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© Getty Images
Pénuries de médicaments : le pouvoir de l’industrie pharmaceutique
Les pénuries sont-elles organisées par les laboratoires pharmaceutiques ? Oui, répondent les auteurs du documentaire « Médicaments : les profits de la pénurie », diffusé le 26 avril sur Arte, Xavier Deleu et Rozenn Le Saint. Un documentaire à charge contre l’industrie pharmaceutique.
L’enquête débute au sein de la pharmacie à usage intérieur (PUI) du CHU de Rennes (Ille-et-Vilaine). Les pharmaciens y sont confrontés à 69 ruptures de médicaments dont des antiinflammatoires injectables, des anticoagulants comme les héparines, des anticancéreux et des anti-infectieux. Sanofi, Octopharm, Mylan, Leo Pharma, Sandoz sont cités. « Trouver des solutions aux pénuries devient une activité chronophage », constatent les auteurs.
Le risque de tuer le business
De fait, en Europe, les ruptures d’approvisionnement ont été multipliées par 20 en 20 ans. Pourquoi ? C’est ce qu’essaie d’expliquer le documentaire à travers plusieurs exemples en France et à l’étranger. Les problèmes de prix sont ainsi évoqués. Le laboratoire danois ALK a interrompu ses approvisionnements en stylos injecteurs d’adrénaline en Espagne, alors même qu’ils étaient fabriqués dans le pays. La raison ? La baisse des prix passés de 34 € le stylo injecteur en 2011 à 24 € en 2018. « C’est prendre le risque de tuer tout notre business. Le prix le plus bas du marché sera à la fin le prix de tout le monde », n’hésite pas à déclarer devant la caméra le vice-président du laboratoire, Soren Niegel. L’Espagne, obligée d’acheter ce médicament à l’étranger durant trois ans, cède finalement en rétablissant le prix du stylo injecteur d’adrénaline à 34 €. D’autres laboratoires fixent des prix exorbitants comme Novartis avec sa thérapie génique, Zolgensma, à plus de 2 millions de dollars.
Le documentaire aborde aussi la mondialisation et les délocalisations notamment en Inde, les normes environnementales étant très strictes en Europe. Et de souligner la relocalisation de la production du paracétamol par Seqens à Roussillon dans l’Isère, financée en partie par l’Etat « malgré la santé éclatante des laboratoires », dixit le commentaire en voix off.
Enfin, il met en exergue la problématique des brevets qui permettent aux laboratoires d’engranger des milliards d’euros, en particulier avec l’exemple des vaccins contre le Covid-19 dont seuls les pays riches, en particulier européens, bénéficient.
Rapport de force
Durant une 1h30, les réalisateurs montrent les conséquences aux quatre coins du monde des pénuries sur les patients privés de traitements. Les faits sont avérés mais le constat aurait été plus probant si la construction du documentaire avait été plus rigoureuse. Par exemple, les réalisateurs déplorent la fermeture d’usines de production en Inde, par manque d’hygiène et de qualité. Une fermeture à l’origine d’une pénurie de médicaments. Quid de la santé publique ? De plus, en égrenant des situations qui n’ont rien à voir les unes avec les autres, le propos perd en clarté. Car le problème des pénuries est complexe. Le mérite du documentaire est cependant de pointer le pouvoir économique et politique des laboratoires pharmaceutiques, encore plus fort depuis la crise du Covid-19. « Les gouvernements ont laissé les clés de la maison à l’industrie pharmaceutique », regrette Pauline Londeix, cofondatrice de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament (OTMeds). Selon Yannis Natsis, directeur de l’ESIP (European Social Insurance Platform), les dirigeants des ilaboratoires pharmaceutiques téléphonent directement aux Premiers ministres et chef d’Etat. « Il s’agit maintenant de savoir comment rééquilibrer ce rapport de force », conclut-il.
« Médicaments : les profits de la pénurie », en replay sur Arte.TV
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