- Accueil ›
- Préparateurs ›
- Métier ›
- Les cabines poussent les murs
Les cabines poussent les murs
Devenues prioritaires dans le cahier des charges lors d’un transfert ou d’un réagencement d’une pharmacie, les cabines de confidentialité doivent désormais s’intégrer dans le parcours client, sans rogner pour autant sur les mètres linéaires. Un défipour les agenceurs qui doivent souvent faire preuve d’imagination afin de pousser les murs de l’officine…
Tous les agenceurs s’accordent à le dire : les cabines de confidentialité occupent désormais une place de choix dans les projets de réaménagement ou de transfert d’officines. « Il y a cinq ans, lorsque les titulaires devaient faire des concessions faute de place, ils renonçaient en général à la cabine prévue pour préserver leur mètre linéaire. Aujourd’hui, c’est le contraire. Ils n’hésitent plus à sacrifier des rayons pour avoir les deux cabines inscrites au cahier des charges dès que la pharmacie dépasse 150 m2 de surface de vente, et jusqu’à trois ou quatre pour celles qui disposent de plus de 250 m2. Ceci étant dit, le rôle d’un bon agenceur, c’est d’imaginer des solutions pour éviter de sacrifier de la surface d’exposition ! », admet Joris Bloyet, directeur général de JBCC Agencement. Un transfert et/ou un agrandissement constituent pour les agenceurs la configuration idéale. « Les cabines étant devenues l’un des axes prioritaires, les pharmaciens prévoient une surface de vente suffisamment grande pour pouvoir en accueillir trois ou quatre. Ce qui nous laisse le champ libre en matière d’agencement », confie David van Acker, directeur général de Mobil M. Titulaire de la pharmacie du Lac à Saint-Paul-lès-Dax, Yannick Dubaquié a choisi d’aménager quatre cabines, lors de son transfert, il y a deux ans. Transfert qui lui a permis de passer de 90 à 370 m2 de surface de vente. « Dans une zone froide dédiée au MAD, nous avons aménagé une première salle consacrée uniquement à l’orthopédie. La seconde se situe, elle, dans l’espace de parapharmacie. Nous l’utilisons pour les animations dermocosmétiques et les essayages en contention ». A côté des comptoirs, se trouve l’espace consacré à la vaccination, aux entretiens pharmaceutiques et aux soins de premiers secours. « Ma mère ayant eu deux cancers du sein, j’ai décidé de me spécialiser dans l’accompagnement des patientes atteintes de cette maladie. Nous avons donc aussi aménagé un espace de 17 m2 avec une cabine d’essayage pour la lingerie, les maillots de bain, les prothèses mammaires et l’appareillage pour lymphœdème », dévoile Yannick Dubaquié.
AVEC OU SANS TRAVAUX ?
Lors d’un réagencement, les agenceurs sont le plus souvent confrontés à deux cas de figure. « Lorsque le titulaire accepte de réaliser de gros travaux, nous pouvons, un peu comme lors d’un transfert, partir d’une page blanche », souligne Joris Bloyet. En revanche, lorsque le pharmacien veut juste aménager une ou deux cabines dans une surface de vente où le mètre linéaire est déjà bien optimisé, l’agenceur doit alors se livrer à un numéro d’équilibriste. « Nous sommes en général confrontés à un triple challenge, confirme Patrick Laurency, responsable commercial pour la région Nord Ouest de Boursin Agencement. Nous devons pousser les murs de l’officine pour faire de la place aux cabines souhaitées par le titulaire, tout en les identifiant dans le parcours client, et en respectant les contraintes réglementaires d’accessibilité. Ces cabines doivent en effet s’inscrire dans le développement de la surface de vente, avec une circulation aux normes depuis la porte d’entrée afin que les personnes à mobilité réduite puissent y accéder ». Lorsqu’il faut pousser les murs, le premier réflexe est de rogner sur le back-office. « Certains titulaires investissent dans un robot afin de gagner les 5 à 6 m² qui leur permettront d’aménager leur cabine sur le point de vente », confirme David Van Acker. Mais lorsque celui-ci est déjà réduit à sa plus simple expression, il faut alors accepter de sacrifier des mètres linéaires. « En sachant que dans les petites pharmacies disposant de 40 ou 50 m2 de surface de vente, vous ne pouvez pas retirer d’univers car ces officines sont déjà au minimum vital en matière d’exposition », rappelle Michel Julin, directeur France de TH Kohl. Patrick Laurency conseille alors aux pharmaciens de déplacer les linéaires de produits fonctionnant le moins bien.
