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VERDIR SA PHARMACIE SANS VOIR ROUGE, UN DÉFI RÉALISABLE
Mise en place d’un programme de développement durable pour impliquer l’ensemble des équipes aux écogestes, actions de sensibilisation auprès des patients… La nouvelle convention pharmaceutique invite les pharmaciens à devenir des acteurs engagés dans la protection de l’environnement. Voici dix recommandations pour initier une démarche RSE et verdir ainsi son image auprès de la patientèle.
01. Privilégier un sourcing vertueux
« Lorsqu’une femme enceinte vient à la pharmacie pour acheter une crème contre les vergetures, elle est en droit d’attendre de son pharmacien qu’il l’oriente vers un produit ne contenant pas de paraben, de produits de synthèse, de nanoparticules ou de perturbateurs endocriniens, souligne Olivier Toma, fondateur de Primum non nocere, une agence spécialisée dans le conseil en responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et en santé environnementale qui a construit avec le laboratoire Pierre Fabre le label Très Haute Qualité sanitaire, sociale et environnementale (THQSE). Le titulaire doit donc mettre en place une politique d’achats visant à réduire au maximum les risques d’exposition à des substances potentiellement toxiques pour la santé humaine, aussi bien sur les produits de parapharmacie que sur les biberons ou les masques. En sachant qu’une telle démarche suppose de se former aux achats responsables pour apprendre à identifier les éléments à bannir dans la composition des produits. »
02. Un agencement écoresponsable
Dans les 70 officines Pharm O’naturel, tous les mobiliers respectent les dernières normes environnementales. « Pour notre concept global, nous avons choisi de travailler avec Mobil Wood, un partenaire qui s’engage à n’utiliser que des bois naturels 100 % français et à reverser 0,5 % de son chiffre d’affaires (CA) à des acteurs qui plantent des arbres afin de reconstruire l’écosystème, précise Denis Fragne, directeur général délégué de ce groupement. Pour le revêtement au sol, nous préconisons un PVC avec une base de bois recyclé, la pose et la finition se faisant uniquement avec des colles et des vernis écologiques. »
03. Limiter au maximum la publicité sur le lieu de vente (PLV)
Les points de vente Pharm O’naturel se veulent avares en communication. « Contrairement à la plupart des pharmacies, nous bannissons les écrans en vitrine, et nous nous refusons à multiplier les PLV et les supports de gradinage », explique Denis Fragne. Laëtitia Hible, présidente de Pharma Système Qualité (PHSQ), conseille, elle, de refuser toutes les PLV non voulues envoyées par les laboratoires. « Aujourd’hui, 40 % des présentoirs qui ne sont pas souhaités partent directement à la poubelle », regrette-t-elle.
04. Choisir des emballages en matières recyclées
Chez Pharm O’naturel, les emballages inutiles qui prennent de la place dans les rayons et dans la réserve sont proscrits. « Pour ce qui est des sacs que nous distribuons aux clients, ils sont toujours en kraft ou en papier recyclé », ajoute Denis Fragne. En outre, le groupement choisit de préférence les produits emballés dans des plastiques recyclés et sélectionne uniquement des fournisseurs engagés dans une démarche écoresponsable.
Tendance de fond dans le retail portée par les lois « climat » et « antigaspillage », la vente en vrac s’installe dans les rayons des magasins et change les habitudes de consommation. L’officine n’échappe pas à la règle et laisse émerger quelques initiatives à l’image, par exemple, de Mustela et Bioderma. Pour aller au bout de la démarche, il est en revanche important d’insister auprès des clients pour qu’ils ramènent leurs propres contenants à chaque nouveau remplissage. Par ailleurs, le concept du vrac n’est objectivement pas dénué de contraintes, notamment en matière de propreté, de conservation et de respect strict des règles d’hygiène.
05. Lutter contre le gaspillage
Dans une enquête réalisée en 2021, le magazine Capital affirmait que chaque pharmacie française jetait tous les ans l’équivalent de 15 000 € de médicaments et de produits de parapharmacie non périmés, soit un gaspillage de 1 milliard d’euros par an. Plutôt que de mettre aux déchets les produits avec une date limite de consommation inférieure à trois mois, les pharmaciens peuvent s’orienter vers des solutions de déstockage proposées par des sites et applications spécialisés, comme Le Comptoir des pharmacies, KéaBot, Medi-Destok ou TriMed’s, ou vers des associations caritatives pour des dons. « Afin de limiter ce gaspillage, il faudra aussi que les officines s’emparent de la dispensation à l’unité comme le prévoit la dernière convention pharmaceutique », rappelle Olivier Toma.
