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L’épilepsie de lenfant
Première pathologie neurologique de l’enfant, l’épilepsie est à également à l’origine d’atteintes cognitives, psychologiques et sociales. De diagnostic difficile, elle peut avoir un impact important sur la qualité de vie et nécessite une prise en charge multidisciplinaire.
Pathologie/L’épilepsie de l’enfant en 6 questions
1 De quoi parle-t-on ?
Les épilepsies constituent un groupe hétérogène de maladies neurologiques définies par la survenue d’au moins 2 crises spontanées (non provoquées) séparées d’au moins 24 heures, d’une crise spontanée mais dont l’étiologie permet de prédire un risque élevé de récurrence, ou encore de crises dont le bilan permet de diagnostiquer un syndrome épileptique.
Une crise résulte d’une hyperexcitation neuronale simultanée provoquant une décharge électrique soudaine et de forte intensité qui modifie transitoirement le fonctionnement du cerveau.
En fonction des caractéristiques du début de la crise, on en distingue 3 types :
– la crise focale lorsque l’excès d’influx nerveux se situe dans une zone cérébrale localisée nommée « foyer épileptogène ». Dans certains cas, il peut se propager de façon bilatérale aux zones adjacentes et entraîner une généralisation de la crise : on parle de crise focale devenant bilatérale (terme remplaçant celui de crise secondairement généralisée).
– la crise généralisée au cours de laquelle l’activité neuronale anormale concerne une grande partie voire l’ensemble du cerveau.
– la crise de début inconnu, quand il est impossible d’identifier le point de départ de la crise.
2 Quels sont les signes cliniques ?
Les symptômes dépendent des zones cérébrales touchées.
Crises focales
Anciennement appelées partielles, elles se traduisent par des manifestations localisées et unilatérales, des fourmillements, des paresthésies, des hallucinations auditives ou visuelles, des troubles végétatifs (hypersalivation, apnée, tachycardie) et émotionnels.
De fréquence variable, elles sont dites simples en l’absence d’altération de la conscience et complexes dans le cas inverse.
Crises généralisées
Elles durent quelques secondes à quelques minutes. Elles sont caractérisées par une altération de durée variable de la conscience (appelée absence) et/ou des troubles moteurs bilatéraux et symétriques.
Il en existe plusieurs formes : avec des contractions musculaires importantes sur 1 à 2 minutes (forme tonique), avec des spasmes musculaires cadencés d’environ 20 secondes (forme clonique), avec une alternance de contractions et de spasmes musculaires cadencés d’une durée maximale de 10 minutes (forme tonicoclonique), sans tonus musculaire pendant 10 à 20 secondes avec chute (forme atonique), avec des spasmes musculaires inférieurs à 200 millisecondes (forme myoclonique).
3 Quels sont les étiologies et facteurs de risque ?
Dans la moitié des cas, l’origine de l’épilepsie est inconnue. Dans l’autre moitié, certains facteurs de risque peuvent être identifiés :
– génétiques : un tiers des épilepsies sont liées à une anomalie génétique. Les formes monogéniques héréditaires sont plus fréquentes chez l’enfant que chez l’adulte. Dans la plupart des cas, une origine polygénique est identifiée. Lorsqu’un caractère génétique est supposé et en l’absence d’autres facteurs identifiables, l’épilepsie est qualifiée d’idiopathique ;
– métaboliques : hypo et hyperglycémie, hyponatrémie, hypocalcémie ou encore phénylcétonurie ;
– environnementaux : intoxication à certains produits (monoxyde de carbone, métaux lourds, solvants organiques, etc.), infection (méningite encéphalite, abcès cérébral, virus de l’immunodéficience humaine, etc.) ;
– iatrogènes et toxiques : certains médicaments (β-lactamines, quinolones, isoniazide, aciclovir, antihistaminiques, neuroleptiques, ciclosporine, vinca-alcaloïdes, théophylline en surdosage, etc.) et drogues récréatives peuvent déclencher une crise d’épilepsie ;
– inflammatoires ou immuns : les autoanticorps de certaines maladies auto-immunes systémiques (comme l’encéphalite auto-immune) provoquent parfois une épilepsie ;
– lésionnels : des lésions cérébrales (malformation congénitale, traumatisme crânien, tumeurs, séquelles d’une souffrance à la naissance, etc.) peuvent être à l’origine d’une épilepsie.
4 Quelles sont les différentes formes chez l’enfant ?
Formes les plus courantes
Epilepsies focales
Quel que soit l’âge, l’épilepsie avec crises focales est la forme la plus courante (50 à 60 % des cas). Le diagnostic peut s’avérer très difficile, notamment chez le nourrisson. Elle peut être associée à un trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH).
L’épilepsie à pointe centro-temporale (15 à 25 % des cas) est le syndrome épileptique le plus répandu. Elle débute chez les enfants entre 3 et 12 ans. Les crises sont peu fréquentes. Elles durent 2 à 3 minutes avec une survenue en début ou à la fin d’un cycle de sommeil. Elles touchent la sphère oropharyngée (paresthésie de la langue, des lèvres, hypersialorrhée et dysarthrie) et peuvent se généraliser. L’électroencéphalogramme (EEG) est caractérisé par des pointes de haut voltage suivies d’ondes lentes favorisées par l’endormissement. Bénigne, cette épilepsie évolue spontanément vers la guérison avant l’adolescence.
Epilepsies généralisées
L’épilepsie absence de l’enfant (5 à 10 % des cas) se déclenche entre 4 et 10 ans. Ce syndrome épileptique se manifeste quotidiennement par de multiples absences de 3 à 20 secondes accompagnées de légères atteintes motrices. Ces crises apparaissent soudainement à n’importe quel moment de la journée. L’épilepsie absence de l’adolescent (2 % des cas) se produit quant à elle vers 10-12 ans. A la différence de l’épilepsie de l’enfant, des crises tonicocloniques généralisées sont parfois observées en plus des absences quotidiennes.
L’épilepsie myoclonique juvénile (5 à 10 % des cas) touche les enfants vers 14 ans. Ce syndrome épileptique se traduit par des absences, des crises tonicocloniques généralisées et des crises myocloniques des membres supérieurs au réveil.
Formes plus rares
Les syndromes de Lennox-Gastaut (absences, crises toniques et atoniques, et plus rarement myocloniques), de West (spasmes et troubles du développement psychomoteur) et de Dravet (épilepsie myoclonique sévère), sont des encéphalopathies épileptiques rares. En l’absence de traitement, elles provoquent une dégradation cognitive et intellectuelle sévère.
