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L’idée fait son chemin
La responsabilité sociétale des entreprises – la RSE – a longtemps été la seule affaire de quelques grands groupes ou start-ups. Désormais, toutes sortes de sociétés entament une démarche en ce sens. Les groupements d’officines commencent aussi à s’y mettre, sans faire de bruit. Y compris auprès de leurs adhérents.
RSE ?
Kesako ? Plus de 9 Français sur dix butent sur cet acronyme. Aujourd’hui, la Responsabilité Sociétale des Entreprises fait son chemin chez les patrons de sociétés et le sujet interpelle des groupes du CAC 40 comme des TPE, quel que soit le domaine d’activité. Objectif : se donner les moyens d’avoir « un impact positif sur la société tout en étant économiquement viable », comme le définit le Ministère de l’économie, des finances et de la relance. L’ambition de ce vaste chantier, prometteur de sens sur le plan social, environnemental et économique, consiste aussi en un développement durable, respectueux de la planète et de tous. Si les groupements d’officines y sont aujourd’hui sensibles, ils restent toutefois discrets et en parlent peu (voire pas) à leurs adhérents. « Ce sera le sujet d’après », estime Laëtitia Hible, présidente de l’association spécialisée dans la diffusion des « bonnes pratiques d’organisation et de services au patient » Pharma Système Qualité (PHSQ), en faisant référence à la période “post-Covid-19”. Toutefois, signe des temps, PHSQ a lancé un Guide Pharmacie Ecoresponsable, début 2021. « Il y a un vrai consensus autour du pourquoi l’éco-responsabilité à l’officine. La difficulté, c’est le comment », résume Laëtitia Hible, qui croit dans le rôle clé des groupements pour accompagner les titulaires dans une démarche RSE.
CONNAÎTRE SA RAISON D’ÊTRE.
Jérôme Escojido, co-fondateur de Mediprix, indique d’emblée avoir pour objectif d’être « le premier groupement de pharmacies à devenir une entreprise à mission ». Cette spécificité permet à une société de « déclarer sa raison d’être à travers plusieurs objectifs sociaux et environnementaux », précise Bercy. Chez Mediprix, cet été fut mis à profit pour définir sa raison d’être. Elle tient en trois phrases ambitieuses : “Valoriser la Pharmacie française en impulsant dès aujourd’hui des officines surprenantes, expertes & solidaires !” ; “Mettre les patients et nos équipes au cœur de notre engagement en permettant à chaque Français d’être écouté, conseillé et soigné par des professionnels de santé engagés” ; et soyons fous, que “ce modèle de performance & d’indépendance du pharmacien s’impose pour le bien commun.” « S’engager pour les patients est impossible sans favoriser le bien-être des équipes. De plus, il faut préciser sur quoi porte son engagement, car on ne peut s’investir sur tout », résume Jérôme Escojido. Ainsi, Mediprix privilégie désormais les associations contre une maladie, qui, au-delà d’un coup de pouce financier, demandent une implication du staff, par exemple, dans une course à pied.
L’ENVIRONNEMENT AU CŒUR DU SUJET.
Sans surprise, Pharm O’naturel mise prioritairement sur son engagement environnemental. Outre, les critères de naturalité et de durabilité des produits référencés, le réseau s’attache à limiter son empreinte carbone sur les déchets, ses achats et le transport. Sous l’impulsion de Denis Fragne, l’associé directeur général délégué en charge du développement du groupement, le réseau répond depuis trois ans aux critères de la norme Envol (Engagement volontaire de l’entreprise pour l’environnement), conçue pour les TPE. Cette année, il va plus loin encore en proposant aux adhérents un aménagement créé en partenariat avec un agenceur de magasin en bois français, fervent du développement durable. Son nom : Mobil Wood. Pour chaque agencement, cette société s’engage à replanter des arbres. Le réseau fait de même. Tout comme les officines candidates au nouveau concept, à l’image de celle de Saint-Omer (lire le reportage page 10). Mine de rien, les adhérents sont incités à emboîter le pas de la RSE.
CAPITALISER SUR L’HUMAIN.