06. Le recyclage : on peut encore mieux faire !
« En pharmacie, le circuit de recyclage du médicament périmé ou non utilisé est plutôt bien organisé avec Cyclamed. Mais il y a encore des choses à améliorer ! », estime Laëtitia Hible. Il faudrait que les pharmaciens rappellent régulièrement à leurs patients qu’ils peuvent leur ramener les boîtes périmées ou non terminées, car trop de personnes gardent dans leur armoire à pharmacie la boîte d’antibiotiques dans laquelle il reste un fond ou jettent à la poublelle l’unidose de collyre non terminée. Ce qui constitue une aberration sur le plan écologique parce que tous ces médicaments polluent, même en petites quantités », détaille la présidente de PHSQ.
07. Valoriser certains déchets par des filières locales
« Les pharmaciens pourraient mettre en place des filières de revalorisation de certains déchets, comme les masques, la verrerie, les cartonnettes de médicaments ou les dispositifs médicaux contenant des piles, suggère Olivier Toma. Il suffirait qu’un titulaire fédère autour de lui 50 officines et quelques établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) pour instaurer ce type de filière sans que cela pénalise son compte d’exploitation. »
08. Economiser l’énergie
Plusieurs leviers peuvent être activés pour réduire la facture d’électricité de la pharmacie. « Supprimer tous les éclairages incandescents pour passer aux LED réduit la consommation d’électricité par six », évoque Olivier Toma. « La mise en place de capteurs de présence dans les pièces peu fréquentées, l’arrêt de l’éclairage de nuit en vitrine, ainsi qu’une baisse de + 1 ou + 2 °C du chauffage l’hiver et de la climatisation l’été peuvent aussi permettre de générer de substantielles économies », ajoute Laëtitia Hible. Pharm O’naturel a, de son côté, négocié des tarifs préférentiels auprès de fournisseurs d’énergie verte. « Cela implique de payer son électricité un peu plus chère, mais nous avons proposé cette offre parce qu’elle est cohérente avec l’ensemble de notre démarche », souligne Denis Fragne.
09. Des tournées plus écoresponsables
Le transport est l’activité qui contribue le plus aux émissions de gaz à effet de serre. « Pour faire baisser sa propre contribution, le pharmacien peut demander à son grossiste-répartiteur d’engager une démarche d’écoconception pour ses livraisons, en l’invitant à bannir les cartons qui arrivent tous les jours à la pharmacie à moitié vides, ainsi qu’à limiter le kilométrage et le volume des marchandises transportées, suggère Olivier Toma. Si les 21 000 pharmacies françaises s’engageaient dans cette voie, l’impact serait considérable. » Laëtitia Hible recommande, elle, aux titulaires, de privilégier les laboratoires qui passent par les grossistes-répartiteurs. « Ces derniers livrent déjà une ou deux fois par jour à la pharmacie. Or, beaucoup d’officines commandent également en direct aux laboratoires pour une boîte de bas ou une orthèse… Concentrer toutes ces livraisons chez le grossiste-répartiteur permettrait d’économiser un nombre de tournées considérable à l’échelle de la profession », assure la présidente de PHSQ.
010. Sensibiliser à la qualité de l’air intérieur
La mauvaise qualité de l’air intérieur dans les logements et les bâtiments accueillant du public coûterait chaque année 19 milliards d’euros à la Sécurité sociale. « Je connais un pharmacien qui a installé dans son officine un capteur de composants organiques volatils et affiche la qualité de l’air intérieur sur ses écrans, confie Olivier Toma. En plus, il a sensibilisé ses patients en les invitant à appliquer eux-mêmes une dizaine d’écogestes. En entrant dans une démarche vertueuse de conseil, ce pharmacien contribue à améliorer la qualité de vie et la santé de ses patients. »
LES ÉTUDIANTS DÉFENSEURS DU CONCEPT ONE HEALTH
« La nouvelle convention pharmaceutique prévoit quelques avancées sur le plan écologique. Toutefois, nous sommes loin du concept One Health que nous avons défendu pendant les négociations et qui vise à considérer la santé humaine, animale et environnementale comme un tout », regrette Numan Bahroun, président de l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (Anepf). Pour embarquer les pharmaciens dans cette démarche globale, les étudiants de l’Anepf ont imaginé une fusée à trois étages : faire du pharmacien d’officine un acteur de la sobriété pharmaceutique, mais aussi de la prévention et de la promotion en santé environnementale et limiter l’impact des activités officinales sur l’environnement. « Sur les trois axes que sont la mise en place d’une rémunération vertueuse pour recentrer l’acte pharmaceutique sur les besoins des patients, le droit de déprescription et la lutte contre l’écotoxicité des médicaments, nous avons vraiment essayé de pousser les mesures que nos adhérents appellent de leurs vœux pendant les négociations. Mais, finalement, l’écologie est un peu passée à la trappe », conclut Numan Bahroun.
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