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La transmission du VIH

Publié le 1 avril 2022
Par Christine Julien
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Il faut continuer à parler du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et du sida car la méconnaissance et les idées reçues persistent, notamment chez les jeunes. Le Sidaction, du 25 au 27 mars, est une occasion d’ouvrir le dialogue.

Quatre constats

• Trop de jeunes parmi les nouveaux contaminés. Les personnes de moins de 25 ans représentent près de 14 % des nouvelles découvertes de séropositivité(1).

• Trop de jeunes mal informés et ignorants.

→ 33 % des jeunes Français de 15 à 24 ans s’estiment mal informés sur la maladie, soit 22 points de plus qu’en 2009(2). Les bien informés sont passés de 89 à 67 %.

→ 23 % n’ont jamais bénéficié d’un enseignement ou d’un moment d’information spécifique sur le VIH/sida lors de leur scolarité.

→ De plus en plus désinformés sur les modes de transmission. 24 % pensent que cela peut arriver en embrassant une personne séropositive, en hausse de 9 points par rapport à 2020. « Cet indicateur, parmi d’autres, suggère que la surreprésentation de la Covid-19 dans l’espace social et médiatique a entamé les connaissances sur la maladie », avance l’institut de sondage Ifop.

→ Les jeunes sont de moins en moins inquiets face au VIH/sida.

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→ Ils ont moins peur du VIH/sida : 63 %, contre 79 % en 2019. Et 41 % des sondés estiment qu’il y a de moins en moins de contaminations chez les 15-24 ans. Ce qui est faux !

→ Seulement 34 % des jeunes sexuellement actifs déclarent avoir utilisé systématiquement un préservatif lors d’un rapport (- 9 points par rapport à 2020).

• Des parents pas au top. Selon une enquête d’opinion réalisée en octobre 2021 par l’Institut CSA pour le Crips(3), les parents restent décontenancés face au VIH : 36 % d’entre eux seraient mal à l’aise si la personne qui garde leur enfant était séropositive. Et 27 % le seraient si un enseignant de leur enfant vivait avec le VIH, soit une hausse de 6 points depuis 2017. Ce taux grimpe à 38 % chez les moins de 35 ans (+ 5 points par rapport à 2017).

Comment se transmet le virus ?

Trois modes de transmission pour le virus de l’immunodéficience (VIH) responsable du sida sont identifiés. n La transmission sexuelle.

→ La transmission du VIH n’est pas systématique lorsqu’une personne a des relations sexuelles avec une personne infectée par le VIH. C’est la loterie. La transmission peut avoir lieu la première fois, lors du dixième rapport ou ne jamais se produire ! Cette probabilité dépend aussi de la personne séropositive, si elle a été traitée ou pas, si sa charge virale, c’est-àdire si la quantité de virus dans son organisme, est détectable ou pas (voir plus bas).

→ Elle a lieu principalement lors de la pénétration vaginale ou anale, parfois lors de la fellation selon les circonstances. Les muqueuses du gland, du vagin ou de l’anus sont en contact avec les muqueuses et les sécrétions du partenaire : liquide pré-séminal, exsudations vaginales, sang éventuellement en cas de règles ou de pénétration anale. L’éjaculation augmente le risque de transmission pour la personne pénétrée, le sang également pour la personne qui pénètre. Une infection sexuellement transmissible (IST) accroît le risque de transmission pour les deux.

→ Les rapport oro-génitaux. Faire une fellation à un homme porteur du VIH peut comporter un risque faible de transmission en cas de contact entre le sperme ou le liquide pré-séminal et la muqueuse de la bouche pour celui ou celle qui suce. Le risque est plus important en cas de gingivite, angine, candidose, plaie ouverte récente (soins dentaires…) ; si la personne qui suce a des lésions buccales liées à une IST ; si l’homme sucé est primo-infecté (dans les semaines suivant sa contamination par le VIH, la charge virale est très importante). Selon Sida info service, « on ne peut pas considérer que le fait de se faire sucer est une pratique à risque réel en dehors des pratiques collectives ».

→ Ne sont pas à risque : l’anulingus, c’est-à-dire lécher l’anus d’une personne séropositive ; en revanche, il y a un risque d’attraper un herpès, l’hépatite, la syphilis et une gonococcie (voir Ordo p. 56). Les doigtés, le fait d’enfoncer ses doigts dans le vagin ou l’anus d’une personne, ne comportent pas de risque de transmettre ou de se contaminer par le VIH, même en présence d’ongles rongés ou de petites plaies aux doigts. Le cunnilingus n’est pas une pratique à risque pour le VIH. Une femme qui reçoit un cunnilingus d’une personne séropositive ne peut pas être contaminée car la salive ne transmet pas le VIH. Une personne qui pratique un cunnilingus peut en revanche s’infecter par la syphilis ou une gonococcie. Idem si l’on fait un cunnilingus à une femme séropositive.