Chez Pharmodel, on ne se détourne pas de ses trois valeurs originelles : “l’engagement humain, l’audace de réinventer, la passion de réussir”. Depuis le début, la politique en matière de ressources humaines fait partie intégrante de la politique RSE. « L’entreprise prend en charge la moitié des adhésions à un club de sport ; un coach vient chaque semaine pour une heure de gym au siège, un cours accessible à distance pour les commerciaux ; un masseur vient tous les mois avec son matériel pour des séances individuelles de 15/20 minutes ; ponctuellement on a fait intervenir un sophrologue, un consultant sur la bienveillance… », égrène Rafael Grosjean, président et fondateur de Pharmodel Group (36 salariés, dont 25 au siège). Dans la même veine, la société a doté ses salariés de grands écrans pour éviter la fatigue oculaire. Elle fait également attention à la qualité des sièges pour maintenir une bonne position assise. Des œuvres d’art sont régulièrement achetées sur le site Catawiki (aux enchères) et exposées… « Pour les commerciaux, nous avons aussi des objectifs de sécurité et écologiques avec des stages de conduites plus sûres, plus respectueuses de l’environnement », poursuit le dirigeant, qui planche sur un accord de télétravail. Résultat, le « niveau de turnover est extrêmement faible », assure-t-il. C’est encourageant.
EN MODE “DÉFRICHAGE”.
D’autres groupements sont en plein défrichage. Intégré au sein du groupe McKesson France Retail depuis moins de trois ans, PHR mène, comme les autres enseignes du groupe, une enquête annuelle sur la satisfaction des salariés, la communication de la direction sur la stratégie, mais aussi sur les différentes démarches RSE de l’entreprise. En fait, PHR a déjà démarré des actions tous azimuts. « L’entreprise a une démarche de tri des déchets, travaille sur la réduction de son bilan carbone, sur ses contrats avec des entreprises de nettoyage, sur les produits utilisés, etc. Nous disposons d’une “car policy”, qui permet d’avoir un parc de véhicules moins polluants, nous encourageons le co-voiturage notamment lors du transport entre les différents sites du groupe. Concernant notre MDD, nous sommes vigilants sur les emballages en privilégiant quand c’est possible ceux à base de maïs, de sucre de canne, labelisés Ecocert. Nous sommes aussi partenaires de la société de recyclage de masques, Versoo, pour mettre en place un process chez nos adhérents. […] Nous avons également été sollicités pour réfléchir avec des laboratoires sur la mise en place du “vrac” et d’autres démarches éco-responsables auprès de nos officines adhérentes », énumère François Tesson, dg du groupe PHR depuis mi-2021. Reste à trouver un fil conducteur.
INSTAURER DES PROCESS.
Chez Objectif Pharma, « on débroussaille » également, selon les termes de Régine Martin, directrice marketing et communication du groupement de Welcoop. « Nous sommes en train de réaliser un audit de tout ce qui pourrait être mis en place, annonce-telle avant de lister quantité d’actions déjà existantes : Sur le plan social, l’entreprise fait attention au sens de la mission de chaque salarié, en instaurant des parcours d’intégration pour accompagner les nouveaux. Sur le plan environnemental, le menu comporte le choix de produits plutôt éco-responsables, made in France, la location de voitures des commerciaux renouvelée tous les trois ans pour des véhicules optimaux en termes de bilan carbone, la préférence pour faire parvenir les produits plutôt en train ou en bateau jusqu’à la plateforme logistique… Les PLV de vitrine en PVC vont passer en carton recyclable, moins lourd. Et d’ici aux négociations 2022, nous devrions avoir une charte pour instaurer des critères RSE dans le choix de nos partenaires ». « Basé sur un technopôle, nous avons déjà adhéré à un plan de déplacement qui favorise le co-voiturage et les transports publics. Nous réfléchissons aussi à un accord sur le télétravail », ajoute-t-elle. Prochaine étape : « Instaurer des process ! ».
VIVE LE “MADE IN FRANCE” !
