : Quies Silicone Natation, Alpine SwimSafe, Le Pluggy, Blox Aquatique… Attention, elles sont insuffisantes en cas de sauts ou plongeons ! Un port prolongé est déconseillé car il maintient dans le conduit une humidité favorable aux infections. Retirer les protections auditives après la baignade.
Hygiène auriculaire
• Au quotidien, un simple jet d’eau tiède sous la douche dirigé vers l’entrée du conduit auditif suffit. Le cérumen est progressivement expulsé vers l’extérieur du conduit.
• Les solutions d’hygiène auriculaire telles que Audispray, Docuspray… sont utiles chez les personnes qui produisent beaucoup de cérumen, mais elles sont contre-indiquées en cas de tympan perforé !
• Proscrire les cotons-tiges ou tout autre objet introduit dans le conduit auditif, tel un cureoreille.
Ces pratiques fragilisent le film lipidique protecteur et favorisent la survenue d’otites externes. De plus, elles tendent à repousser le cérumen au fond du conduit, ce qui expose à des bouchons d’oreilles.
Prévenir
• Otite moyenne aiguë et otite séreuse. Apprendre à l’enfant à se moucher le plus tôt possible (voir interview p. 33).
→ Les solutions d’hygiène nasale telles que les sprays d’eau de mer, ProRhinel, Actisoufre…, aident à diminuer la quantité de germes présents en cas de rhume et facilitent le mouchage en fluidifiant les sécrétions.
→ La vaccination antipneumococcique, obligatoire désormais, a réduit l’incidence des otites moyennes aiguës liées au pneumocoque chez les nourrissons et ses complications.
• Otite externe : limiter l’humidité du conduit auditif externe et tout traumatisme du conduit.
→ Quelques gouttes d’huile d’amande douce déposées à l’entrée du conduit auditif forment un film faisant barrière à l’eau.
→ Après la douche ou les baignades, il faut bien sécher le conduit, mais sans l’agresser, avec un sèche-cheveux, ou une serviette par tamponnements doux.
Avec l’aimable collaboration du Pr Nicolas Leboulanger, service ORL et chirurgie cervico-faciale, hôpital Necker Enfants malades, Paris.
Info +
→ Chez le nourrisson et l’enfant, la trompe d’Eustache est immature. Elle est plus courte, plus horizontale et béante, ce qui favorise le passage des germes vers l’oreille moyenne et explique la fréquence importante des otites moyennes aiguës et des otites séreuses.
Info +
→ L’allaitement maternel exclusif et prolongé au moins trois mois est reconnu comme un facteur protecteur d’otite moyenne aiguë chez le nourrisson de moins de 1 an.
→ Des otites moyennes aiguës récidivantes peuvent favoriser l’apparition d’une otite séromuqueuse. Inversement, une otite séromuqueuse est un facteur de risque d’OMA.
Otite barotraumatique
→ Elle est provoquée par des variations importantes et rapides de pression dans l’oreille lors de plongées, de voyages en avion… Le tympan se déforme et peut subir des lésions allant jusqu’à la rupture.
→ La guérison peut être spontanée mais toute douleur intense nécessite un avis médical rapide car le risque infectieux est important. Le traitement est fonction de l’importance du barotraumatisme : vasoconstricteurs nasaux, corticoïdes, antibiothérapie, aérosol manosonique, paracentèse.
→ La prévention repose sur la manœuvre de Valsalva, qui rééquilibre les pressions de part et d’autre du tympan. Pour cela, inspirer et expirer doucement en se bouchant le nez et en fermant la bouche. Les bouchons d’oreilles munis d’un filtre, comme Quies Filtre antipression, Alpine FlyFit, Pluggerz Travel…, limitent la vitesse de variation de pression de l’air. Ils sont utiles en prévention avant le décollage et surtout l’atterrissage en avion, ou avant le passage des tunnels en train !
interview“Se moucher prévient l’otite séreuse et moyenne aiguë”
Professeur Nicolas Leboulanger, service ORL et chirurgie cervico-faciale, hôpital Necker Enfants malades, Paris.