5 Comment le diagnostic est-il posé ?
6 Quelles sont les complications et quelle est l’évolution ?
Physiopathologie et pharmacodynamie
Une crise d’épilepsie résulte d’une hyperexcitabilité neuronale liée à une dépolarisation excessive et/ou à un déséquilibre entre les transmissions inhibitrices GABAergiques et excitatrices glutamatergiques. Il existe de nombreux antiépileptiques aux mécanismes d’action variés et complexes. Ils visent à réguler l’activité électrique de certaines zones du cerveau.
Physiopathologie
Les neurones sont des cellules nerveuses qui ont pour rôle de recevoir, conduire, transmettre et traiter l’ensemble des informations qui entrent et sortent du cerveau sous forme de potentiels d’actions.
Le potentiel d’action se propage de façon unidirectionnelle le long des axones des neurones vers la zone synaptique. Il est activé par la dépolarisation induite par l’ouverture des canaux calciques et sodiques dépendants du voltage. Inversement, les flux de chlore entraînent une hyperpolarisation rendant le neurone moins excitable.
La crise épileptique est due à une dépolarisation massive paroxystique synchrone qui entraîne la formation de plusieurs potentiels d’actions au sein d’un réseau de neurones.
L’hyperexcitabilité neuronale à l’origine de la crise épileptique peut survenir en cas de dysfonctionnements génétiques ou acquis des canaux ioniques dépendants du voltage, de connexions synaptiques aberrantes et/ou d’un déséquilibre entre les transmissions excitatrices glutamatergiques et inhibitrices GABAergiques.
En effet, l’acide γ-aminobutyrique (GABA) est un neurotransmetteur qui inhibe la transmission de l’influx nerveux par action sur des récepteurs couplés à des canaux chlorure, tandis que le glutamate l’augmente en agissant sur des récepteurs α-amino-3-hydroxy-5-methyl-4-isoxazolepropionic acid (AMPA) couplés à un canal sodique. Un déficit en GABA ou un excès en glutamate explique la survenue d’une crise d’épilepsie.
Mécanisme d’action des différents antiépileptiques recommandés chez l’enfant
Les antiépileptiques sont nombreux et leurs mécanismes d’action sont variés, complexes et souvent incomplètement élucidés. Ils visent à diminuer l’excitabilité neuronale, en inhibant les transmissions excitatrices glutamatergiques, en stimulant les transmissions inhibitrices GABAergiques ou en bloquant les canaux dépendants du voltage.
L’action des antiépileptiques peut s’exercer au niveau des synapses glutamatergiques par effet :
– antagoniste direct au niveau des récepteurs AMPA (pérampanel) ou d’autres récepteurs glutamatergiques postsynaptiques appelés récepteurs N-méthyl-D-aspartate (NMDA) comme le valproate et le topiramate ;
– antagoniste indirect au niveau présynaptique par perturbation de l’exocytose du glutamate (lévétiracétam, brivaracétam) ou inhibition des canaux calciques présynaptiques (gabapentine).
Leur action peut aussi s’exercer au niveau des synapses GABAergiques par effet :
– agoniste direct potentialisant les effets du GABA et favorisant l’ouverture d’un canal chlore au niveau post-synaptique (benzodiazépines, phénobarbital, topiramate, stiripentol) ;
– agoniste indirect, en inhibant la dégradation physiologique de GABA par la GABA-transaminase (vigabatrine).
Les antiépileptiques peuvent également exercer un effet dit « stabilisateur de membrane » en inhibant les canaux sodiques dépendants du voltage (valproate, carbamazépine, oxcarbazépine, lamotrigine, lacosamide, phénytoïne). Quant à l’éthosuximide, il inhibe les canaux calciques post-synaptiques.
L’hétérogénéité des épilepsies explique pourquoi trouver le bon traitement s’avère souvent complexe. Tous les antiépileptiques ne sont pas efficaces dans toutes les formes de la maladie.Certaines molécules peuvent même aggraver certaines formes d’épilepsie.
Thérapeutique/Comment traiter les épilepsies de l’enfant et de l’adolescent ?
La prise en charge repose sur 2 axes. Tout d’abord, il s’agit de prévenir la survenue d’une nouvelle crise avec la mise en place d’un traitement ad hoc et d’un projet d’accueil individualisé. Puis, parallèlement à la recherche de la cause, de discuter d’un traitement de fond pour éviter les récidives.
Stratégie thérapeutique
Objectifs de la prise en charge
L’objectif est d’améliorer la qualité de vie de l’enfant et de limiter les conséquences de l’épilepsie sur sa scolarité. La prise en charge globale et multidisciplinaire implique la recherche et le traitement (si possible) de la cause de l’épilepsie, la prévention ou correction des facteurs favorisants, mais aussi d’éventuelles complications et comorbidités (dépression, trouble déficitaire de l’attention, troubles des apprentissages, troubles du sommeil). Elle nécessite l’éducation thérapeutique des parents et de l’enfant (selon son âge), la mise en œuvre de mesures non médicamenteuses (voir partie Accompagner le patient), et si nécessaire, un soutien psychologique.
Le traitement médicamenteux vise l’absence de crise ou à défaut une diminution de la fréquence et de l’intensité des crises, associée à la meilleure tolérance possible aux médicaments.
Traitement de fond
Initiation
L’initiation d’un traitement doit se faire sur recommandations d’un neurologue, d’un neuropédiatre ou d’un médecin formé à l’épileptologie.
Lorsqu’un traitement est nécessaire, il est proposé après la deuxième crise d’épilepsie si les symptômes sont invalidants et présentent un risque pour le patient (perte de conscience, chute, etc.). Il peut dans certains cas être initié dès la première crise, selon l’étiologie de celle-ci (tumeur par exemple), ses manifestations, ses séquelles ou selon les anomalies à l’électroencéphalogramme (EEG) ou à l’imagerie.
La marge thérapeutique étroite des antiépileptiques et leur effet dose-dépendant imposent une titration (augmentation progressive des doses pour arriver à la dose optimale et efficace avec la meilleure tolérance). Celle-ci peut être plus ou moins longue selon les molécules (plusieurs mois pour la lamotrigine et le topiramate).
Principe du traitement de fond
Une monothérapie est toujours utilisée en première ligne. Si elle est inefficace ou mal tolérée, elle est remplacée par une autre monothérapie. Les antiépileptiques les plus utilisés en monothérapie sont la carbamazépine, la lamotrigine, le lévétiracétam et le valproate.
L’échec du contrôle complet des crises par deux monothérapies successives conduit à une bithérapie. Si la bithérapie n’est pas efficace ou mal tolérée, le patient doit être adressé à un centre expert (lieu de référence avec une équipe spécialisée en épileptologie).