OPTIMISER SON MERCHANDISING.
« En général, les petites officines ont beaucoup de mal à être compétitives en termes d’offres sur le libre service, souligne-t-il. Nous les transférons donc dans la zone centrale pour permettre l’implantation d’une ou deux cabines. Pour récupérer de l’exposition, nous aménageons aussi des inter-comptoirs équipés et des présentoirs intégrés ». Un travail d’optimisation du merchandising peut aussi générer un gain de place appréciable. « Univers par univers, le titulaire doit s’interroger sur les références qu’il doit conserver, et celles dont il peut se passer. Le simple fait de réduire la voilure un peu partout vous fait en général gagner le mètre carré qui vous manque… », assure Joris Bloyet. Il est également possible de jouer sur la taille des cabines. Mais l’exercice a ses limites. « Pour des questions réglementaires, les cabines doivent avoir une taille suffisante pour qu’un fauteuil roulant puisse tourner sur lui-même, rappelle Joris Bloyet. Il est donc très compliqué en termes de confort de descendre en deçà de 1,5 m2. La moyenne des cabines que nous installons aujourd’hui tourne autour de 6 m2, la plus petite que nous ayons dessinée faisant 4 m2 ».
SANS CONCESSIONS…
Lorsque les titulaires refusent de sacrifier des mètres linéaires ou de l’assortiment, il faut trouver d’autres alternatives. Augmenter la hauteur des gondoles en les faisant passer d’1,20 m ou 1,40 m, à 1,60 m ou 1,80 m peut constituer une solution. Certains préfèrent jouer la carte de la polyvalence. Lors des travaux d’agrandissement de son officine réalisés il y a deux ans pour passer de 100 à 240 m2 de surface de vente, Laure Vincent, titulaire de la pharmacie de la Viette à Pompaire, dans la banlieue de Parthenay (Deux-Sèvres), a fait le choix d’aménager deux cabines « multifonctions ». « Dans la première, qui est installée à côté des comptoirs, nous accueillons les patients attristés parce qu’ils viennent d’apprendre qu’ils sont malades, ou qui ont besoin de soigner un petit bobo. Et comme elle est aussi équipée d’une table escamotable, nous nous en servons aussi pour pratiquer la vaccination », précise la titulaire. La seconde cabine est située à l’opposé, dans le grand show-room de 60 m² dédié au matériel médical, à l’orthopédie et aux prothèses mammaires. « Dans cette salle qui nous sert à réaliser les essayages, nous avons aussi installé une station de téléconsultation et un lavabo pour y pratiquer la vaccination lorsque l’autre cabine est déjà occupée », confie Laure Vincent.
PETIT MAIS CONFORTABLE.
L’espace dédié aux cabines peut lui aussi être optimisé. « Les officines situées en désert médical nous demandent de plus en plus de disposer d’un espace dédié à la téléconsultation, note Patrick Laurency. Pour les plus petites surfaces, plutôt que prévoir deux cabines de 6 m2, nous en aménageons une de 10 m2 qui pourra être divisée en deux via une cloison coulissante. Ainsi l’équipe peut, en cas de besoin, accueillir en toute confidentialité deux patients en même temps, tout en disposant la majorité du temps d’un grand local bien plus confortable ». Enfin, en dernière extrémité, les agenceurs en sont parfois réduits à positionner la cabine dans un endroit où on ne l’attend pas. « Parfois, nous n’avons pas d’autres alternatives que de la placer dans la vitrine, confie Michel Julin. Un système de stores ou de cloisons occultants assurent la confidentialité côté rue et point de vente lorsque la cabine est occupée, et se retire le reste du temps pour que les passants puissent voir l’intérieur de l’officine et les produits exposés ». Tous les moyens sont bons pour gagner ces précieux mètres carrés. D’autant qu’avec la crise sanitaire et les missions qui en découlent (vaccination anti-Covid-19, test antigénique…), la cabine de confidentialité est partie pour s’intaller dans la durée dans le paysage officinal.
infos clés
1 Les cabines de confidentialité doivent se fondre dans le parcours client, tout en respectant les contraintes réglementaires d’accessibilité.
2 Rogner sur le back-office, lorsque c’est possible, permet de gagner de précieux mètres carrés sur la surface de vente.
3 Un travail d’optimisation du merchandising peut générer un gain de place substantiel.
4 Dans les petites officines, jouez la carte de la polyvalence et de la modularité.
Misez sur le modulaire
Dans l’optique d’économiser l’espace, certains agenceurs font le choix du mobilier modulaire. « Il existe des tablettes rabattables qui peuvent être dépliées lors d’une vaccination ou d’un test antigénique et repliées lorsque le pharmacien a besoin d’effectuer un essayage en orthopédie », note Joris Bloyet de JBCC Agencement.
En plus
Un investissement rentable ?
Dans son officine, Laure Vincent ne regrette pas d’avoir investi dans ses deux cabines. « N’étant pas soumise à la pression foncière, je n’ai pas calculé la rentabilité de ces deux espaces, confie la titulaire. Cela nous a permis de proposer de nouvelles activités, les prothèses mammaires et la télémédecine, et de pratiquer de manière plus confortable la vaccination, la contention et le matériel médical ». Dans sa pharmacie à Saint-Paul-lès-Dax, Yannick Dubaquié se montre aussi satisfait de ces changements. « Entre les prises de mesures pour la contention, les essayages et les animations en dermocosmétiques, la cabine orthopédie est très utilisée par l’équipe. La salle oncologie fait, elle, le plein tous les jeudis, deux filles se relayant pour accueillir les patientes sur rendezvous. Mais, elle est aussi utilisée de manière ponctuelle les autres jours. Enfin, la cabine vaccination n’a pas désempli pendant la période de vaccination anti-Covid-19 ». Le titulaire regrette même de ne pas en avoir aménagé une cinquième.
Des erreurs à éviter
A force de vouloir pousser les murs, on peut commettre des erreurs… « La principale est de ne pas disposer les cabines au bon endroit », estime Joris Bloyet . « Une cabine de confidentialité ne sert pas à stocker les cartons, ni de bureau au titulaire. Elle doit être utilisée pour sa fonction première, note David Van Acker, qui conseille aux pharmaciens de ne pas investir à moitié sur ces espaces. Installer un simple rideau apporte peu de garanties en matière de confort et de confidentialité et véhicule au final une mauvaise image de la pharmacie ». Quant à Patrick Laurency, il recommande aux pharmaciens de ne pas virer jusqu’au boutiste. « Certains souhaitent à tout prix positionner trois cabines d’application, alors que la surface du point de vente ne le permet pas. Dans ce cas, il est préférable d’aménager deux beaux espaces afin d’offrir à la patientèle une prise en charge dans un cadre agréable et confortable », conseille-t-il.
Merci docteur
Depuis qu’il a aménagé ses quatre cabines et propose de nouveaux services, Yannick Dubaquié constate que le regard des patients a changé : « Les gens ont l’impression d’être dans un cabinet médical. En partant, beaucoup nous disent “Merci docteur !“ ».
- Tests de dépistage du Covid-19 : les préparateurs ne peuvent plus les réaliser
- Tests Covid-19 interdits aux préparateurs : la profession interpelle le ministère
- Nouvelles missions : quelle place pour les préparateurs ?
- Sécheresse oculaire : quels conseils au comptoir ?
- Chaussures thérapeutiques de série : conseils pour une délivrance adaptée
- Pénuries de médicaments : la France et neuf États membres interpellent Bruxelles pour sécuriser l’approvisionnement
- Difficultés économiques : de quoi se plaignent les pharmaciens d’officine ?
- Bon usage du médicament : le Leem sensibilise les patients âgés
- Prophylaxie pré-exposition au VIH : dis, quand reviendra-t-elle ?
- Indus, rémunération des interventions pharmaceutiques, fraudes… L’intérêt insoupçonné de l’ordonnance numérique


