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Les dermocorticoïdes
Anti-inflammatoires et immunosuppresseurs, les dermocorticoïdes présentent de nombreuses indications en dermatologie. Leur dispensation doit s’accompagner de conseils d’utilisation pour assurer leur efficacité et lutter contre la corticophobie.
Mode d’action
Propriétés anti-inflammatoires et vasoconstrictrices
Les dermocorticoïdes ont pour effet, entre autres, de réduire la synthèse locale de prostaglandines (molécules impliquées dans l’inflammation et la vasodilatation) et des leucotriènes (molécules impliquées dans l’allergie et le prurit). Ils ont donc des propriétés anti-inflammatoires et vasoconstrictrices, permettant de diminuer un érythème et un œdème, et antiprurigineuses.
L’intensité de la vasoconstriction (perceptible par le blanchiment de la peau) étant corrélée à l’activité anti-inflammatoire, la puissance des dermocorticoïdes est déterminée à partir d’un test de vasoconstriction capillaire in vivo (dit test de McKenzie). Les dermocorticoïdes sont ainsi classés selon 4 niveaux d’activité anti-inflammatoire : faible, modérée, forte, et très forte. En pratique, les dermocorticoïdes les plus utilisés sont ceux d’activité forte chez l’adulte et modérée chez l’enfant ou sur le visage de l’adulte. Ceux d’activité très forte sont réservés aux dermatoses très sévères.
Les dermocorticoïdes exercent aussi une action antiproliférative sur les kératinocytes, les fibroblastes et les mélanocytes, qui peut être mise à profit en thérapeutique (dans le traitement des cicatrices chéloïdes, par exemple), mais qui explique certains effets indésirables, dont l’atrophie et la dépigmentation cutanées.
Ils possèdent des propriétés immunosuppressives locales liées à une inhibition de l’activation des lymphocytes, ce qui est mis à profit dans certaines pathologies dysimmunitaires, mais augmente le risque de surinfection locale.
Indications
Eczémas et psoriasis
Les dermocorticoïdes sont indiqués dans les eczémas (dermatite atopique, dyshidrose, eczéma de contact), la dermite séborrhéique, le psoriasis, le lupus cutané, le lichen (éruption inflammatoire auto-immune constituée de papules violacées prurigineuses confluentes en plaques et accompagnée d’atteintes des muqueuses), les cicatrices hypertrophiques et chéloïdes, le vitiligo, la pemphigoïde bulleuse (c’est la plus fréquente des maladies bulleuses auto-immunes, même si elle reste rare, survenant le plus souvent chez des sujets âgés) et les piqûres d’insecte.
Paramètres influençant l’absorption
Molécule, état cutané, mode d’application
Médicament : la diffusion transdermique dépend du dermocorticoïde et de sa liposolubilité, mais aussi des excipients présents dans les différentes formes galéniques. Les pommades, très grasses, ont un rôle couvrant et un effet occlusif qui augmente la pénétration des principes actifs, tout comme les présentations sous forme d’emplâtres. Le risque de diffusion systémique est moins important avec les crèmes, et surtout avec les gels et les lotions.
Etat cutané : la peau des nouveau-nés et des personnes âgées, fine et fragile et donc davantage sensible à l’action des dermocorticoïdes, est plus à risque de diffusion systémique. De même pour une peau lésée. Une température cutanée élevée favorise aussi l’absorption cutanée (du fait d’une vasodilatation) : l’absorption consécutive à une application sur la plante des pieds ou la paume des mains, qui sont les zones du corps les plus froides, est moindre que celle après une application sur d’autres parties (les plis en particulier, le visage, etc.).
Mode d’application : l’absorption est d’autant plus importante que la surface d’application est grande et/ou la durée d’application longue. L’occlusion (par un pansement, un vêtement moulant, ou un dispositif absorbant au niveau du siège des nourrissons ou des sujets incontinents) qui augmente la température locale et le temps de contact multiplie l’absorption par 10.
Effets indésirables
Locaux
Du fait de leur mode d’action, les dermocorticoïdes peuvent être responsables d’atrophie et d’amincissement cutanés, de retard de cicatrisation, de télangiectasie, d’hirsutisme, d’hypopigmentation et de retards de cicatrisation. Ils peuvent induire de l’acné et aggravent les infections cutanées. Les applications périoculaires sont parfois responsables de glaucome et de cataracte.
Bien qu’indiqué dans l’eczéma de contact, les dermocorticoïdes provoquent des allergies de contact dont la prévalence est estimée entre 0,2 et 6 %. Dues au principe actif lui-même ou aux excipients, elles sont suspectées, en cas de mauvaise réponse, de résistance ou d’aggravation des lésions, et nécessitent d’orienter le patient vers un allergologue, afin d’établir un diagnostic différentiel et de guider la conduite à tenir.
