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Tapis rouge quand bébé arrive

Publié le 26 avril 2021
Par Marianne Maugez et Anne-Gaëlle Harlaut
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Fidéliser les jeunes parents. Débordés, parfois angoissés, les nouveaux géniteurs sont à chouchouter. Comprendre leurs attentes et les accompagner, c’est s’assurer de leur délité à long terme.

Jauger la cible

Investir son énergie pour capter une clientèle de jeunes parents est-il vraiment pertinent ? Avant de foncer tête baissée, il paraît judicieux de scruter son environnement pour en évaluer le potentiel.

→ Qui sont mes patients ? Consulter les statistiques du logiciel de l’officine : âge moyen des clients, chiffre d’affaires moyen sur les gammes pédiatriques, nombre de locations de tire-lait par an…

→ Quelle marge de progression ? Quelle est la population de ma commune (sur www.insee.fr) ? Est-elle plutôt jeune ou vieillissante ? Qui sont mes rivaux, quels services offrent les officines voisines aux jeunes parents, comment est achalandé leur rayon « bébé » ? Les grandes et moyennes surfaces (GMS) aux alentours sont-elles très concurrentielles sur le secteur, et si oui, avec quelles gammes ?… Si vous avez peu d’enfants dans votre clientèle alors que votre quartier est jeune et dynamique, il est temps de revoir votre copie !

→ Quelle motivation dans l’équipe ? Investir un secteur est un projet d’équipe. Des âmes motivées seront nécessaires pour le porter. Réunissez-vous et demandez qui serait intéressé pour s’investir dans le développement d’un marché spécifique « jeunes – et moins jeunes ! – parents ».

Cerner les attentes

La naissance d’un enfant et les modes de vie actuels sont à prendre en compte pour accompagner les jeunes parents.

En quête d’informations

Beaucoup de parents se plaignent de se retrouver livrés à eux-mêmes à la sortie de la maternité. Malgré la multitude des canaux, presse, réseaux sociaux, « bons » conseils des belles-mères…, difficile de démêler des informations parfois contradictoires. Au final, ils se sentent mal-informés, désinformés, voire surinformés !

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Angoissés

Manque de sommeil, inquiétude, changement radical de mode de vie, les débordements émotionnels sont légion, avec une question sous-jacente : « Est-ce que je fais au mieux pour mon bébé? »

En quête de sécurité

L’arrivée d’un enfant modifie les habitudes de consommation. La sécurité et le respect de l’environnement deviennent des préoccupations majeures : 82 %(1) des futures et jeunes mamans déclarent être attentives au caractère naturel des produits. La parentalité est une porte d’entrée reconnue dans la naturalité.

Hyper-connectés

La nouvelle génération de parents a grandi avec Internet, Facebook et autres réseaux sociaux. Interroger les sources numériques est un réflexe.

Ubiquité

Finie depuis longtemps l’image de la femme au foyer ! La jeune maman d’aujourd’hui est « multiple ». Elle désire concilier sa famille avec son travail et ses loisirs, et s’occuper d’elle. Sans oublier les papas, qui prennent de plus en plus leur place dans la gestion des soins de l’enfant. Hors de question de les ignorer !

Du conseil avant tout

Dès la grossesse

La fidélisation du parent débute dès la grossesse, voire dès la prescription d’acide folique avant la conception. Donner des conseils, aider à préparer l’allaitement, prendre soin de la femme enceinte assurent une prise de contact durable.

Se former

→ Être au top. Que faire en cas de crevasse du mamelon, comment aider un bébé souffrant de reflux… ? Bannissez les réponses approximatives ! Pour capter la confiance des parents, soyez incollable.

→ Organiser des réunions en collaboration avec les laboratoires spécialisés dans l’univers de bébé.

→ Envisager pour l’équipe des formations spécifiques selon l’appétence de chacun sur la pédiatrie, l’allaitement. Exemples : « Accompagner l’allaitement à l’officine », sur trois jours, par le Centre de recherche, d’évaluation et de formation à l’allaitement maternel (Créfam), et « Conduite pratique de l’allaitement maternel, de la grossesse au sevrage », sur quatre jours, organisée par Allaitement maternel-formation (Am-F). Toutes deux sont éligibles à une prise en charge DPC.