Choix du traitement
De nombreux facteurs influent le choix du traitement : le syndrome épileptique, le type de crise, l’âge du patient, son sexe (du fait des effets tératogènes et fœtotoxiques de certaines molécules), ses comorbidités, l’autorisation de mise sur le marché (AMM) des molécules, leurs effets indésirables, la fréquence de prise, l’avis du patient et de ses parents.
Les données d’efficacité chez l’adulte sont souvent extrapolées à la population pédiatrique en raison des difficultés éthiques et méthodologiques des études chez l’enfant. Cette méthode peut ne pas être applicable aux présentations spécifiques de la petite enfance telles que le syndrome de West. Ainsi, dans certaines épilepsies graves, en l’absence de galénique adaptée et d’études pédiatriques, la prescription d’un antiépileptique se fait souvent hors AMM.
Epilepsie à pointes centrotemporales et apparentées. Aucun traitement de fond n’est recommandé d’emblée pour cette épilepsie car elle est généralement d’expression transitoire et d’évolution bénigne. Si les crises sont fréquentes ou longues, un avis spécialisé est nécessaire. La carbamazépine est à éviter car elle peut aggraver les crises.
Crises focales. Selon la Haute Autorité de santé (HAS), les méta-analyses et les AMM ne permettent pas de promouvoir, à l’heure actuelle, certaines molécules en particulier par rapport à d’autres. Elles seront choisies en fonction de l’âge, du sexe de l’enfant et des effets indésirables potentiels.
Epilepsie myoclonique juvénile. D’après la HAS, les molécules recommandées en première intention sont la lamotrigine, le lévétiracétam ou chez le garçon, le valproate. En cas d’échec, une autre molécule de première intention est essayée. L’échec des monothérapies conduit à une bithérapie qui associe deux molécules ayant prouvé leur efficacité dans les crises généralisées, comme notamment le lévétiracétam, la lamotrigine, le valproate, le pérampanel et le topiramate. Les myoclonies sont aggravées par la carbamazépine, l’oxcarbazépine, la vigabatrine.
Epilepsies d’absences de l’enfant. Une monothérapie par éthosuximide est recommandée en première intention par la HAS, puis en cas d’échec, par lamotrigine. L’utilisation du valproate doit tenir compte des limitations dues à son potentiel tératogène chez la fille et le garçon. En cas d’insuffisance d’efficacité, on fait appel à une bithérapie combinant l’éthosuximide, le valproate ou la lamotrigine. Les traitements aggravant les crises d’absences sont la phénytoïne, la carbamazépine, l’oxcarbazépine, la gabapentine, la prégabaline (qui en outre, n’a pas d’AMM en pédiatrie) et la vigabatrine.
Epilepsies d’absences de l’adolescent. Les molécules recommandées en première intention par la HAS sont la lamotrigine ou chez le garçon, le valproate. L’échec d’une monothérapie conduit à essayer une autre molécule de première intention. Une monothérapie par éthosuximide n’est en revanche pas indiquée car il est inefficace sur les crises tonicocloniques généralisées. Par la suite, si la deuxième monothérapie ne permet pas de contrôler les crises convulsives généralisées tonicocloniques associées aux absences, on aura recours à une bithérapie associant valproate, lamotrigine ou lévétiracétam. Si la deuxième monothérapie ne permet pas de contrôler les absences, mais contrôle les crises convulsives généralisées tonicocloniques, alors le traitement est maintenu et renforcé par l’éthosuximide.
Syndromes rares mais graves. Les syndromes de Lennox-Gastaut, West et Dravet doivent être pris en charge par un centre expert où l’on peut avoir recours à des antiépileptiques de dernière intention et/ou d’indications limitées. Le felbamate (Taloxa, réservé à l’usage hospitalier), le rufinamide (Inovelon), le cannabidiol (Epidyolex, à prescription initiale hospitalière annuelle) peuvent être proposés, en association avec d’autres antiépileptiques dans le cas d’un syndrome de Lennox-Gastaut non contrôlé. La vigabatrine (Sabril, Kigabeq) est utilisée dans le syndrome de West, le stiripentol (Diacomit, à prescription initiale hospitalière semestrielle) et le cannabidiol dans le syndrome de Dravet, en association avec du clobazam (Urbanyl, Likozam, dont la prescription hospitalière est limitée à 12 semaines).
Arrêt du traitement
Après une période raisonnable sans crise et en fonction du syndrome épileptique, la poursuite du traitement est discutée avec les parents et l’enfant, tout comme son arrêt progressif. Il n’y a pas de consensus sur la période de stabilité nécessaire avant l’arrêt. Les résultats de plusieurs études amènent les praticiens à envisager une décroissance après une période sans crise variant de 2 à 5 ans.
Traitement des crises généralisées
En cas de crise tonicoclonique généralisée supérieure à 5 minutes, une benzodiazépine d’action rapide est administrée. On utilise le midazolam en solution buccale (Buccolam) aux doses recommandées de 2,5 mg pour les enfants âgés de 3 mois à 1 an, 5 mg de 1 à 5 ans, 7,5 mg de 5 à 10 ans et 10 mg à partir de 10 ans. Chez les nourrissons de 3 à 6 mois, il doit être administré en milieu hospitalier. C’est un assimilé stupéfiant à prescription initiale annuelle réservée aux spécialistes en neurologie ou en pédiatrie. La solution de diazépam (Valium) administrée par voie rectale à 0,5 mg/kg est moins utilisée de nos jours car d’usage plus complexe.
Si cette première dose de benzodiazépine s’avère inefficace, il faut appeler le service médical d’urgence (en composant le 15). Une deuxième dose de benzodiazépine peut être administrée. En cas d’échec, on a recours en urgence à l’administration intraveineuse de benzodiazépine, puis de valproate ou de phénytoïne, léviracétam, phénobarbital.
Un projet d’accueil individualisé (PAI), précisant le protocole d’urgence, doit être établi par le médecin à destination de la famille et des lieux d’accueil de l’enfant en accord avec le médecin scolaire, en vue de permettre l’administration du traitement de crise.
Profils particuliers
Filles en âge de procréer
Un grand nombre d’antiépileptiques sont tératogènes ou associés à des troubles neurodéveloppementaux des enfants exposés in utero. Ainsi, dès l’instauration d’un traitement antiépileptique chez une fille en âge de procréer, il est indispensable de l’informer (ainsi que son représentant légal) des risques encourus en cas de grossesse et de la nécessité d’une contraception efficace. De même, les prescripteurs (et les pharmaciens) doivent s’assurer que les parents d’une jeune fille déjà sous traitement ont compris l’importance de contacter le neurologue dès ses premières menstruations, en vue d’une réévaluation du traitement.
