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La pharmacie du Loir ne veut pas se mettre en sommeil
Cela fait maintenant trois ans que Jean-Jacques Courtin, titulaire de la pharmacie du Loir à Bazouges-Cré-sur-Loir (Sarthe), essaie de vendre son officine. En vain.
En trois ans, je n’ai eu qu’une seule visite, et ça n’a rien donné. » Titulaire depuis 2008 de la pharmacie du Loir à Bazouges-Cré-sur-Loir, dans la Sarthe, Jean-Jacques Courtin ne masque pas son découragement. « J’ai confié, en 2021, la vente de mon officine à trois cabinets de transaction qui l’avaient estimée entre 400 000 et 420 000 €, raconte-t-il. Mais l’un d’eux m’avait prévenu : “Si vous trouvez à 300 000 €, vendez !” » Le pharmacien n’a même pas eu l’opportunité de suivre ce conseil. « Aujourd’hui, les jeunes ne veulent plus s’installer en zone rurale. Y compris dans les endroits où nous n’avons pas les pieds dans la boue. La commune compte près de 2 300 habitants et elle est située à 5 minutes de Durtal (3 300 habitants) et La Flèche, une ville de 15 000 habitants. L’officine est aussi entourée d’une école publique et d’une école privée, et est installée sur un axe où passent chaque jour près de 9 000 voitures », argumente-t-il. Si le village a perdu son dernier médecin généraliste il y a quelques années, le centre médical de La Flèche envoie un généraliste faire des vacations le lundi, le jeudi et le vendredi dans un local qui jouxte la pharmacie. « Le flux d’ordonnances est régulier puisque nous réalisons 88 % du chiffre d’affaires sur la TVA à 2,1 %, assure le futur retraité. Avec la rentabilité dégagée, je peux payer le salaire d’une pharmacienne adjointe, qui travaille trois jours par semaine, celui de mon épouse, qui s’occupe du back-office et participe aussi un peu à la vente, tout en me versant une rémunération confortable », ajoute-t-il.
Un potentiel à exploiter
Pour Jean-Jacques Courtin, le titulaire qui prendra la suite disposera d’un outil de travail ne demandant qu’à se développer. « En 2017, j’ai déménagé dans un local de 160 m² situé sur la place de la mairie, précise-t-il. La surface de vente fait 65 m2. Tous les clients la trouvent agréable, aérée et lumineuse. Une petite chambre, avec une salle de bains, a également été aménagée pour les gardes de nuit. » La pharmacie dispose aussi d’un bureau que Jean-Jacques Courtin utilise pour recevoir les représentants ou tenir des entretiens discrets. « Dans cet espace de confidentialité, le prochain titulaire pourra développer les nouvelles missions comme la vaccination ou les tests. Il y a aussi du potentiel pour faire évoluer la parapharmacie et la livraison à domicile », souligne-t-il.
Au fil des mois, Jean-Jacques Courtin est passé par tous les états : « Colère, incompréhension… Maintenant, je ressens de la lassitude. Cette officine, je l’ai achetée et je l’ai fait prospérer. Il m’est difficile d’accepter d’avoir passé une partie de ma vie à essayer de me constituer un capital qui ne vaut plus rien aujourd’hui », confie-t-il. Sa pharmacie est toujours à vendre dans les trois cabinets de transaction, « mais les appels se font rares, regrette-t-il. J’ai même essayé de trouver un repreneur en prospectant dans d’autres pays d’Europe, sans succès ». Le pharmacien se dit prêt à discuter du prix pour prendre une retraite bien méritée à 73 ans, « mais encore faudrait-il trouver quelqu’un avec qui négocier ».
Il rendra son tablier à la rentrée
Au-delà de son cas personnel, Jean-Jacques Courtin s’inquiète aussi pour sa patientèle. « Que vont devenir les personnes âgées qui ne pourront pas se déplacer à Durtal ou à La Flèche pour aller chercher leurs médicaments ?, s’interroge-t-il. Je ne suis pourtant pas le seul dans cette situation. Or, tout se passe dans la plus grande indifférence des pouvoirs publics, de l’Ordre des pharmaciens et des syndicats. Si l’on ne fait rien, c’est le maillage territorial des pharmacies qui sera menacé », ajoute-t-il. Le Bazougeois a en tout cas tranché : « A la prochaine rentrée scolaire, je rendrai ma licence et le village perdra définitivement sa pharmacie. »
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