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Tellement plus d’opportunités que de menaces
Le niveau très élevé de substitution des princeps, les perspectives de tombées de brevet moins importantes dans les années à venir, associées à une politique de convergence des prix entre princeps et génériques et à la mise en œuvre de l’article 66 de la LFSS pour 2019 plantent le décor du marché du médicament générique.
L’article 66 de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2019, entré en vigueur le 1er janvier 2020, prévoit que le remboursement d’un assuré qui refuserait, sans justification médicale portée sur l’ordonnance, la substitution d’un médicament est plafonné au prix du générique. Et sans tiers payant possible. Le patient supporte un reste à charge si le prix du médicament d’origine délivré en pharmacie est supérieur au prix du générique le plus cher du groupe générique concerné.
Cette disposition comporte un risque : elle peut inciter les laboratoires princeps à aligner leurs prix sur ceux des génériques. Ce qui reviendrait en quelque sorte à mettre en place un tarif forfaitaire de responsabilité (TFR) généralisé et, à terme, menacerait la pérennité du générique en France.
Ce risque est fort heureusement atténué par plusieurs avancées obtenues pendant les débats parlementaires sur ce texte de loi :
– l’alignement du remboursement du princeps sur le prix du générique ne s’applique pas pendant une période de deux ans suivant la création d’un nouveau groupe générique, afin de lui laisser le temps de se développer. Un arrêté publié le 14 décembre 2020 exclut des spécialités de moins de 24 mois de commercialisation (suivant la publication au Journal officiel du prix de la première spécialité générique du groupe) du périmètre de la base unique de remboursement ;
– de nouvelles restrictions d’utilisation de la mention « non substituable » (NS) par les médecins et des règles qui les obligent à justifier leur choix.
Pour contrecarrer l’effet dissuasif du « reste à charge » pour les patients, des industriels commercialisant des princeps alignent leurs prix sur ceux des génériques. Pensé initialement comme un soutien au développement des génériques, l’article 66 a dérivé en un possible frein à la substitution. Le recul d’un an et demi sur cette mesure montre toutefois qu’elle n’a pas été contreproductive et que la pratique d’alignement de prix reste limitée et sans succès pour les princeps.
En proportion, le Covid-19 pèse finalement davantage sur les ventes de génériques dont les évolutions sont en retrait par rapport à l’activité globale de la pharmacie (voir infographie).
Comme les princeps, les génériques ont souffert de l’effondrement de certaines catégories de médicaments comme les antibiotiques, en l’absence des pathologies saisonnières, et de la baisse des prescriptions dans les pathologies chroniques, en raison de la diminution du suivi des patients pendant les confinements.
A cela s’ajoute une série de révisions tarifaires (au 1er juillet, au 1er septembre, etc.), décidées par le Comité économique des produits de santé (CEPS), sous forme de baisses de prix et de mises sous tarif forfaitaire de responsabilité (TFR). La dernière en date aura un rendement de 4 M€, dont 3,1 M€ de baisses de la marge officinale. Ce « hold-up » dénoncé par la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) était pourtant prévisible. « A fin mai, on était encore très loin de l’objectif 2021 de la LFSS (640 M€ d’économies en net à réaliser sur le médicament), alors qu’en l’absence de nouvelles baisses de prix ce sont environ 380 M€ d’économies qui sont projetés en prix nets sur cette année, soit 58 % seulement de l’objectif », a expliqué Patrick Oscar, directeur général de Gers Data, lors des 16es ateliers virtuels du Groupement pour l’élaboration et la réalisation de statistiques (Gers) en juin dernier.
Néanmoins, la FSPF a demandé le report de ces mesures jusqu’à la fin de l’épidémie.
Ces baisses de prix se répercutent sur les remises « génériques ». Selon ce syndicat, le réseau officinal a perdu 43 M€ de remises sur les cinq premiers mois de 2021 versus la même période de 2020.
L’addition pourrait encore s’alourdir en l’absence d’accord sur une nouvelle convention pharmaceutique entre l’Assurance maladie et les syndicats pharmaceutiques d’ici à la fin de l’année. Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), craint qu’au titre de l’année 2021 « la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) générique de 65 M€ ne puisse pas non plus être négociée et soit donc définitivement perdue pour la profession ».
BIOSIMILAIRES : LA SUBSTITUTION, POUR BIENTÔT ?
Les travaux de l’année 2021 semblent bien partis pour donner corps à la substitution biosimilaire. Les avancées et les convergences de vue entre les différents acteurs (médecins, pharmaciens, laboratoires, associations de patients, pouvoirs publics), y compris parmi les plus réfractaires à cette substitution dont la position s’est assouplie, se cristallisent autour d’une possible substitution biosimilaire différenciée, limitée d’abord à certaines molécules, les plus anciennes et les moins complexes, et à l’initiation d’un traitement par médicament biologique. On parle alors de « petite substitution », à laquelle sont favorables les génériqueurs de l’association Générique même médicament (Gemme). Le droit de substitution biosimilaire à l’officine pourrait ainsi faire son come-back dans le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) après qu’il a été abrogé par la LFSS pour 2020, celui-ci figurant comme levier d’économies à hauteur de 10 M€ dans le rapport annuel charges et produits de l’Assurance maladie présenté le 25 juin 2021. Un tel droit, pour fonctionner, devra s’inscrire dans une démarche associant tous les professionnels de soins autour du patient afin de créer les conditions d’une confiance durable et d’éviter de reproduire les erreurs commises avec les génériques (opposition des acteurs, défiance des patients, etc.).
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