Peut-on prévenir l’otite séromuqueuse ?
C’est compliqué… Il faudrait prévenir les rhumes et les otites moyennes aiguës ! En revanche, apprendre à l’enfant à se moucher en cas de rhume plutôt que renifler est possible et c’est le meilleur moyen de prévenir l’otite séreuse et l’otite moyenne aiguë. Le fait de se moucher fait s’ouvrir la trompe d’Eustache et permet d’insuffler de l’air dans l’oreille moyenne. Elle est ainsi bien ventilée et les sécrétions peuvent être évacuées. Quand on renifle, l’inverse se produit. La paroi se resserre et empêche le drainage des sécrétions. Dans tous les cas, l’otite séreuse guérit en général spontanément en quelques semaines à quelques mois. La prise en charge repose donc essentiellement sur la surveillance, en attendant que le problème se résolve seul.
Dico +
→ Fente vélo-palatine : absence de fusion du tissu embryonnaire du visage aboutissant à une perte de substance et à une communication entre le nez et la bouche.
Info +
→ Le recours à la lévofloxacine dans l’OMA de l’adulte doit rester exceptionnel en raison des effets indésirables des fluoroquinolones et du risque important de sélection de bactéries résistantes à cette classe d’antibiotiques.
L’eau oxygénée boratée
→ Des solutions d’eau oxygénée boratée peuvent être prescrites pour nettoyer et/ou assécher le conduit auditif externe lors des otites externes ou en cas d’otite moyenne aiguë perforée. Il s’agit d’une préparation magistrale obtenue par dissolution à froid de 2,5 g d’acide borique et de 0,5 g de borate de sodium dans 100 mL d’eau oxygénée à 10 volumes. La préparation est réalisable à l’officine sous couvert d’une autorisation de l’Agence régionale de santé.
→ En raison d’un effet « décapant » du film lipidique protecteur, il ne faut y recourir que durant quelques jours maximum.
→ Précautions : ne pas employer chez l’enfant de moins de 30 mois car risque de passage systémique à l’origine d’effets indésirables graves digestifs, cutanés, neurologiques. Du fait d’effets reprotoxiques(1), elles ne sont pas non plus recommandées aux garçons au moment de la puberté, ni aux femmes enceintes ou allaitantes.
Chez les femmes en âge de procréer, une contraception efficace est préconisée un mois avant le début du traitement et jusqu’à un mois après son arrêt.
(1) Risques liés à l’utilisation de préparations hospitalières, magistrales et officinales contenant de l’acide borique et/ou ses dérivés (borax), ANSM, juillet 2013.
Dico +
→ Mastoïdite : inflammation d’un os (ostéite) de la mastoïde à évoquer en présence de fièvre et de douleur spontanée ou à la palpation de la mastoïde, saillie de l’os temporal en arrière du pavillon de l’oreille.
→ Rétraction du tympan : aspiration vers l’intérieur de la membrane tympanique causée par des troubles de ventilation de l’oreille moyenne. Cette poche de rétraction peut ellemême être à l’origine de complications : adhérer à la chaîne des osselets, entraîner un cholestéatome…
→ Cholestéatome : masse de tissu épidermique kératinisé se développant dans l’oreille moyenne et qui érode peu à peu les parois osseuses et les osselets. C’est une forme d’otite chronique pouvant être responsable de surdité, de vertiges, de méningite, de paralysie faciale…
Info +
→ Des séances d’aérosol manosonique sont parfois proposées dans l’otite séromuqueuse, avec une efficacité modeste. La surpression favorise la pénétration des produits nébulisés dans les trompes d’Eustache.
Principales contre-indications des traitements
→ Amoxicilline : allergie à la pénicilline.
→ Céfotiam, cefpodoxime, céfuroxime : allergie aux céphalosporines.
