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© Getty Images
Présidentielle : et si Marine Le Pen avait dû gérer la crise du Covid-19
Marine Le Pen explique dans les médias qu’elle aurait géré la crise sanitaire liée au Covid-19 « radicalement différemment ». Mettons alors à l’épreuve des données de la science ses propositions et ses commentaires sur la gestion – certes imparfaite – du gouvernement Macron.
A la question « Qu’auriez-vous fait de plus face à la crise du Covid-19 ? » posée par France Info début avril aux 12 candidats en lice pour l’élection présidentielle, Marine Le Pen (Rassemblement national), répond qu’elle « aurait fait complètement différemment ». Un message qu’elle martèle dans les médias depuis plusieurs mois. Reste que les mesures qu’elle aurait prises obéissent plus à de la démagogie qu’aux données de la science.
Les vaccins anti-Covid-19 « ne fonctionnent pas »…
Si Marine Le Pen reconnaît le bénéfice individuel du vaccin sur les formes graves de Covid-19 – elle-même n’hésite pas à révéler qu’elle est « triplement vaccinée » –, elle répète sur France Info ou aux heures de grande écoute dans une émission spéciale sur BFMTV, à quelques jours de la présidentielle, « que ce vaccin n’empêche pas d’attraper le Covid ni même de le transmettre ». C’est pour cela qu’elle n’aurait pas « obligé les gens à se faire vacciner ».
« L’équation qu’elle cherche à résoudre est de se poser en défenseuse des non-vaccinés, sans pour autant s’assimiler aux réseaux antivax. Ainsi se dit-elle favorable à la vaccination, tout en s’opposant au pass sanitaire puis au pass vaccinal, analyse Mélanie Heard dans un brûlot « Marine Le Pen et le Covid : deux ans d’incohérence » pour Terranova, publié le 12 avril. Mais l’argument qu’elle mobilise porte en réalité un coup sévère à la légitimité de la vaccination dans l’opinion. »
Que dit la science ? Que les vaccins anti-Covid-19 n’ont jamais prétendu être efficaces à 100 % contre les formes graves, contre l’infection et contre la transmission du virus. Initialement les vaccins, tous dirigés contre le virus originel (souche Wuhan), permettaient de réduire de l’ordre de 95 % le risque de formes graves et de 80 % le risque d’infection après deux doses. La protection à 6 mois tombe à 50-60 % mais remonte avec un rappel. L’arrivée de nouveaux variants change la donne. En novembre 2021, l’Institut Pasteur estime à 67 % l’efficacité de deux doses du vaccin contre le variant Delta. Puis Omicron s’installe. Les schémas vaccinaux s’adaptent. Par ailleurs, les scientifiques s’accordent à dire que la vaccination réduit le risque de transmission si une personne vaccinée est infectée de 50 %. Ce qui n’est pas rien dans un contexte de système de santé étouffé.
… mais il faut acheter des vaccins russes
Marine Le Pen a recommandé d’acheter des vaccins anti-Covid-19 russes. Le 2 février 2021, alors que The Lancet publiait des données intermédiaires de phase III revendiquant une efficacité de 91,6 % pour le candidat Spoutnik V, elle tweetait, sans attendre les données définitives et les recommandations européennes et françaises : « Maintenant que l’efficacité du vaccin russe #SputnikV ne fait désormais plus de doute, il peut être un renfort contre la pandémie. Travaillons en bonne intelligence avec la #Russie et ne laissons pas l’idéologie antirusse ruiner nos capacités à vacciner nos compatriotes ! »
Le vaccin russe Spoutnik V est en cours d’évaluation continue (rolling review) depuis le 4 mars 2021, et n’a toujours pas été approuvé par l’Agence européenne du médicament (EMA). Car l’Europe attend des données complémentaires sur la production, que la Russie ne fournit pas. A ce jour Spoutnik V n’est pas non plus validé par l’OMS.
La vaccination des soignants est « absurde »
« Je n’aurais pas exclu les soignants, sans salaire comme ils ont été exclus – enfin suspendus », explique précisément Marine Le Pen sur France Info. Mêmes propos lors du débat avec le président sortant ce 20 avril, où elle réitère sa promesse de réintégrer les soignants non vaccinés suspendus et de leur verser de manière rétroactive les salaires non versés – sans préciser si le versement est à la charge de l’employeur, ou non.
« C’est plus qu’une absurdité, c’est une vraie injustice », a également déclaré la candidate lors de l‘émission spéciale sur BFMTV le 22 mars, jugeant qu’il n’y avait « aucune raison sanitaire » à vacciner les soignants. Ce n’est pourtant pas la position de la Haute Autorité de santé (HAS) dans son avis du 16 juillet 2021, ni du Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale (COSV) dans son avis du 24 juin, ni même ce que démontrent les études scientifiques.
Rendre aux médecins leur « liberté de prescrire »
Dans son programme de campagne, Marine Le Pen promet de « rendre aux médecins leur liberté de prescription et d’expression », la crise sanitaire ayant été « un prétexte pour porter atteinte à l’autonomie de décision des médecins » qui ne pouvaient plus prescrire « de traitements médicaux ». Sous-entendu, les médecins ne pouvaient plus prescrire d’hydroxychloroquine dans le Covid-19, position qu’elle maintient encore aujourd’hui alors qu’il a été maintes fois démontré que ce médicament est inefficace dans cette indication, voire dangereux. Par ailleurs, la « liberté de prescrire » de l’hydroxychloroquine des médecins n’est plus entamée depuis le 11 juillet 2020 et la levée de l’encadrement particulier de sa dispensation, qui avait été mise en place pour faire face aux tensions d’approvisionnement provoquées par la hausse des prescriptions. « Depuis, la dispensation d’une prescription hors AMM pour le Covid-19 relève du droit commun », explique l’Ordre des pharmaciens sur son site.
Au total, ce qui aurait guidé Marine Le Pen pour gérer la crise sanitaire serait « à coup sûr, ni les fondamentaux de la santé publique, ni la solidarité nationale avec les plus fragiles, ni encore la confiance dans la parole des experts, réagit Mélanie Heard. Son opposition à la stratégie de l’exécutif est pavée de préférences systématiques en faveur du charlatanisme et axée sur la décrédibilisation des autorités. »
Finalement, c’est Robert Ménard, maire de Béziers (Hérault) et soutien de la candidate qui résume le mieux le propos sur Europe 1 en janvier dernier : « Sur les questions sanitaires, Marine Le Pen se trompe totalement ».
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