Carrefour : des cabinets dentaires et quoi après ?

© Getty Images/iStockphoto

Grande distribution Réservé aux abonnés

Carrefour : des cabinets dentaires et quoi après ?

Publié le 25 mars 2022
Mettre en favori

Aller chez le dentiste en faisant ses courses au supermarché, c’est ce que propose désormais le groupe Carrefour, qui a ouvert des centres dentaires dans certaines de ses galeries commerciales. Ou comment la GMS préempte la santé par tous les moyens.

« L’Union dentaire n’est pas contre les centres dentaires en général », rappelle Clément Neveu, son délégué général. « On a besoin de tout, des libéraux comme des salariés. Ce qui pose problème, ce sont les centres dentaires qui profitent d’un système d’association à but non lucratif alors que ce sont d’importants groupes financiers qui les créent », pointe-t-il.

Le syndicat est donc très inquiet de voir se développer des centres dentaires lancés par l’entreprise Carmila, gestionnaire des galeries commerciales entourant des supermarchés Carrefour.

Dans une enquête qu’il a menée pour l’Union dentaire, Clément Neveu relève que « la mécanique est bien huilée et plutôt alambiquée. Carrefour et des partenaires institutionnels investissent dans une foncière, Carmila. Cette dernière est co-créée avec une entreprise qui ouvre des centres dentaires sous la marque Vertuo Santé. Centres eux-mêmes implantés dans les galeries commerciales du supermarché gérées par Carmila. La boucle est bouclée. Le client – le mot patient n’étant jamais évoqué – n’y voit que du feu », détaille-t-il.

« L’objectif initial des centres dentaires, c’était de pouvoir donner accès à tout le monde à des soins dentaires, notamment à ceux qui en sont éloignés pour des raisons financières ou géographiques. Mais cela a été dévoyé par certains centres dentaires. Depuis le 100 % santé, l’accès financier au soins dentaires est facilité. Et les centres ouverts par Carrefour s’implantent dans des zones surdotées ou très surdotées, donc cela ne répond pas à la demande », souligne Clément Neveu.

Publicité

Il a notamment relevé des ouvertures à Perpignan (Pyrénées-Orientales), Nantes (Loire Atlantique) et Reims (Marne) dans des zones très dotées ou encore à Toulouse (Haute-Garonne), dans une zone surdotée.

Le syndicat note aussi une augmentation de 60 % d’ouverture de centres depuis 2017, dont la moitié en Ile-de-France. « Ce que nous critiquons, c’est la distorsion de règles entre ces centres et les chirurgiens-dentistes libéraux, qui n’ont pas les mêmes obligations et les mêmes contrôles », poursuit-il. « Aujourd’hui, des centres dentaires peuvent faire de la publicité alors que les libéraux ne le peuvent pas », illustre-t-il.

Logique marketing

Autre problème pointé par le syndicat : la recherche de rentabilité. « J’ai épluché la documentation de Carmila. Ils ne parlent pas de patients, mais d’expérience client. Le patient est juste une source de revenus, au bénéfice des partenaires et des actionnaires », note Clément Neveu, qui craint des pressions sur les salariés pour faire un maximum d’actes rémunérateurs. « Nous avons connu récemment des scandales, avec des centres Proxidentaire fermés et des patients mutilés. Est-ce qu’il faut attendre un nouvel énorme scandale, avant de faire quelque chose ? », questionne-t-il.