→ Céfotiam : insuffisance rénale sévère, insuffisance hépatique.
→ Cotrimoxazole : prématurés et nouveau-nés de moins de 6 semaines, allergie aux sulfamides, insuffisance rénale sévère, atteinte hépatique sévère.
→ Pristinamycine : antécédent d’éruptions cutanées graves, allaitement.
→ Gouttes auriculaires à base d’aminosides et/ou d’anesthésiques antibactériens locaux : perforation tympanique.
→ Gouttes auriculaires à base de corticoïdes : infections virales du conduit auditif externe.
Info +
→ La codéine ne doit plus être utilisée chez les enfants de moins de 12 ans en raison d’un risque de dépression respiratoire, ni après adénoïdectomie ou amygdalectomie, quel que soit l’âge, avec risque additionnel de syndrome d’apnées obstructives du sommeil.
Dico +
→ Syndrome de Lyell et Syndrome de Stevens-Johnson : atteintes cutanéo-muqueuses bulleuses et nécrotiques appelées nécrolyses épidermiques toxiques, associées à de la fièvre et une altération de l’état général.
En savoir +
→ Société française d’ORL
Les recommandations en oto-rhinolaryngologie. www.orlfrance.org
→ Haute Autorité de santé
Fiches mémo Otite moyenne aiguë purulente de l’enfant de plus de 3 mois et Otite moyenne aiguë purulente de l’adulte, novembre 2016.
Fiche mémo Prise en charge médicamenteuse de la douleur chez l’enfant : alternatives à la codéine, janvier 2016. www.has-sante.fr
À RETENIR
SUR LA MALADIE
L’otite est une inflammation aiguë ou chronique de l’oreille.
Les trois formes les plus courantes d’otite touchent l’oreille moyenne ou externe.
→ Otite moyenne aiguë (OMA) : fréquente chez l’enfant dans un contexte de rhinopharyngite.
Prévention : encourager la désobstruction rhinopharyngée.
→ Otite séromuqueuse : survient de façon insidieuse suite à des rhinopharyngites ou OMA répétées. Pas ou peu douloureuse mais baisse d’audition possible, à surveiller.
Prévention : désobstruction rhinopharyngée, apprendre à l’enfant à se moucher au lieu de renifler.
→ Otite externe : fréquente en été dans un contexte de baignade. Très douloureuse, notamment si on touche l’oreille. Prévention : séchage en douceur du conduit auditif externe après baignade ; proscrire cotonstiges ou autres objets dans le conduit car ils fragilisent le film lipidique protecteur.
SUR LES TRAITEMENTS
→ OMA. Enfant < 2 ans : amoxicilline en première intention systématique huit à dix jours. Enfant > 2 ans : l’antibiothérapie peut être différée ; sinon amoxicilline durant cinq jours en première intention. Adulte : d’emblée, amoxicilline sur cinq jours.
→ Otite externe : gouttes auriculaires antibiotiques et antalgique par voie générale. Antibiothérapie générale non indiquée, sauf patient diabétique mal équilibré ou immunodéprimé car risque d’évolution grave.
→ Otite séromuqueuse : surveillance. Pose d’aérateurs transtympaniques, avec adénoïdectomie si nécessaire, uniquement en cas de retentissement important : baisse de l’audition, OMA répétées.
→ Si tympan perforé (OMA perforée, aérateurs transtympaniques…) : pas de gouttes auriculaires à base d’aminosides, ni de gouttes antiseptiques/antalgiques.
SUR LES CONSEILS
→ Soulager la douleur : paracétamol en première intention ; pas d’AINS en automédication.
→ Prévention de l’otite barotraumatique : manœuvre de Valsalva et/ou protections auditives spécifiques « avion ».
→ Port d’aérateurs transtympaniques : prudence en cas de baignades car risque infectieux potentiel en cas de pénétration de l’eau dans les oreilles.
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