Informer

→ Des écrits. Parce que la charge mentale des jeunes parents ne permet pas toujours d’enregistrer illico les conseils, un membre de l’équipe peut rédiger des fiches pour les cas les plus courants : utilisation d’un tire-lait, alimentation de bébé, soins d’hygiène… Pensez aux fiches du Cespharm, téléchargeables sur www.cespharm.fr, sur des thématiques « santé » : diarrhées du jeune enfant, vaccination, nutrition…

→ Le numérique. Un relais de l’information via le site Internet de la pharmacie ou les réseaux sociaux est le « plus » incontournable pour cette génération de parents ultraconnectés. Fiches en ligne, conseils de saison, annonces d’animations ponctuelles… maintiennent le lien.

Soigner l’accueil

Offrir du calme

Réserver un endroit qui favorise le dialogue et un espace confidentiel pour les demandes particulières comme l’observation de la mise au sein ou changer son bébé. Tout près, offrir un « coin enfants » avec jeux et petite table pour occuper le grand et laisser du temps à ses parents.

Écoute et pouvoir d’agir

→ Pas d’a priori. Quels que soient le niveau de connaissances, l’angoisse, le type de demandes ou de parents, acceptez que tous réagissent différemment à l’arrivée d’un enfant. Évitez les références personnelles du type « Quand ma fille était petite, je… » Faites preuve de bienveillance pour établir un bon contact : « Chaque enfant est unique. Je comprends que vous ayez cherché des réponses sur Internet. Peut-être que ce que vous avez lu n’est pas forcement approprié. Je vous propose de faire le point ensemble, vous êtes d’accord ? »

→ De l’empathie. Pour rassurer les parents, montrez que vous pouvez vous mettre à leur place : « Je comprends votre fatigue, c’est normal dans cette situation ». Évitez les jugements de valeur négatifs : « Vous n’auriez pas dû… », « Lire les forums de parents, c’est n’importe quoi… », etc.

→ De l’empowerment. Ce concept, qui signifie « renforcer ou acquérir du pouvoir », s’utilise dans ce contexte de parentalité dans le sens de « donner confiance dans ses capacités à décider et à s’autonomiser ». Il est particulièrement adapté dans le cas de parents inquiets. Il s’agira alors de leur faire percevoir qu’ils ont les clés pour donner les meilleurs soins à leur enfant (voir Avis de spé).

→ Papa et maman aussi. Pensez également aux parents, qui se sentiront pris en considération : « Et vous, ça va ? », « Vous prenez soin de vous en ce moment ? »

Un rayon qui suit

L’espace « bébé »

Regrouper dans un même espace les produits pour enfants et ceux de la périnatalité : crèmes anti-vergetures, tests de grossesse… Si possible, éloignés de la zone d’attente pour favoriser le dialogue.

Les gammes

Référencer les gammes proposées dans les « boîtes roses/bleues » de la maternité, souvent demandées par les parents. Proposez les gammes « bébé » incontournables en pharmacie (Mustela…) et référencez-en une ou deux plus confidentielles pour se démarquer, ainsi qu’une gamme bio pour les cosmétiques et la nutrition.

Gare aux prix

Même si l’arrivée d’un bébé coïncide souvent avec une frénésie d’achats dans les couples, les parents comparent de plus en plus les prix, a fortiori sur Internet. Sans chercher à être au moins cher, s’aligner sur les tarifs moyens du marché. Si la marge peut pâtir d’une politique de prix serrée, c’est un investissement à long terme lorsque les parents se fidélisent à une marque pour toute la famille.

(1) Institut d’études La Boîte rose.

Naissances en France en 2020

• 740 000 bébés, soit près de 2 030 par jour.

• 1,84 enfant par femme est le taux de fécondité, en léger recul depuis 2015 mais le plus élevé d’Europe.

• 30,8 ans est l’âge moyen de la mère à l’accouchement.

Source : Insee.

Avis de spé

Donner aux parents une image positive de leurs compétences”

Isabelle Paoli, infirmière puéricultrice, stagiaire en master 2 « Promotion de la santé » à l’Institut de la parentalité, à Bordeaux-Floirac (33).

Avec de jeunes parents, il faut faire preuve d’humilité et accepter l’accueil de l’autre et de son inquiétude. Avant de venir en pharmacie, ils ont souvent fait des recherches sur Internet, demandé l’avis de proches ou d’autres professionnels. Face à la discordance des discours, ils se sentent perdus et ont besoin de l’exprimer. L’écoute est essentielle. Lorsqu’ils avouent leur peur de « ne pas savoir », il faut leur faire prendre conscience que ce sont eux qui connaissent le mieux leur bébé puisque, au-delà de la théorie, ce sont eux qui partagent son quotidien. En retour, il est également important de leur donner les clés pour qu’ils trouvent eux-mêmes certaines réponses. Cela leur permet d’avoir une image positive de leurs compétences en tant que parents et les soulage d’un stress pesant.