Le dépistage et la prévention du mélanome

Publié le 1 mai 2024
Par Nathalie Belin
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L’augmentation du nombre de cas de mélanomes depuis 30 ans i est directement lié à l’exposition croissante de la population aux ultraviolets. Retour sur les points clés pour convaincre et changer les comportements !

De quoi parle-t-on ?

• Il existe 2 types de cancer de la peau : les carcinomes, les plus fréquents, majoritairement d’évolution lente et de bon pronostic, et les mélanomes, représentant 10 % des cancers cutanés. Les mélanomes sont les cancers dont la fréquence a le plus augmenté, avec un nombre de cas multiplié par 5 en moins de 30 ans, soit 15 500 nouveaux cas chaque année(1).

• Les mélanomes sont des tumeurs malignes qui se développent à partir des mélanocytes, cellules fabriquant la mélanine responsable de la pigmentation de la peau. Leur gravité est liée à leur haut potentiel métastatique, ce qui en fait des cancers de pronostic sombre lorsqu’ils sont pris en charge à un stade avancé.

Comment se développe un mélanome ?

• Dans plus de 90 % des cas, un mélanome se situe sur la peau. Rarement, il se développe au niveau d’autres parties du corps où des mélanocytes sont également présents : yeux, bouche, nez, organes génitaux, sous les ongles.

• Dans 80 % des cas, il se forme de novo, c’est-à-dire à partir d’une zone de peau dépourvue de taches ou de lésions. Dans 20 % des cas, il se forme à partir d’un grain de beauté, ou naevus, déjà existant : ce dernier peut changer de taille, de couleur, ou ses bords peuvent devenir irréguliers.

• Typiquement, la tumeur se développe en 2 phases : une phase d’extension en surface, dite « horizontale » épidermique, puis une phase de croissance verticale invasive, vers le derme voire l’hypoderme exposant au risque de métastases. Certains mélanomes ont toutefois d’emblée une phase de croissance verticale.

Quels sont les facteurs de risque ?

L’interaction entre le type de peau, ou phototype, et l’exposition au soleil est le facteur le plus prédominant dans la survenue de ce cancer.

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• Exposition aux UV, solaires ou artificiels. Les UVA et UVB sont tous deux classés cancérogènes. Ils peuvent être à l’origine de mélanomes et carcinomes et plusieurs études sont en faveur d’une association positive entre l’exposition aux radiations solaires et le risque de cancer de la lèvre, de conjonctive et de mélanome de l’œil. Il est également établi une relation causale entre UV artificiels et mélanomes cutanés et oculaires.

Le risque lié aux UV est cumulatif : c’est la dose totale reçue qui détermine le potentiel cancérogène global. Ainsi, ce sont essentiellement les coups de soleil reçus dans l’enfance qui déterminent le risque d’apparition d’un mélanome à l’âge adulte : l’exposition intermittente et aiguë aux UV (activités de plein air en climat ensoleillé, bains de soleil…) étant plus à risque qu’une exposition chronique(2). Les personnes exposées chroniquement aux UV (travaillant en extérieur, par exemple) sont également à risque.

Phototype. Certaines personnes, du fait d’un phototype particulier – peau claire, d’autant plus si elle bronze peu ou pas du tout (phototype I à II en particulier) – sont plus sensibles aux effets des UV et sont particulièrement à risque de mélanome.

• Facteurs génétiques. Environ 7 % des mélanomes surviennent dans un contexte familial : les personnes ayant au moins un apparenté du 1er degré atteint d’un mélanome ont un risque relatif 2 à 3 fois plus élevé de développer un mélanome que la population générale(3). Plusieurs gènes de susceptibilité ont été identifiés. La présence de 2 mélanomes chez 2 apparentés au 1er ou 2e degré motive une consultation d’oncogénétique. Un antécédent personnel de mélanome expose également à un risque de second mélanome.

• Autres. Une immunodépression augmente le risque de cancer cutané. Certaines professions sont exposées à un risque de mélanome oculaire et/ou cutané (soudeurs, personnes exposées à l’arsenic, à des hydrocarbures aromatiques polycycliques…).

Comment évaluer le niveau de risque ?