Les risques les plus élevés sont observés avec le valproate et le topiramate, qui sont soumis à des règles de prescription et de délivrance particulières. Le valproate expose à un risque important (11 %) de malformations (anomalies cardiaques et de fermeture du tube neural, fente labiale, dysmorphie faciale, etc.), ou de troubles du développement estimés à 30-40 % (retard d’acquisition de la marche et du langage, troubles autistiques). Il ne doit pas être utilisé chez les filles et les femmes en âge de procréer, sauf en cas d’inefficacité ou d’intolérance aux autres traitements. Le topiramate expose à un risque de malformations majeures multiplié par 3 par rapport à la population générale, mais aussi de troubles du spectre autistique et de déficience intellectuelle.
Les molécules recommandées en première intention chez une jeune fille après la puberté dans l’épilepsie focale sont la lamotrigine, le lévétiracétam et l’oxcarbazépine. L’utilisation de la carbamazépine doit tenir compte d’un risque malformatif multiplié par 2 ou 3. Dans l’épilepsie généralisée, la lamotrigine est à privilégier, ou le lévétiracétam (hors AMM).
Garçons après la puberté
En raison d’un risque potentiel de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants dont le père a été traité par valproate dans les trois mois qui précèdent la conception, une contraception est recommandée ainsi que la poursuite de celle-ci au moins trois mois après l’arrêt du traitement, d’après l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM, octobre 2023).
Les traitements
Les antiépileptiques
Effets indésirables
Les effets indésirables des antiépileptiques sont variés et parfois sévères.
– Troubles neuropsychiatriques : fatigue, troubles de la vigilance, de la mémoire ou de la concentration, céphalées, tremblements, par exemple avec l’oxcarbazépine, la lamotrigine, la gabapentine, le lacosamide, la vigabatrine, le brivacétam ; troubles de l’humeur et du comportement (brivacétam, lévétiracétam, pérampanel, topiramate, éthosuximide, cannabidiol en particulier).
– Réactions cutanées : urticaire (éthosuximide), syndrome de Stevens-Johnson ou Lyell ou syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse (DRESS) avec éosinophilie et symptômes systémiques, notamment avec la carbamazépine, l’oxcarbazépine (risque d’allergie croisée avec la carbamazépine d’environ 20 %), le felbamate, le lévétiracétam, le pérampanel, la lamotrigine (importance de sa titration progressive et d’informer la famille du patient du risque cutané afin d’interrompre rapidement le traitement en cas de signes).
– Troubles digestifs : nausées, vomissements, diarrhées, perte de poids liés à une diminution d’appétit (felbamate, topiramate, stiripentol, lévétiracétam, éthosuximide, cannabidiol) ou, à l’inverse, prise de poids liée à une stimulation d’appétit (vigabatrine, valproate, carbamazépine, gabapentine), augmentation des transaminases (valproate, cannabidiol) et atteintes hépatiques potentiellement létales (felbamate).
– Atteintes hématologiques : risque d’aplasie médullaire potentiellement létale sous felbamate, de leucopénie sous carbamazépine, brivacétam et éthosuximide, thrombopénie sous valproate et stiripentol.
– Troubles oculaires : risque d’amputation du champ visuel avec la vigabatrine, de troubles visuels (vision floue, diplopie, nystagmus) avec la carbamazépine, la gabapentine, le topiramate, le rufinamide et le lévétiracétam, de myopie avec le topiramate.
– Troubles métaboliques : acidose métabolique (susceptible de diminuer la croissance par stimulation de l’activité ostéoclastique) liée à l’inhibition de l’anhydrase carbonique sous topiramate, risque d’hyponatrémie sous carbamazépine et oxacarbazépine, troubles du métabolisme phosphocalcique.
– Effets tératogènes : notamment avec le valproate et le topiramate, mais aussi avec la carbamazépine.
– Toxicité cardiaque : le lévétiracétam expose à un risque d’allongement de l’espace QT à l’ECG (prudence en cas de troubles hydroélectrolytiques), le lacosamide à des troubles du rythme et de la conduction cardiaques.
Principales interactions
Certains antiépileptiques, comme la carbamazépine notamment, sont inducteurs enzymatiques et diminuent l’efficacité des médicaments associés. Outre les interactions contre-indiquées (voir tableau), les associations avec un grand nombre d’antirétroviraux, la sertraline, le fentanyl, les vinca-alcaloïdes, le cyclophosphamide, l’aprépitant, les contraceptifs hormonaux, ainsi que le l’ulisprital et le lévonorgestrel en contraception d’urgence, sont déconseillées. Dans le cas où une jeune fille traitée par carbamazépine doit recourir à une contraception d’urgence, la pose d’un dispositif intra-utérin au cuivre est privilégiée. A défaut, le doublement de la dose de lévonorgestrel est proposé. La prise d’ulipristal n’est pas recommandée avec un inducteur enzymatique. Pour cette molécule, faute de données, un doublement de la dose n’est pas envisagé. L’association à la vitamine D, aux corticoïdes, à la doxycycline ou au montélukast est classée en précautions d’emploi et peut nécessiter une augmentation de leurs doses.
Inversement, de nombreux antiépileptiques étant substrats des cytochromes P450 (CYP 450), l’utilisation du millepertuis est contre-indiquée, et la consommation de pamplemousse déconseillée.
Pour cette même raison, une bithérapie peut nécessiter des adaptations de doses de certains antiépileptiques. C’est le cas en particulier de la lamotrigine, substrat des CYP 450 et des uridine 5′-diphosphate glucuronosyltransferases (UGT), lorsqu’elle est associée au valproate (inhibiteur d’UGT) ou à la carbamazépine (inducteur d’UGT). L’association lamotrigine et valproate est déconseillée à cause d’un risque majoré de réactions cutanées, mais si l’association est nécessaire, une surveillance renforcée de l’état cutané s’impose.
La contraception œstroprogestative peut en outre perturber un traitement par lamotrigine et nécessiter une augmentation de sa posologie. Un progestatif seul peut être utilisé en alternative.
Un traitement antiépileptique est par ailleurs susceptible d’être perturbé par les médicaments abaissant le seuil épileptogène (neuroleptiques, antidépresseurs, tramadol, certains antihistaminiques, etc.).
Autres traitements
La chirurgie consistant à retirer la zone du cerveau responsable des crises, sans compromettre d’autres fonctions, est envisagée dans les épilepsies focales pharmacorésistantes.
La stimulation du nerf vague est une alternative en cas de pharmacorésistance chez les patients qui ne sont pas éligibles à la chirurgie.
Des données probantes suggèrent que les régimes cétogènes, riches en matières grasses et faibles en glucides, seraient efficaces chez les enfants atteints d’épilepsie résistante aux médicaments.