• La transmission mère-enfant. Elle se fait essentiellement au moment de l’accouchement par voie basse ou césarienne, ou lors de l’allaitement, qui reste contre-indiqué en France. Malgré des données rassurantes sur le faible risque de transmission d’un allaitement sécurisé par les antirétroviraux chez la mère ou l’enfant pendant la durée de l’allaitement, le risque résiduel de transmission n’est pas nul.

• La transmission par voie sanguine. Elle a lieu lors du partage du matériel d’injection chez les usagers de drogues, d’échange de paille pour sniffer et en cas de piqûre accidentelle avec du matériel contaminé pour les professionnels de santé ou quelqu’un qui marcherait sur une seringue récemment utilisée…

Ce qui empêche ou limite la transmission

• Le TASP, pour Treatment as Prevention, désigne le fait de se traiter pour éviter la transmission. C’est un moyen prioritaire de prévention pour éviter la transmission mère séropositive/ enfant et lors de rapports sexuels entre deux partenaires séro-discordants, c’est-à-dire l’un séropositif et l’autre séronégatif. Une personne séropositive sous traitement antirétroviral avec une charge virale indétectable depuis plus de six mois ne peut pas transmettre le virus par ces deux voies.

• La PrEP, ou prophylaxie pré-exposition, consiste à prendre un médicament antirétroviral, emtricitabine/ténofovir disoproxil (Truvada et génériques), de manière continue ou discontinue pour éviter d’être contaminé par le VIH. Elle s’adresse aux personnes non infectées, à haut risque de contracter le VIH et qui n’utilisent pas systématiquement le préservatif lors de rapports sexuels. Cela concerne les hommes ayant de nombreuses relations avec d’autres hommes, mais aussi des prostitués hommes et femmes, ou des personnes qui subissent des rapports sexuels sans préservatif, des usagers de drogues par voie intraveineuse qui ne font pas attention… Les études montrent « qu’il n’y a eu aucun cas de transmission du VIH chez les personnes qui prenaient correctement leur PrEP »(1).

• Le TPE, ou traitement post-exposition, est une thérapie antirétrovirale administrée après une prise de risque. Idéalement, il est pris dans les quatre heures suivantes et au plus tard dans les 48 heures. Il se prend durant un mois.

Ce qui est à démystifier

• Il n’existe aucune technique, ni produit pour éliminer le VIH après des pratiques sexuelles bucco-génitales. Se rincer la bouche avec un antiseptique après une fellation ou un cunnilingus est inutile… La pilule et tout autre contraceptif ne protègent pas du VIH.

• Les moustiques ne transmettent pas le VIH. S’asseoir sur des toilettes après une personne séropositive, manger dans son assiette, partager ses couverts sont dénués de risque.

(1) Surveillance du VIH et des IST bactériennes, Bulletin de santé publique, décembre 2021.

(2) Les jeunes, l’information et la prévention du sida, enquête Ifop menée auprès d’un échantillon de 1 002 personnes, représentatif de la population française âgée de 15 à 24 ans, par questionnaire autoadministré en ligne du 11 au 17 février 2021.

(3) Le rapport des Français (es) au VIH/sida 40 ans après son apparition : évaluation des connaissances et des perceptions, enquête d’opinion réalisée par l’Institut CSA pour le Centre régional d’information et de prévention du sida et pour la santé des jeunes (Crips) en octobre 2021.

Le VIH en chiffres(1)

En 2020

→ 5,2 millions de sérologies VIH réalisées par les laboratoires de biologie médicale.

→ 4 856 découvertes de séropositivité : 69 % d’hommes, 30 % de femmes et 1 % de trans. Avec 43 % d’hommes ayant des rapports sexuels avec les hommes (HSH), 38 % d’hétérosexuels nés à l’étranger, 16 % d’hétérosexuels nés en France, 1,5 % d’usagers de drogues injectables et 1,5 % de personnes trans.

→ Classes d’âge : 14 % de moins de 25 ans, 64 % de 25 à 49 ans et 22 % de 50 ans et plus.

→ Principaux modes de contamination : rapports hétérosexuels (53 %), rapports entre hommes (42 %). Plus rares : usage de drogues injectables (1,5 %), rapports sexuels pour les personnes trans (1,5 %). Les hommes étaient majoritairement contaminés par des rapports sexuels entre hommes (62 %) et les femmes par des rapports hétérosexuels (98 %).

→ 30 % des infections à VIH ont été découvertes à un stade avancé de l’infection, ce qui constitue une perte de chance individuelle et un risque de transmission du VIH aux partenaires avant la mise sous traitement antirétroviral.

(1) Surveillance du VIH et des IST bactériennes, Bulletin de santé publique, décembre 2021.

Tous nos remerciements à Sida info service (sida-info-service.org).