Un questionnaire en 7 points évalue le degré de risque de cancer de la peau. Si le patient répond « oui » à l’une d’elles, il est considéré comme à risque : a-t-il des antécédents personnels ou familiaux de cancer cutané ? Bronze-t-il difficilement ou est-il sujet aux coups de soleil ? Au cours de l’enfance ou de l’adolescence, a-t-il eu des coups de soleil avec brûlure du 2e degré (cloques) ? A-t-il beaucoup de naevi (≥ 40) ou des naevi de grande taille (> 5 mm) et irréguliers ? Est-il régulièrement exposé aux UV artificiels (cabine de bronzage, soudure à l’arc) ? Est-il immunodéprimé ?

Quels signes doivent alerter ?

Trois éléments permettent de différencier un naevus d’un mélanome.

– Le principe du « vilain petit canard » : le grain de beauté qui n’est pas comme les autres doit attirer l’attention.

– Toute modification de l’aspect de la peau : apparition d’une tache brune, modification d’un grain de beauté, plaie qui ne cicatrise pas, bouton ou croûte persistant et qui s’étend doivent alerter.

– La règle ABCDE : A comme « asymétrie », B comme « bords irréguliers », C comme couleur non homogène, D comme « diamètre », E comme « évolution » (voir encadré p. 34).

Quelle surveillance mettre en place ?

L’autoexamen régulier de la peau permet de repérer une lésion suspecte (voir ci-dessus) et doit dans ce cas amener à consulter au plus vite. Pour les personnes à risque, l’autodépistage est recommandé tous les 4 mois et doit être associé à une surveillance dermatologique annuelle.

• En pratique. L’autodépistage peut se faire avec l’aide d’un proche et/ou en s’aidant d’un miroir pour les zones difficiles à atteindre : cou, oreille, dos, nuque, cuir chevelu, plante des pieds, fesse et face postérieure des cuisses.

Quels sont les moyens de prévention ?

Réduire la pénétration des UV sur la peau est la meilleure des protections contre le mélanome.

• Photoprotection. Elle combine plusieurs mesures. Comportementale : c’est la meilleure des protections ! Rechercher l’ombre en évitant de s’exposer entre 12 et 16 heures en métropole ou, sinon, recourir à des vêtements couvrants (T-shirt manches longues, chapeau à large bord et lunettes de soleil catégorie 3 ou 4). Des vêtements anti-UV sont notamment utiles sur l’eau et chez les enfants. Produits solaires : aucun indice de protection ne protège à 100 % des UV Le produit doit être choisi selon son type de peau et l’intensité du rayonnement UV (SPF 50+ pour les peaux claires) et non en vue de pouvoir s’exposer plus longtemps ! Il doit être réappliqué (2 cuillères à café pour la tête, les bras et le cou d’un adulte et 2 cuillères à soupe pour le reste du corps), quel que soit l’indice de protection, toutes les 2 heures environ et après chaque baignade ou transpiration excessive, même si le produit est waterproof.

Vigilance chez l’enfant. Jusqu’à la puberté, la peau est fine et le système pigmentaire immature, ce qui rend la peau vulnérable aux effets cancérogènes des UV Avant 3 ans, rechercher l’ombre et éviter les heures où le rayonnement solaire est le plus intense.

(1) Rayonnements ultraviolets et risques de cancer. Fiches repères. Institut national du cancer (INCa), octobre 2021.

(2) Panorama des cancers 2023, INCa.

(3) Recommandations pour le diagnostic de prédisposition génétique au mélanome cutané et pour la prise en charge des personnes à risque, Ann. Dermatol. Venereol, 2015.

lnfo+

→ Cancers cutanés : les carcinomes et mélanomes sont les cancers les plus fréquents dans la population avec plus de 100 000 nouveaux cas par an.

→ Forme la plus agressive : le mélanome.

→ Âge médian au diagnostic : 68 ans chez les hommes, 62 ans chez les femmes.

→ Étiologie : près de 83,5 % seraient dus à l’exposition solaire. Les cabines UV seraient responsables de 380 cas chaque année.

→ Taux de survie relative à 5 ans : 98 % au stade localisé, 15 % au stade métastatique.

Signes d’alerte d’un mélanome : la règle ABCDE