Analyse d’ordonnance/Contraception d’une adolescente épileptique
Sibylle N., âgée de 15 ans, est suivie par un neurologue car elle souffre d’épilepsie myoclonique juvénile depuis ses 12 ans. Cela faisait deux ans que sa maladie était bien contrôlée grâce à une bithérapie constituée de lamotrigine (150 mg par jour) et de pérampanel (4 mg par jour) quand, il y a 2 mois, sa gynécologue lui a prescrit le contraceptif oral Leeloo. L’adolescente fait à nouveau des crises despuis quelques semaines. Ses parents ont donc pris précocement un rendez-vous avec son neurologue spécialiste. Accompagnée de sa maman, la jeune fille sort aujourd’hui de consultation.
Quel est le contexte de l’ordonnance ?
Que savez-vous de la patiente ?
Sibylle est une jeune fille bien connue de la pharmacie. Sa maladie a été diagnostiquée lorsqu’elle était en classe de sixième et ses débuts au collège ont été compliqués, tant psychologiquement que scolairement. Le traitement optimal a été difficile à trouver, différentes monothérapies s’étant avérées insuffisamment efficaces, mais elle est depuis 2 ans équilibrée avec 150 mg par jour de lamotrigine et 4 mg par jour de pérampanel. Elle a un petit ami depuis 1 an et a consulté dernièrement une gynécologue afin de pouvoir bénéficier d’une pilule contraceptive. Cela fait 2 mois qu’elle prend Leeloo (0,1 mg de lévonorgestrel et 0,02 mg d’éthinylestradiol). Elle a dernièrement refait 3 crises d’épilepsie, ce qui la rend très anxieuse, ainsi que ses parents, car tous gardent un très mauvais souvenir de celles qu’elle faisait auparavant. Avec sa mère, Sibylle est retournée voir son neurologue.
Que lui a dit le neurologue ?
Le neurologue a suspecté une explication iatrogène à ses crises. Il a alors rassuré l’adolescente et sa maman, en leur expliquant que sa maladie ne s’était pas à proprement parler aggravée, mais que très vraisemblablement sa pilule diminue l’efficacité de son traitement antiépileptique. En effet, les contraceptifs œstroprogestatifs peuvent augmenter le métabolisme hépatique de la lamotrigine, avec un risque de diminution de ses concentrations sanguines et de son efficacité. Le thésaurus des interactions médicamenteuses de l’Agence nationale de sécurité du médicament et de produits de santé (ANSM) classe l’interaction en précaution d’emploi et recommande une surveillance clinique ainsi qu’une adaptation de la posologie lors de la mise en route d’une contraception orale et après son arrêt. Face à la reprise des crises d’épilepsie, le neurologue décide donc d’ajuster le traitement de Sibylle, en passant de 150 à 200 mg par jour de lamotrigine.
La prescription est-elle cohérente ?
Que comporte la prescription ?
La lamotrigine est un antiépileptique qui bloque les canaux sodiques dépendants du voltage, ce qui inhibe la dépolarisation et la libération du glutamate (neuromédiateur excitateur).
Le pérampanel est un autre antiépileptique appartenant à la classe des antagonistes sélectifs et non compétitifs des récepteurs au glutamate de type α-amino-3-hydroxy-5-methyl-4-isoxazolepropionic acid (AMPA), localisés sur les neurones post-synaptiques.
Est-elle conforme à la stratégie thérapeutique de référence ?
Oui, les dernières recommandations de la Haute Autorité de santé (2020) préconisent de prescrire une bithérapie en cas d’échec du traitement par deux monothérapies successives.
Y a-t-il des contre-indications ?
Non, Sibylle ne présente aucune contre-indication. Les seules contre-indications à la lamotrigine et au pérampanel étant une hypersensibilité à la substance active ou à l’un des excipients.
Les posologies sont-elles cohérentes ?
Oui. Chez les adultes et les enfants à partir de 13 ans, la dose d’entretien de lamotrigine lorsqu’elle est associée à un autre antiépileptique non inducteur enzymatique puissant (comme c’est le cas du pérampanel) est de 100 à 200 mg par jour. Si l’association de pérampanel avec la lamotrigine ne nécessite pas d’adaptation de la posologie de cette dernière, une augmentation de la dose d’entretien de lamotrigine est en revanche rendue nécessaire par l’interaction avec le contraceptif œstroprogestatif. Il est alors possible d’aller jusqu’à doubler les posologies initiales de lamotrigine.
Quels conseils de prise donner ?
Sibylle connaît ce traitement puisque seule la posologie de la lamotrigine est modifiée. Ce changement de posologie est l’occasion de vérifier que les modalités de prise sont bien respectées et que les médicaments étaient bien tolérés, en dehors du problème récent lié à l’instauration d’une pilule contraceptive.
Efficacité du traitement
Sibylle pourra de nouveau vérifier l’efficacité du traitement par la disparition des crises d’épilepsie. Dans le cas contraire, elle devra consulter son neurologue pour adapter la posologie de la lamotrigine.
Recherche d’effets indésirables
A l’instauration de son traitement, Sibylle avait ressenti une certaine fatigue, des vertiges, une difficulté de concentration, et avait été incommodée par des troubles digestifs, mais elle se sent maintenant bien. Il faut toutefois l’informer que l’augmentation de la posologie de la lamotrigine peut de nouveau entraîner ces effets indésirables, qui devraient toutefois être transitoires.
Le pharmacien rappelle à Sibylle et à sa maman le risque rare de réaction cutanée grave sous lamotrigine et pérampanel. La survenue de signes tels que fièvre, ganglions, décollement cutané, atteinte des muqueuses et/ou saignements nécessiterait une consultation en urgence. Il s’assure que Sibylle conserve bien sur elle la « carte patient », présente à l’intérieur de la boîte de lamotrigine, alertant sur les effets cutanés. Du fait d’un risque de photosensibilité avec cette molécule, il rappelle à Sibylle qu’elle doit particulièrement se protéger du soleil.
Le pharmacien alerte également la maman de Sibylle sur le risque de trouble de l’humeur tout en la rassurant car ces effets ont principalement été observés à forte dose, de façon transitoire et d’intensité légère à modérée.
Modalités de prise
Le pharmacien s’assure que Sibylle a compris les modalités de manipulation du nouveau blister de Lamictal, conçu pour protéger les enfants d’une ingestion accidentelle : il est nécessaire de séparer un comprimé en enlevant son alvéole, de décoller la pellicule extérieure en soulevant un coin indiqué par la flèche et de sortir le comprimé en poussant doucement le comprimé à travers la couche d’aluminium.
Il rappelle à la jeune fille qu’il est préférable de prendre le pérampanel le soir pour limiter l’impact des vertiges et de la somnolence.
Conseils associés/Accompagner le patient
La majorité des épilepsies peut être contrôlée grâce à la mise en place d’un traitement, sans toutefois négliger une hygiène de vie adaptée. Sensibiliser le patient et son entourage au bon usage des médicaments et à la gestion des crises est essentiel à la bonne prise en charge de la maladie.
L’épilepsie vue par les patients
Impact psychologique
L’épilepsie peut faire peur à l’entourage, notamment lors de la survenue des crises. Le caractère de l’enfant et la manière dont la maladie est gérée par ses proches influent sur les réactions de l’enfant et parfois également sur l’estime qu’il a de lui.
Les enfants peuvent se sentir isolés et, pourtant, ils ont besoin d’être rassurés en étant entourés de personnes sachant gérer les crises. La dépression constitue une comorbidité fréquente chez les patients épileptiques. Orienter les familles vers une association de patients est souvent bénéfique.
Impact physique
Les crises d’épilepsie peuvent parfois mettre en danger le patient et son entourage : blessures, fractures, brûlures, accidents de la voie publique, etc.
Impact sur la vie scolaire et étudiante
S’ils suivent généralement une scolarité classique, les enfants sont toutefois plus fréquemment absents du fait des crises. De plus, certains présentent des troubles d’apprentissage et/ou un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité.
Faire une demande auprès de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) permet de mettre en place un projet pédagogique pouvant comporter à la fois un projet personnalisé de scolarisation (ou PPS, avec la mise en place de mesures telles que l’accès à un auxiliaire de vie scolaire), et un projet d’accueil individualisé (ou PAI, qui comporte le protocole d’urgence à respecter en cas de crise à l’école).
Il faut essayer de limiter au maximum le risque de stigmatisation de l’enfant : la pratique sportive est rarement contre-indiquée et pourrait même aider au contrôle des crises d’épilepsie. Elle améliore également l’estime de soi des patients.
En fonction de l’évolution de l’épilepsie, tous les métiers ne seront pas forcément possibles. Il n’y a aucune obligation légale de révéler son épilepsie, mais le statut de travailleur handicapé peut permettre la mise en place d’aménagements.
À dire au patient et à ses parents
A propos de la maladie
La majorité des épilepsies peut être contrôlée sous traitement. L’évolution de l’épilepsie est variable en fonction des enfants et peut guérir à l’âge adulte. Les épilepsies sévères peuvent être reconnues comme des affections de longue durée.
L’épilepsie ne contre-indique aucune vaccination, cette dernière pouvant au contraire protéger d’une éventuelle aggravation de l’épilepsie en cas de méningite ou de coqueluche.
Rassurer les parents : le risque de décès lors d’une crise d’épilepsie est extrêmement rare. A l’occasion du congrès de la Société française de pédiatrie en 2019, certains spécialistes ont évoqué une enquête menée auprès de 1,2 million d’enfants n’ayant notamment relevé aucun décès par épilepsie, alors qu’il y en avait eu 15 par asthme*.
L’entourage doit cependant apprendre à réagir et savoir sécuriser l’enfant en cas de crise : le placer en position latérale de sécurité, protéger sa tête contre d’éventuelles blessures en plaçant par exemple un coussin sous celle-ci. Attention à ne pas bloquer les mouvements ni mettre quelque chose dans la bouche. La croyance selon laquelle un patient risque d’avaler sa langue durant une crise est complètement fausse. L’entourage doit prendre l’habitude de noter l’heure du début de la crise. En effet, au-delà de 5 minutes, une benzodiazépine d’action rapide (midazolam par voie buccale ou diazépam par voie rectale) doit être administrée, et au-delà de 10 minutes, le service d’aide médicale urgente (Samu) centre 15 doit être appelé. Chez l’enfant âgé de 3 à 6 mois, le midazolam ne peut être administré qu’en milieu hospitalier et le Samu doit donc aussitôt être appelé. Chez les très jeunes enfants ou si la dose de midazolam représente un volume important, celle-ci peut être administrée en 2 demi-doses de chaque côté de la bouche.
Pour limiter le risque d’accidents domestiques, privilégier une literie basse et préférer les douches aux bains.
La ligue française contre l’épilepsie propose la tenue d’un calendrier des crises, téléchargeable sur son site (epilepsie-info.fr/calendrier-des-crises/).
Le passage des soins pédiatriques aux soins adultes doit se préparer très progressivement à partir de l’âge de 12 ans pour autonomiser l’adolescent dans la gestion de sa maladie.
A propos du traitement
Une bonne observance est essentielle pour limiter, voire supprimer les crises d’épilepsie, et ainsi améliorer la qualité de vie des patients.
La grande majorité des médicaments antiépileptiques nécessite une augmentation progressive de la posologie pour arriver à diminuer la fréquence des crises tout en limitant le risque d‘effets indésirables, notamment cutanés avec la lamotrigine et le pérampanel. Le traitement ne doit jamais être arrêté brutalement.
Les modes d’administration et précautions particulières d’utilisation doivent être expliqués aux parents et à l’enfant dès lors qu’il est en âge de comprendre.
Certaines molécules comme l’acide valproïque, le topiramate ou la carbamazépine exposent à un risque tératogène important. Il convient de s’assurer, d’une part, que les filles en âge de procréer ont bien compris ce risque lié à une grossesse, et que, d’autre part, les parents de celles-ci ont intégré la nécessité de contacter le neurologue dès ses premières menstruations.
Du fait d’une marge thérapeutique étroite et d’un effet inducteur ou inhibiteur enzymatique, les interactions sont fréquentes et l’association avec tout autre médicament doit être menée avec prudence et peut nécessiter un ajustement de la dose. La contraception œstroprogestative doit notamment être instaurée avec précaution à cause du risque d’inactivation de pilule par de nombreux antiépileptiques, mais aussi du risque de diminution d’efficacité de certaines molécules, comme la lamotrigine, par les œstroprogestatifs.
Le dosage sérique des antiépileptiques n’est pas recommandé en routine. Il est en revanche préconisé en cas de suspicion de surdosage, d’interactions, de déséquilibre du traitement avec résurgence des crises ou de suspicion de mauvaise observance.
En raison de leurs effets indésirables, certaines molécules comme le valproate, la carbamazépine, l’éthosuximide, le topiramate, le felbamate et le cannabidiol requièrent une surveillance biologique. Un traitement par vigabatrine impose un suivi ophtalmique 2 fois par an.
A propos des mesures non médicamenteuses
Une hygiène de vie rigoureuse limite la survenue des crises, ce qui peut être difficile à accepter particulièrement au moment de l’adolescence. Le sommeil doit notamment être régulier, les dettes de sommeil sont à éviter. Alerter les adolescents sur les dangers liés à la consommation d’alcool et de toxiques. Le surmenage, le stress et l’anxiété peuvent favoriser les crises. Les techniques de relaxation – la méditation de pleine conscience ou le yoga – et le sport peuvent diminuer la fréquence des crises.
