Bilans de prévention : pas si simples !

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Bilans de prévention : pas si simples !

Publié le 2 août 2024
Par Magali Clausener
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Généralisés en 2024, les bilans ou entretiens de prévention constituent une grande nouveauté pour les pharmaciens, médecins, infirmiers et sages-femmes. Ces professionnels doivent s’en emparer même si cette mission peut être complexe à mettre en place. Explications.

Actuellement réalisables, les bilans de prévention s’adressent aux assurés sociaux de quatre tranches d’âges : de 18 à 25 ans, de 45 à 50 ans, de 60 à 65 ans, de 70 à 75 ans – limite d’âge supérieure incluse. Pharmaciens, médecins, infirmiers et sages-femmes sont habilités à les réaliser. L’objectif ? Aborder les habitudes de vie, identifier des facteurs de risque de maladies chroniques (diabète, maladies cardiovasculaires, etc.), réaliser des dépistages (cancers, infections sexuellement transmissibles, etc.) et des rappels de vaccination, précise l’Assurance maladie sur son site internet. Pour les effectuer et signaler sa participation, le pharmacien s’inscrit sur sante.fr en se connectant via Pro Santé Connect. Grâce à ce site, les patients peuvent localiser les professionnels de santé impliqués proches de chez eux.

Risques et plan de prévention  

Selon l’Assurance maladie, quel que soit l’âge du patient, les entretiens de prévention doivent permettre d’aborder plusieurs thématiques : les antécédents médicaux personnels et familiaux ; les comportements et habitudes de vie (alimentation, activité physique, addictions et usages à risque, etc.) ; la prévention et le repérage de maladies chroniques (maladies cardiovasculaires, cancers, perte d’autonomie, etc.) ; le parcours de santé (vaccinations à jour, suivi buccodentaire, variation de poids, etc.) ; le bien-être mental et social (sommeil, vie affective et amicale, statut d’aidant, repérage des situations de violences et maltraitances, etc.). Pour ce faire, les patients peuvent récupérer un autoquestionnaire qui va les aider à préparer l’entretien avec le pharmacien. Celui-ci dispose aussi d’un livret et de différentes fiches pratiques. Il peut en outre suivre une formation.

L’entretien doit comporter trois étapes : le repérage des risques individuels, la priorisation conjointe d’un ou de deux sujets prévention, la rédaction du plan personnalisé de prévention (PPP). Le pharmacien doit ensuite transmettre au médecin traitant du patient le PPP et la fiche d’aide au repérage des risques. La durée d’un entretien est estimée entre 30 et 45 minutes. Les bilans sont pris à 100 % en charge par la Sécurité sociale, à raison d’un seul entretien par individu et par tranche d’âge, quel que soit le professionnel de santé qui l’a réalisé. La rémunération est identique pour tous les professionnels, soit 30 € en métropole et 31,50 € dans les départements et régions d’outre-mer. Pour le facturer, le pharmacien doit utiliser le code prestation RDP. Aucune autre prestation ne peut être ajoutée sauf si le patient a besoin d’une vaccination ou d’un kit de dépistage du cancer colorectal. Ces actes sont alors facturés en sus.

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Chronophages et mal payés  

Sur le papier, les entretiens de prévention séduisent les professionnels qui reconnaissent leur utilité. En pratique, la mise en œuvre est plus complexe. Avant la généralisation des bilans de prévention, une expérimentation a été menée entre octobre et décembre 2023 dans les Hauts-de-France, plus précisément dans six territoires : le département de la Somme et cinq communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Sur les 2 226 expérimentateurs potentiels, 53 professionnels de santé ont choisi de s’inscrire dans le dispositif, dont 15 pharmaciens, 17 infirmiers, 13 médecins généralistes et 8 sages-femmes. Finalement, 18 bilans ont été réalisés et 32 professionnels ont participé à l’évaluation de l’expérimentation. Pourquoi si peu d’expérimentateurs ? Plus des trois quarts des professionnels de santé évoquent le manque de temps disponible, notamment durant cette période (vaccination contre la grippe, le Covid-19 et les virus hivernaux), la tarification de 30 €, insuffisante par rapport au temps passé ou encore l’absence de coordination prévue avec le médecin traitant. Autre écueil, il paraît difficile d’être exhaustif lors d’un entretien de prévention. « Il me semble un peu limité. Nous avons donc pensé à utiliser et à compléter cet outil avec un questionnaire plus ciblé sur la nutrition et le sport », observe Eric Myon, pharmacien titulaire à Paris, président de la CPTS Paris 8 et secrétaire général de l’Union nationale des pharmacies de France. Des professionnels de la CPTS travaillent donc avec un nutritionniste à l’élaboration d’un questionnaire destiné d’abord aux 18-25 ans et aux 45-50 ans. « L’objectif, c’est d’établir un déroulé commun aux professionnels de la CPTS et, surtout, de pouvoir inscrire les patients dans un parcours de soins si l’effecteur du bilan se rend compte que la personne a des besoins spécifiques, comme une thérapie. ». L’une des principales vocations du dispositif est, en effet, cette intégration du patient tout en le rendant acteur de son bien-être.