Les effets indésirables systémiques de la corticothérapie (syndrome de Cushing iatrogène, troubles de la croissance, de la glycémie, ostéoporose, hypertension artérielle, notamment) sont beaucoup plus rares et s’observent surtout avec les dermocorticoïdes d’activité très élevée et/ou de fortes doses en usage prolongé, en particulier dans le cadre d’un détournement d’usage à visée de blanchiment de la peau. L’occlusion augmente également le risque d’effets systémiques et n’est le plus souvent pas recommandée. Elle est parfois envisagée sur des lésions très épaisses et relève toujours d’une prescription spécialisée.
Contre-indications
Dermatoses infectieuses
En raison de leurs propriétés immunosuppressives, les dermocorticoïdes sont contre-indiqués dans les dermatoses infectieuses (herpès, varicelle, zona).
Ils sont également contre-indiqués sur des lésions ulcérées (risque de retard de cicatrisation), ainsi que sur l’acné et la rosacée (qui sont aggravés par les dermocorticoïdes) et l’érythème fessier.
L’application en pratique
L’unité phalangette
L’unité phalangette sert de guide à la quantité de produit à appliquer. Correspondant à la quantité de crème (gel ou pommade) déposée d’un trait sur la dernière phalange de l’index d’un adulte, elle permet de traiter l’équivalent de la surface de deux paumes de main adulte. Un tube entier de 30 g suffit pour couvrir tout le corps d’un adulte. Selon la surface à traiter, un nombre conséquent de tubes peut donc être nécessaire pour un mois de traitement sans que cela ne doive inquiéter le patient ou le pharmacien. En fin d’application, la peau doit être brillante sans que le produit ne soit visible.
Il n’est pas nécessaire de porter des gants pour l’application (l’épaisseur de la peau et la température cutanée plus faible au niveau des doigts limitent les diffusions systémiques), mais les mains doivent ensuite être lavées.
Des conseils de dispensation indispensables
Les dermocorticoïdes sont efficaces et bien tolérés si l’adhésion thérapeutique et les modalités d’application sont respectées. Il est crucial de diffuser des informations claires sur leur utilisation afin de combattre la corticophobie, susceptible de compromettre le succès d’un traitement.
S’assurer que la galénique est adaptée : la pommade ou l’emplâtre sont destinés au traitement de lésions très sèches ou lichénifiées (épaissies à la suite d’un grattage). La texture crème est particulièrement adaptée aux lésions suintantes ou susceptibles de macérer (dans des plis), les gels sont indiqués également dans les plis, et les lotions ou mousse s’appliquent notamment sur le cuir chevelu et les zones pileuses.
Expliquer qu’une seule application par jour est suffisante en raison d’un « effet réservoir » (rarement 2 applications par jour sont nécessaires) : les dermocorticoïdes s’accumulent dans la couche cornée d’où ils sont relargués progressivement vers les couches cutanées plus profondes. Ils s’appliquent généralement le soir après la toilette, sur une peau encore un peu humide (en raison d’une meilleure pénétration au niveau de la couche cornée hydratée) et en débordant un peu sur la peau saine. La quantité appliquée doit être suffisante (si ce n’est pas le cas, le traitement sera inefficace).
Arrêter le traitement à la disparition des symptômes. La décroissance progressive de la dose administrée, complexe à mettre en place, n’est plus recommandée. Une absorption moindre du principe actif se fait en pratique naturellement au fur et à mesure que la peau retrouve sa fonction barrière et que les lésions diminuent. Il n’y a donc pas lieu de craindre un effet rebond.
Orienter vers des associations de patients qui proposent des programmes d’information et d’éducation thérapeutique afin de dissiper les inquiétudes concernant les dermocorticoïdes (associationeczema.fr, francepsoriasis.org).
- Sources : « Corticoïdes locaux », Collège national de pharmacologie médicale, pharmacomedicale.org ; « Prescription et surveillance des anti-inflammatoires stéroïdiens et non stéroïdiens », Item 326-UE 10, Annales de dermatologie vénéréologie, 2018 ; « Prescrire les dermocorticoïdes : les règles d’or », La Revue du praticien, 17 mai 2023 ; « Dermocorticoïdes : incontournables et redoutés », Revue médicale suisse, 9 avril 2014 ; « Dermocorticoïdes », EMC, Elsevier Masson, 2014 ; « Blanchiment de la peau », fiches pratiques, Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, 2020 ; « Comment bien appliquer son dermocorticoïde », Pierre Fabre Eczema Foundation ; « Dermatite atopique (eczéma) », Manuel MSD, janvier 2023 ; base de données publique des médicaments.
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