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LOGIQUE LOGISTICIENNE

Publié le 26 juin 2021
Par Francois Pouzaud
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LES RÉPARTITEURS SONT LE LIEN QUOTIDIEN ENTRE LES PRODUCTEURS DE MÉDICAMENTS, LES PHARMACIENS ET LES PATIENTS. LA CRISE SANITAIRE DÉMONTRE QUE SANS CET EXPERT DE LA LOGISTIQUE, RIEN NE SERAIT PLUS POSSIBLE AU NIVEAU DE L’ACHEMINEMENT DES MÉDICAMENTS ET PRODUITS DE SANTÉ.

Celui sans qui rien ne serait possible. Prestataire incontournable, le répartiteur permet de concentrer l’offre des fournisseurs et de mettre à disposition du réseau officinal 30 000 références. En livrant l’ensemble des pharmacies de France dans un délai moyen de 2 h 15 (source : Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique, CSRP), les répartiteurs garantissent à tous les patients un égal accès aux médicaments, partout et tout le temps. Sans ce réseau, c’est tout le maillage officinal qui serait fragilisé avec le risque, en creux, de créer des déserts pharmaceutiques, particulièrement en zone rurale où les pharmacies constituent souvent le premier point d’accès à la santé, progression inquiétante des déserts médicaux oblige.

« Si les 7 000 pharmacies rurales peuvent entretenir un lien et une proximité avec la population en campagne, c’est notamment parce qu’elles sont en mesure de mettre à disposition leurs médicaments quotidiennement grâce à la qualité de service et de logistique fournie par les répartiteurs. Ces entreprises assurent des livraisons deux fois par jour sans distinction par rapport aux officines urbaines. Et une pharmacie rurale ne paie pas plus cher ce service, ce qui est essentiel à notre maintien », explique Albin Dumas, président de l’Association Pharmacie Rurale (APR).

Entre capacité d’adaptation, soutien des enjeux de santé publique, distribution de millions de masques pour le compte de Santé publique France, transfert de médicaments des pharmacies à usage intérieur (PUI) vers les officines, accès aux vaccins contre le Covid-19, la crise sanitaire a également été un révélateur d’utilité de l’attelage répartiteur/pharmacien d’officine au service des patients.

Un prestataire affaibli

Remplissant des obligations de service public (référencement d’au moins 9 médicaments sur 10, gestion d’un stock correspondant au moins à deux semaines de consommation, livraison sécurisée dans un délai maximum de 24 heures après chaque commande) et jouant un rôle sanitaire primordial (retrait de lots, Cyclamed, stockage et, le cas échéant, distribution du stock stratégique Eprus*, stock de comprimés d’iode en cas d’accident nucléaire, etc.), les répartiteurs dont le niveau de marge est strictement encadré par l’Etat sont aujourd’hui affaiblis dans leurs missions. « Si l’Etat ne garantit pas l’avenir du modèle de répartition pharmaceutique, les conséquences seront lourdes pour les patients », met en garde depuis plusieurs années la CSRP. Sans une refonte du système de rémunération, les risques sont en effet identifiés : remise en cause de l’accès au médicament sur tout le territoire, sécurité d’accès qui ne pourra plus être garantie dans les mêmes conditions, risques de rupture de stocks accrus…

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La prise de conscience des difficultés de ce secteur est bien là, comme en témoignent les rapports de la Cour des comptes et de l’Inspection générale des affaires sociales de 2017 ou encore l’avis de l’Autorité de la concurrence de 2019. Pourtant, l’issue des discussions ouvertes avec le ministère de la Santé reste encore incertaine et les constats peu suivis d’effet, hormis un arrêté publié en septembre 2020 qui a augmenté la marge de distribution en gros, afin de compenser la diminution de ressources subie par les répartiteurs depuis le début de la crise du Covid-19. Mais cela ne suffit pas à rétablir son équilibre économique.

Les répartiteurs sont indemnisés pour les services ponctuels rendus pendant la crise sanitaire mais quand viendra l’heure de faire les comptes sur le déficit de l’Assurance maladie et de combler les trous, la revalorisation de la rémunération des grossistes ne risque-t-elle pas d’en pâtir ? « C’est un risque, reconnaît Emmanuel Déchin, délégué général de la CSRP. En tout état de cause, jusqu’à présent, les discussions toujours en cours font bien la distinction entre, d’une part, les mesures Covid et, d’autre part, la transformation du modèle économique au travers de trois leviers d’action possible : la baisse de la taxe sur les ventes en gros, une revalorisation de la marge à travers le relèvement du plafond, la création d’un forfait sur les produits thermosensibles. »

* Eprus : établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires.