Délivrez bien et la vente suivra
Dispenser actif. Culture médicale et procédure sont les piliers de la délivrance active. Les conseils d’hygiène de vie sont le tremplin pour une vente associée. Et pour doper image et chiffre d’affaires.
La délivrance active
Une délivrance ou dispensation d’ordonnance doit être active, ce qui signifie centrée sur le patient et associée au conseil. Ce n’est pas une simple distribution de produits ! Le conseil au patient, ou conseil associé, « pourrait être l’entretien que le pharmacien [ou le préparateur, NDLR] conduit avec un patient au sujet des médicaments qu’il va prendre, pour l’éduquer à ce qui peut survenir en relation avec la prise du traitement et pour lui permettre d’en tirer le meilleur résultat »
Des avantages
→ Pour le client. La délivrance active favorise le bon usage du médicament, une gestion optimisée de sa maladie et le maintien de sa santé.
→ Pour vous. Elle valorise vos compétences, nourrit votre satisfaction professionnelle et casse la routine.
→ Pour l’officine. Elle pose la pharmacie comme un acteur incontournable de la santé. Elle fidélise les clients, et devient un facteur de croissance et de maintien des emplois.
En quatre étapes
Ouvrez le dialogue
« Bonjour. Comment allez-vous ? », puis « posez-vous », ordonnance en main, face au patient. Montrez votre intérêt : « Que vous arrive-t-il ? » ou « Comment se passe votre traitement ? » La réponse est déjà source d’informations. Puis, « Voyons ce que vous a prescrit le médecin… » et lire l’ordonnance à haute voix mais discrètement. La personne peut ainsi dire ce qu’elle a déjà à la maison, du paracétamol par exemple.
→ Optimisez le temps. Dites « Je vais chercher le traitement » parce que cela peut être long en l’absence de robot. Sinon, profitez-en pour recueillir d’autres infos : « Que vous a dit le médecin ? » en cas de maladie aiguë, ou « Avez-vous eu des difficultés à prendre votre traitement ce mois-ci ? » lors d’un renouvellement.
→ Un œil sur l’observance en cas de renouvellement. Si la personne vous dit « Ne m’en donnez pas, il m’en reste », enquêtez pour connaître la raison. Si le patient a zappé des prises, il faut identifier les causes et proposer des solutions. Effets indésirables, manque de motivation, à vous de trouver le moyen de l’inciter à prendre son traitement. Laissez un message sur sa fiche pour l’interroger le mois suivant.
Validez l’ordonnance
→ Vérifiez les paramètres et l’historique patient : pathologies associées, antécédents, automédication, co-prescription…
→ Tentez de comprendre les objectifs thérapeutiques : diminuer une inflammation, traiter une insuffisance cardiaque…
→ Repérez les principes actifs à risque d’effets indésirables graves : anti-vitaminiques K, anti-arythmiques… et les éventuelles interactions médicamenteuses.
Expliquez le traitement
→ Dites à quoi sert chaque médicament, en termes simples et valorisants. Préférez « Ce médicament ouvre les bronches pour mieux respirer » à « Ce bêta-2 agoniste de longue durée d’action agit dans la bronchopneumopathie chronique obstructive ».
→ Déterminez les horaires de prise en vous enquérant des habitudes de vie. Si le patient ne petit-déjeune pas, quel intérêt de lui dire de prendre tel comprimé en mangeant le matin ! Évoquez d’éventuelles interactions avec l’alimentation, les boissons et le tabac.
→ Avertissez des effets indésirables graves ou fréquents, en « positivant » si possible : « Il se pourrait que vous ressentiez des effets indésirables avec ce médicament. Le prendre en dehors des repas améliore sa tolérance digestive ».
Accompagnez
→ Donnez des conseils hygiéno-diététiques sur le traitement et la possibilité de leur mise en œuvre. Les règles d’hygiène concernent la toilette, la prévention d’une contamination, la posture, la musculature, l’activité physique et d’éventuels facteurs aggravants : soleil et acné, tabac et psoriasis…
→ Évitez le cours théorique et les « Il faut » en rafale. Le patient respecte certainement déjà quelques règles d’hygiène ! Posez des questions comme « Quel produit utilisez-vous pour vous laver ? » ou « Quelle quantité de liquide buvez-vous ? » Valorisez toujours ce que fait la personne : « Votre savon est très bien en dehors d’un épisode de mycose mais, dans votre cas, il serait préférable de vous laver avec un produit adapté durant le traitement ». Ainsi se profile la vente complémentaire…
Oser la vente complémentaire
Légitimez votre attitude
La vente d’un produit complémentaire à la prescription s’avère nécessaire si cela augmente l’efficacité, la tolérance, le confort d’utilisation ou la guérison. Toute ordonnance peut être associée à une vente de plus, mais elle doit être légitime. Pour cela, vous devez connaître les traitements et la pathologie, mettre en place des conseils efficaces et pratiques et donner la raison pour laquelle vous avancez telle solution : « Voilà ce que je peux vous proposer pour améliorer cela ». Le patient doit penser : « Il ou elle sait de quoi je parle ».
