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Les diurétiques de l’anse
Plus puissants de tous les diurétiques, les diurétiques de l’anse sont employés dans des situations d’urgence comme l’œdème aigu du poumon. Ce sont par ailleurs les seuls utilisables et efficaces chez l’insuffisant rénal chronique sévère.
Mécanisme d’action
Inhibition du cotransporteur Na+/K+/2Cl–
→ Les diurétiques de l’anse agissent au niveau de la branche ascendante de l’anse de Henlé où ils inhibent le cotransporteur Na+/K+/2Cl–, ce qui a pour effet d’inhiber la réabsorption tubulaire du sodium, du potassium et du chlore. Ils exercent donc un effet hyponatrémiant, hypokaliémiant et hypochlorémiant, associé indirectement à une fuite urinaire de magnésium et de calcium.
→ Leur action est très rapide (délai de 30 min per os et 10 min en intraveineuse, ou IV), très intense (excrétion de 20 à 25 % de la quantité de sodium filtré) mais de courte durée (4 à 6 heures par voie en orale et 3 heures en IV). D’où leur utilisation en situations d’urgence. Les risques de déshydratation et d’hyponatrémie sont plus marqués qu’avec les diurétiques thiazidiques, ce qui explique qu’ils ne soient pas recommandés en 1re intention dans l’hypertension artérielle.
→ Leur rapidité d’action justifie aussi de les administrer préférentiellement le matin afin d’éviter des levers nocturnes.
Indications
Œdèmes d’origine cardiaque et rénale
→ Les diurétiques de l’anse sont indiqués en IV (bumétanide, furosémide) dans l’œdème aigu du poumon et l’urgence hypertensive. Ils sont également utilisés par voie orale pour résorber les œdèmes liés à une insuffisance cardiaque, rénale ou hépatique.
→ Les formes à libération prolongée de furosémide ou de pirétanide, dont les effets sont moins intenses mais perdurent plus longtemps, sont préconisées lors d’hypertension artérielle. Elles sont recommandées en cas de contre-indications aux diurétiques thiazidiques, en particulier chez l’insuffisant rénal sévère.
Pharmacocinétique
Forte liaison à l’albumine
→ Absorption : la biodisponibilité orale du furosémide est de 50 %, celle du bumétanide de presque 100 %. C’est pourquoi les doses IV et orales de bumétanide sont identiques, alors que la dose orale de furosémide correspond au double de celle utilisée en IV. Le pirétanide est commercialisé uniquement en présentation orale sous forme de gélules gastrorésistantes dont la biodisponibilité est de l’ordre de 85 à 90 %.
→ Distribution : les diurétiques de l’anse circulent dans le plasma sous formes liées aux protéines (taux de fixation à l’albumine de l’ordre de 95 à 98 %). Le furosémide et le bumétanide passent dans le lait maternel (il manque des données concernant le pirétanide).
→ Métabolisme : ils sont faiblement métabolisés par le foie.
→ Elimination : les diurétiques de l’anse, non filtrés par le glomérule, sont éliminés par sécrétion tubulaire au niveau du tube contourné proximal pour ensuite atteindre l’anse de Henlé, leur site d’action. Ceci explique que leur posologie doit être augmentée chez l’insuffisant rénal pour conserver leur efficacité (la sécrétion tubulaire étant diminuée en cas d’insuffisance rénale). La demi-vie d’élimination du pirétanide est de 60 minutes, celle du furosémide de 50 minutes et celle du bumétanide de 1 h 30.
Effets indésirables
Déplétion hydrosodée
→ Troubles hydroélectrolytiques : hypovolémie, hyponatrémie (manifestation possible par une confusion) et déshydratation qui peut se compliquer d’une insuffisance rénale fonctionnelle ou d’une hypotension pouvant justifier l’arrêt du traitement ou la réduction de la posologie ; hypokaliémie majorant le risque de torsades de pointe ; hypomagnésémie ; hypocalcémie.