Orthophonie, méthodes de neuropsychologie et psychomotricité sont utiles en cas de troubles d’apprentissage associés.
L’essentiel à retenir
A propos de la pathologie
L’épilepsie est une maladie neurologique chronique caractérisée par la survenue récurrente de crises épileptiques non provoquées, de caractéristiques variables. Des troubles cognitifs et psychiatriques et des difficultés d’apprentissage sont fréquemment associés et nécessitent une prise en charge complémentaire (orthophonie, psychomotricité, etc.).
Une crise traduit un dysfonctionnement neuronal lié à une activité excessive et paroxystique d’une zone (crise focale) ou de l’ensemble du cerveau (crise généralisée) résultant d’un déséquilibre entre les transmissions excitatrices glutamatergiques et inhibitrices GABAergiques et d’une dysfonction de canaux sodiques et calciques à l’origine d’une dépolarisation neuronale massive.
Le diagnostic est difficile et repose sur la combinaison de critères cliniques et l’électroencéphalogramme.
L’évolution de l’épilepsie est variable. Une guérison spontanée est observée dans plus de 50 % des cas.
La pratique sportive est possible et même à encourager pour éviter la stigmatisation de l’enfant, son isolement et renforcer sa confiance en lui-même (les sports violents ou exposant à un risque en cas de crise sont à déconseiller).
A propos du traitement
Traitement de fond
Les antiépileptiques visent à corriger le déséquilibre entre les transmissions glutamatergiques et GABAergiques et/ou à bloquer des canaux ioniques.
Ce sont des médicaments à marge thérapeutique étroite qui doivent être instaurés avec des posologies d’installation progressive pour limiter leurs effets indésirables.
Une monothérapie est recommandée en première intention. Si elle s’avère inefficace ou mal tolérée, une autre molécule sera essayée. L’échec de cette seconde molécule conduit à une bithérapie.
Les molécules les plus utilisées chez l’enfant sont la lamotrigine, la carbamazépine, le lévétiracétam, le topiramate et le valproate.
Du fait de leur profil inducteur enzymatique, de nombreux antiépileptiques interfèrent avec les traitements associés (attention notamment aux interactions avec les contraceptifs). Inversement, les antiépileptiques sont sensibles à l’influence de nombreux médicaments (y compris à celle d’autres antiépileptiques dans le cadre de bithérapies).
Le valproate, le topiramate et la carbamazépine exposent à un risque tératogène important. Veiller à ce que les parents d’une jeune fille déjà sous traitement aient bien compris l’importance de signaler au prescripteur la survenue de ses premières menstruations en vue d’une réévaluation de son traitement.
Traitement de crise
Lors d’une crise tonicoclonique généralisée, les complications les plus graves sont les chutes et l’inhalation de liquide gastrique par fausse route. En revanche, la croyance selon laquelle un patient risque d’avaler sa langue est fausse. Il est important d’apprendre aux parents à sécuriser l’enfant : le placer en position latérale de sécurité, protéger sa tête contre d’éventuelles blessures, ne pas bloquer ses mouvements ni mettre quelque chose dans sa bouche.
En cas de crise tonicoclonique généralisée supérieure à 5 minutes, une benzodiazépine d’action rapide (midazolam par voie buccale ou diazépam par voie rectale) doit être administrée.
Un projet d’accueil individualisé (PAI) permet l’administration du traitement de crise sur les lieux d’accueil de l’enfant.
Syndrome épileptique
Il n’existe pas une épilepsie, mais plus de 50 syndromes épileptiques identifiés qui se caractérisent par un ensemble de facteurs cliniques et paracliniques tels que l’âge de début, le type de crises, l’électroencéphalogramme ainsi que les comorbidités.
Le 27 avril 2024
Lamotrigine 200 mg : 1 comprimé le matin
Pérampanel 4 mg : 1 comprimé le soir
QSP 3 mois
En cas d’épilepsie stable ou sans rupture de conscience, la conduite est autorisée sous certaines conditions. Tout dépend de l’évolution de l’épilepsie et de la façon dont elle sera contrôlée par les traitements. Même si elle persiste à l’âge adulte, il est tout à fait possible de conduire. Il faudra en revanche qu’un médecin agréé ou une commission médicale détermine la capacité à conduire. La conduite automobile n’est donc pas systématiquement contre-indiquée, mais le permis peut être octroyé pour une période limitée et soumis à des réévaluations médicales régulières.
Le sport est bénéfique dans la population générale et également en cas d’épilepsie puisqu’il peut même diminuer la fréquence des crises. Le tennis, l’athlétisme et le golf peuvent être pratiqués sans restriction. Les sports de contact (football, boxe, karaté, hockey, etc.) sont à éviter car ils sont susceptibles de provoquer des coups à la tête. Du fait des risques liés à la survenue d’une crise pendant la pratique, d’autres sont déconseillés (plongée, escalade, parachutisme). Quant au ski et à la natation, il est recommandé de s’y adonner avec un accompagnateur.
Question de patient
En cas d’épilepsie stable ou sans rupture de conscience, la conduite est autorisée sous certaines conditions. Tout dépend de l’évolution de l’épilepsie et de la façon dont elle sera contrôlée par les traitements. Même si elle persiste à l’âge adulte, il est tout à fait possible de conduire. Il faudra en revanche qu’un médecin agréé ou une commission médicale détermine la capacité à conduire. La conduite automobile n’est donc pas systématiquement contre-indiquée, mais le permis peut être octroyé pour une période limitée et soumis à des réévaluations médicales régulières.
Question de patient
Le sport est bénéfique dans la population générale et également en cas d’épilepsie puisqu’il peut même diminuer la fréquence des crises. Le tennis, l’athlétisme et le golf peuvent être pratiqués sans restriction. Les sports de contact (football, boxe, karaté, hockey, etc.) sont à éviter car ils sont susceptibles de provoquer des coups à la tête. Du fait des risques liés à la survenue d’une crise pendant la pratique, d’autres sont déconseillés (plongée, escalade, parachutisme). Quant au ski et à la natation, il est recommandé de s’y adonner avec un accompagnateur.
Le point de vue
Les crises fébriles sont-elles un facteur de risque de développer une maladie épileptique ?
Chez certains enfants, les crises fébriles sont liées à une immaturité cérébrale et à une prédisposition familiale. Dans la grande majorité des cas, il n’y a pas d’évolution vers une maladie épileptique et dans 80 % des cas, les enfants ne font qu’un seul épisode de crise fébrile. Il faut donc dédramatiser et rassurer les parents. Mais il faut faire la distinction entre une crise fébrile se manifestant par des mouvements de tout le corps, survenant chez un enfant entre 9 mois et 4 ans au développement psychomoteur normal, et une crise ne concernant qu’un seul côté du corps, survenant chez un nourrisson de 3 mois ayant des antécédents de souffrance à l’accouchement, d’accident vasculaire cérébral néonatal, avec un développement psychomoteur anormal. Ce second cas doit interpeler car il peut être le signe d’une maladie épileptique.