« Une enquête menée en juin 2020 a révélé que 90 % des adhérents Pharmavie considéraient “la RSE comme une démarche importante” et “qu’un projet groupement officine était essentiel”. « Ces réponses ont donné le “la” pour plancher sur nos axes de travail » révèle Laurence Dubois, directrice marketing et services du groupement. Concernant les marques maison, « le made in France est un prérequis, et ce jusqu’à l’ingrédient pour l’hygiène. Toutefois, ce n’est pas toujours possible pour les compléments alimentaires ». Par ailleurs, le groupement travaille depuis deux ans avec la start-up Phenix, spécialisée dans l’anti-gaspillage (lire l’article “Gaspillage : La chasse est lancée”, p.6, PHM 213). « 26 000 produits ont été donnés aux Restos du cœur de la Sarthe en 2020 et 29 000 à la Banque alimentaire de Lille cette année », calcule Laurence Dubois. Dans un autre registre solidaire, Pharmavie a sorti, en 2020, un pansement dont la vente a permis de reverser 10 000€ à l’association L’hôpital de mon Doudou, partenaire du groupement depuis 2015. « L’opération sera reconduite en 2022 avec quatre produits », révèle-t-elle. Concrètement, les groupements se mettent en ordre de marche, mais sans l’afficher à grand renfort médiatique. « A ce jour, aucun groupement ne dispose d’un plan vérifiable RSE – une charte ne constituant pas un engagement -, précise Olivier Toma, fondateur de l’agence spécialisée dans le coaching des entreprises en RSE Primum Non Nocere. A quand un groupement qui aurait l’idée de former des éco-conseillers pour les patients ? L’ impact sociétal serait majeur et le taux de fidélisation de la clientèle n’en serait que boosté », s’interroge-t-il. Autrement dit, la RSE des groupements n’est pas pour l’heure vue comme un nouveau vecteur de croissance pour leurs adhérents.
infos clés
1 L’engagement RSE est désormais pris en compte dans quantité de décisions des groupements, mais sans vraiment le mesurer.
2 Les réseaux parlent peu de RSE à leurs adhérents, même si certaines de leurs actions s’inscrivent dans la démarche.
3 Les efforts concernant l’aspect environnemental sont nombreux. Plus rares sont les intiatives qui concernent les pans sociétaux (notamment RH) et le modèle économique.
En plus
Nouvelles formations RSE pour l’officine
Une formation RSE vise essentiellement à donner aux salariés les connaissances et les compétences pour contribuer à la transformation durable de leur entreprise, en intégrant dans leurs métiers les enjeux du développement durable. Pour former des « référents RSE en pharmacie », l’agence Primum Non Nocere a créé une offre de e-learning, avec validation des acquis à l’issue des 14 modules de 30 minutes. A cela s’ajoutent des classes virtuelles, pour des échanges d’expérience. L’enjeu : un certificat de connaissance. Tarif : 450€.
Formation spécial top management
La Fédération du commerce coopératif et associé (FCA) s’est dotée d’une “commission RSE” pour accompagner ses adhérents, parmi lesquels les groupements Astera, Elsie Santé, Giphar, Giropharm, Objectif Pharma, Totum Pharmaciens… Des réunions de travail et des ateliers sont organisés dans ce cadre, depuis 2020. Une formation à destination des présidents et directeurs généraux des groupements sera organisée le 14 décembre sur le thème “Comprendre les enjeux de la RSE”.
Le label “Engagé RSE”
Le Label “Engagé RSE” évalue la maturité des démarches RSE sur la base de l’ISO 26000. C’est un outil de réflexion stratégique et d’appropriation des enjeux RSE, de mobilisation interne, de pilotage pour construire, structurer et améliorer sa démarche RSE, de valorisation pour crédibiliser sa démarche RSE auprès des parties prenantes internes et externes. AFNOR Certification réunit aujourd’hui une communauté de plus de 220 organisations labellisées en France et à l’international et plus de 600 organisations engagées dans le parcours de solutions “Engagé RSE”.
35 %
de Français seulement estiment que les entreprises respectent leurs engagements en RSE.
Source : Baromètre Obsoco/Trusteam Finance.
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