→ Troubles métaboliques : hyperuricémie (par diminution de la sécrétion tubulaire d’acide urique) pouvant provoquer, bien que rarement, une crise de goutte ; alcalose métabolique par hypochlorémie ; diminution de la tolérance aux glucides ; troubles lipidiques.
→ Autres : ototoxicité, notamment lors de l’utilisation de fortes doses ou en association à d’autres médicaments ototoxiques ou chez le sujet hypoprotéinémique ; manifestations cutanées (exceptionnellement) plus ou moins sévères liées à leur radical sulfamide ; chez les sportifs, possible réaction positive des tests antidopage.
Contre-indications
Désordres hydroélectrolytiques
→ Les diurétiques de l’anse sont contre-indiqués en cas d’hypovolémie, de déshydratation, d’hypokaliémie ou d’hyponatrémie, ainsi qu’en cas d’allergie connue aux sulfamides et d’encéphalopathie hépatique.
→ Ils sont déconseillés chez la femme allaitante (risque de diminution de la sécrétion lactée et de troubles hydroélectrolytiques du nourrisson). De façon générale, les diurétiques sont, dans la mesure du possible, à éviter chez la femme enceinte (risque d’hypoperfusion placentaire et d’hypotrophie fœtale).
Interactions
Lithium déconseillé
→ L’association au lithium est déconseillée (risque de surdosage en lithium). Celle aux inhibiteurs de l’enzyme de conversion, aux antagonistes des récepteurs de l’angiotensine et aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) majore le risque d’insuffisance rénale aiguë (surveillance de la fonction rénale au début de l’association).
→ L’association à d’autres hypokaliémiants, à des médicaments susceptibles d’induire des torsades de pointe ou à la digoxine nécessite de surveiller la kaliémie et éventuellement l’électrocardiogramme.
→ L’association aux aminosides majore le risque d’ototoxicité.
Surveillance
Ionogramme
→ Clinique : surveillance du poids pour s’assurer de la régression des œdèmes, recherche de signes cliniques de déshydratation et d’hyponatrémie (signe du pli cutané, sécheresse cutanéomuqueuse, confusion).
→ Biologique : ionogramme sanguin et fonction rénale, surveillance renforcée de la glycémie chez le diabétique et de l’uricémie chez le patient goutteux.
Sources : « Les différents types de diurétiques », pharmacorama.com ; « Diurétiques de l’anse », pharmacomedicale.org ; « Les diurétiques », Collège universitaire des enseignants en néphrologie ; lecrat.fr ; Thésaurus des intéractions médicamenteuses, Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), octobre 2020 ; résumé des caractéristiques du produit (RCP).
Aller plus loin
Les classes de diurétiques
Il existe quatre grandes classes de diurétiques, se distinguant par leur effet sur la kaliémie et leur site d’action sur le tubule.
• Diurétiques hypokaliémiants
Outre les diurétiques de l’anse, ce sont :
– les inhibiteurs d’anhydrase carbonique (acétazolamide) agissant sur le tube proximal où ils diminuent la réabsorption du sodium et fortement celle des bicarbonates. Ils sont utilisés dans le traitement des alcaloses ou dans la crise aiguë de glaucome par fermeture de l’angle.
– les diurétiques thiazidiques et apparentés, hyponatrémiants, hypochlorémiants, hypokaliémiants, hypercalcémiants et constituants des antihypertenseurs de 1re intention chez les patients à fonction rénale conservée*.
• Diurétiques hyperkaliémiants
Appelés épargneurs potassiques, ils agissent au niveau du tube contourné distal et du tube collecteur, soit en intervenant sur les échanges Na+/K+ (amiloride, triamtérène), soit indirectement en exerçant une action antagoniste à l’aldostérone (canrénone, éplérénone, spironolactone). Leur effet natriurétique est faible. Ils sont surtout utilisés en association aux diurétiques hypokaliémiants pour équilibrer la kaliémie. Les antialdostérone sont spécialement indiqués dans l’insuffisance cardiaque.
* Voir Le Moniteur des pharmacies n° 3331/3332 du 29 août 2020.
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