Quel message vous semble-t-il important que les pharmaciens diffusent au comptoir ?
Un message très important à faire passer est que l’épilepsie photosensible concerne moins de 10 % des cas. En outre, dans cette forme d’épilepsie, ce qui pose problème, c’est le passage du noir au blanc. Ainsi, si les écrans cathodiques pouvaient être incriminés il y a quelques années, ce n’est plus le cas des écrans plats et des smartphones. La lumière bleue n’est pas mise en cause. En revanche, en cas d’épilepsie photosensible, les stroboscopes des boîtes de nuit peuvent être un facteur de crise. De même, la réverbération de la neige ou certains tissus à damier noir et blanc peuvent être mal tolérés par les patients. Etant lyonnais, je me réjouis qu’à l’occasion de la dernière Fête des lumières, les messages d’information ne stipulaient une mise en garde que pour les épileptiques photosensibles, et non pour tous les épileptiques en général. Il ne faut pas oublier que dans 90 % des cas, les épileptiques ne sont pas concernés par la photosensibilité !
Arthur, 22 ans, épileptique depuis l’âge de 14 ans
« En quelques secondes, ma vie a basculé. Cela s’est passé un matin alors que j’étais interrogé par un professeur. Stressé par ses questions, j’ai fait ma première crise tonicoclonique devant toute la classe. J’ai perdu connaissance et j’ai convulsé. Je n’ai pas pu revenir tout de suite à l’école car j’avais trop peur du regard des autres. A mon retour, beaucoup d’élèves ne me parlaient plus ou se moquaient de moi. Les premières années après le diagnostic de mon épilepsie ont été difficiles socialement et scolairement car je faisais fréquemment des crises. Grâce au soutien de ma famille, j’ai réussi à avoir le bac. Aujourd’hui, malgré un traitement par lamotrigine et valproate, je continue à faire 2 à 3 crises par an. J’ai pu obtenir le statut de travailleur handicapé et trouver un emploi. »
Conditions de prescription de valproate et topiramate chez une fille
– Prescription initiale annuelle réservée aux neurologues et pédiatres et recueil d’un accord de soins signé chaque année par le prescripteur et les parents de la patiente mineure. Renouvellement possible par tout médecin dans la limite d’un an. Une contraception efficace doit être associée si la patiente est en âge de procréer.
– Délivrance sur présentation de la prescription initiale du spécialiste (et le cas échéant de celle de renouvellement) et du formulaire d’accord de soins signé.
– Pour le valproate, une brochure d’information ainsi qu’une carte nominative doivent être remises à la patiente par le spécialiste ou le pharmacien. Elles sont disponibles auprès des laboratoires concernés et sur le site de l’ANSM. La carte est également présente avec la boîte de médicament.
Certaines contre-indications aux principales molécules utilisées chez l’enfant sont à connaître en plus de l’hypersensibilité à la molécule.
Carbamazépine : antécédents d’aplasie médullaire et de porphyrie.
Valproate : grossesse, fille en âge de procréer (sauf si les conditions du programme prévention grossesse sont remplies), hépatite, antécédent personnel ou familial d’hépatite, certaines maladies métaboliques (déficit en carnitine, hyperammoniémie).
En savoir plus
La Haute Autorité de santé (HAS)
has-sante.fr
L’autorité met à disposition différentes fiches sur la prise en charge de l’épilepsie chez l’enfant, y compris sur la période de transition de l’adolescence vers l’âge adulte.
Epilepsie France
epilepsie-france.com
L’association de patients propose de nombreuses informations et également des contacts par région pour accompagner les malades et leur entourage. L’association organise des actions de sensibilisation du grand public.
Quelques jours plus tard, Mme N. téléphone à la pharmacie le matin, dès son ouverture. Elle explique que sa fille a dormi chez une amie alors que ce n’était pas prévu, et vient de rentrer à la maison. Sibylle se demande si elle doit prendre le comprimé de pérampanel qu’elle n’a pas pu prendre la veille au soir. Que lui répondre ?
a) Sibylle doit prendre dès que possible le comprimé
b) Sibylle ne doit pas rattraper la prise omise
Réponse : Compte tenu de la longue demi-vie du pérampanel (105 heures), Sybille ne doit pas reprendre son comprimé de pérampanel. Elle prendra en revanche le comprimé de lamotrigine ce matin comme à l’accoutumée. Elle poursuivra la prise du pérampanel ce soir à l’heure habituelle. Il fallait donc choisir la seconde proposition.
Dr Sylvain H.
Neurologue
Sibylle N., née le 16 avril 2009
1,72 m et 59 kg
Le 27 avril 2024
Lamotrigine 200 mg : 1 comprimé le matin
Pérampanel 4 mg : 1 comprimé le soir
QSP 3 mois
Il n’existe pas une épilepsie, mais plus de 50 syndromes épileptiques identifiés qui se caractérisent par un ensemble de facteurs cliniques et paracliniques tels que l’âge de début, le type de crises, l’électroencéphalogramme ainsi que les comorbidités.
En chiffres
– En France : 200 000 à 300 000 enfants épileptiques, 4 000 enfants diagnostiqués par an.
– Incidence : 70 nouveaux cas pour 100 000, majoritairement avant l’âge de 10 ans.
– Des difficultés d’apprentissage sont rapportées chez 60 à 73 % des enfants présentant une épilepsie, même bénigne.
L’essentiel
– Lorsqu’un traitement est nécessaire, une monothérapie est recommandée en traitement de fond de première intention. Il doit toujours être initié progressivement pour limiter les effets indésirables.
– Informer les parents (et l’enfant selon son âge) des effets indésirables, notamment cutanés, et les éduquer à repérer les signes imposant l’arrêt.
– Les parents d’une fille épileptique doivent informer le neurologue de ses premières menstruations en vue de la réévaluation d’un traitement potentiellement tératogène.
L’essentiel
La prise en charge globale de l’épilepsie ne repose pas que sur les antiépileptiques, mais fait appel à l’éducation thérapeutique du patient, ainsi que de ses parents, et nécessite une prise en charge des comorbidités cognitives et psychiatriques fréquemment associées.
- * D’après les communications des Drs Nathalie Villeneuve (Marseille), Christine Cordoliani (Bastia), Stéphane Auvin (Paris) lors du congrès de la Société française de pédiatrie (Paris, 19-21 juin 2019).
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