Piochez la bonne carte
L’analyse permettant, à terme, la vente complémentaire se mémorise par le sigle CARTE, pour Confort, Accessoire, Récidive, Tolérance et Efficacité
→ Améliorer le confort ? Justifiez un syndet dans une dermite séborrhéique : « Pour votre confort, le mieux serait d’utiliser un produit adapté à votre toilette ».
→ Favoriser le traitement ou son administration via un accessoire ? « Il existe des packs réfrigérants qui soulagent rapidement la douleur/des boîtes pour ranger son traitement et éviter les oublis. Les connaissez-vous ? »
→ Éviter la récidive de la pathologie en proposant un traitement de fond ? « Avez-vous tendance à avoir des rhumes ? Je peux vous suggérer un traitement de fond pour diminuer les récidives… »
→ Améliorer la tolérance du traitement ? « Avez-vous souvent des troubles digestifs avec les antibiotiques ? Je peux vous proposer de… afin de… »
→ Augmenter l’efficacité du traitement et prendre en charge des symptômes associés ? « Certaines plantes ou l’homéopathie peuvent contribuer à améliorer vos symptômes. Les connaissez-vous ? », « Contrôlez-vous votre pression artérielle ? Souhaitez-vous pouvoir le faire entre deux consultations avec un auto-tensiomètre ? »
Développez votre culture
Difficile d’aller à la bataille sans s’assurer de ses arguments.
→ Le minimum à savoir. Recensez les bases « vitales » sur les traitements, les pathologies et symptômes associés.
→ Un état d’esprit et un travail d’équipe. L’équipe peut se réunir, prendre au hasard quelques ordonnances, aiguës et chroniques, traitées dans la journée. Chacun réfléchit à tous les conseils qu’il aurait pu donner. Puis, désigner une personne responsable de mettre en commun les idées pour structurer la démarche sur quelques pathologies. Choisir les plus fréquentes dans sa pharmacie. Et en travailler trois sur six mois.
C’est une tâche de longue haleine, il ne faut pas être trop gourmand. Faire ensuite un tableau synthétique dans le back-office, une fiche étape par étape : « Que dois-je faire dans ce cas ? » Astuce : faire plancher les étudiants ou apprentis sur ces fiches et bannir l’aspect « cours théorique » ! Nos conseils : ressortez les articles et dossiers de la presse professionnelle, recherchez sur Internet, montez des dossiers pathologies/traitements…
Tracez vos actions
Notez dans « l’ordinateur » ce que vous avez proposé, ce que le patient a acheté, de façon à pouvoir reprendre la discussion une autre fois. Vous ou l’un de vos collègues…
Adopter la bonne attitude
Inspirez confiance
Soyez accueillant, courtois, le visage ouvert et souriant, la voix posée et la posture droite. Vous devez inspirer confiance !
Combattez vos freins
→ Les freins « techniques » concernent le manque de connaissances et de temps. La notion de temps est fonction des connaissances et des réticences du client, et de votre habileté. Pour limiter ce frein, se limiter à quelques questions ouvertes, qui offrent beaucoup d’informations, et choisir le conseil primordial garant du bon usage.
→ Les « psychologiques » : la peur du refus du patient (« Il connaît le traitement depuis vingt ans, je ne vais pas lui proposer quelque chose… »), la crainte d’ouvrir le dialogue sans avoir les bonnes réponses, ou d’outrepasser son rôle.
→ Agir. L’acte de vente n’est pas systématique, mais l’identification des besoins doit l’être : « Puis-je vendre quelque chose en plus ? » Toujours se demander : « Quel regard neuf vais-je pouvoir porter sur cette ordonnance ? Que faire pour combattre le frein “manque de temps’’ ? »
(1) Le dialogue pharmacien-patient, Mélanie J. Rantucci, collection Pro Officina.
(2) Le Conseil associé, tome 1 : à une ordonnance et Le Conseil associé, tome 2 : à une demande spontanée, Fabiole Moreddu, coll. Pro Officina.
Tout sauf ça !
• Filer, se taire ou dire seulement « Vous avez votre carte Vitale ? »
• Mal penser : « Il faut vendre trois produits pour une rhino » ou dire « Il vous faut ça ». Chaque produit est une solution à un problème.
• Vendre « à la tchatche ». Une vente doit toujours être motivée.
• Forcer un client. La timidité ou la peur de déplaire peut le pousser à acheter et à ne plus revenir !
• Parler du beau temps. Un client vous est reconnaissant de lui faciliter sa thérapeutique. Pour la météo, il y a d’autres spécialistes…
• Noyer le poisson avec des connaissances livresques. Usez d’images basées sur l’univers du patient.
• Tout aborder. Illusoire, soulignez l’essentiel.
• Faire en cinq minutes ce qui en nécessite vingt. Prenez votre temps si besoin ou donnez un rendez-vous pour en reparler.
• Attendre la demande spontanée. Qui est le professionnel de santé ? C’est à vous d’ouvrir le dialogue.