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NOUVELLES MISSIONS : OUI, MAIS DANS QUELLE STRUCTURE ?

Publié le 25 juin 2022
Par Magali Clausener
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CPTS, MSP, ESP, Escap… Quelle est la structure la plus pertinente pour un exercice coordonné ? Une question qui se pose d’autant que celui-ci est devenu incontournable pour exercer de nouvelles missions et percevoir les rémunérations liées au développement du numérique en santé et à l’amélioration de l’accès aux soins.

L’exercice sera coordonné ou ne sera pas. C’est en tous les cas la volonté des pouvoirs publics. Et la stratégie Ma santé 2022, lancée en septembre 2018, en est le marqueur le plus visible avec l’annonce de la création de 1 000 communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) d’ici fin 2022 et le développement des maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP). Une volonté qui se traduit également dans les conventions et avenants conclus entre syndicats professionnels et Assurance maladie. Désormais, médecins, infirmiers et pharmaciens doivent participer à un exercice coordonné pour percevoir, en 2023, la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) pour le développement du numérique en santé et l’amélioration de l’accès aux soins. En outre, certaines missions officinales s’inscrivent dans le cadre d’un exercice coordonné. C’est le cas du pharmacien correspondant mais aussi de la participation à la téléconsultation et de la mise en œuvre de la dispensation sous protocole. Mais comment s’y retrouver entre les différentes structures de coordination interprofessionnelle ? Quelles sont celles qui sont les plus adaptées à l’exercice pharmaceutique ?

De l’ESP à la CPTS

L’équipe de soins primaires (ESP) constitue le premier niveau de l’exercice coordonné. Elle est formée autour du médecin généraliste et doit comprendre au moins un autre professionnel de santé qui partage la même patientèle sur un territoire donné. Elle est ainsi ouverte aux infirmiers, aux pharmaciens, aux masseurs-kinésithérapeutes, aux sages-femmes, etc. L’ESP peut prendre la forme d’une MSP ou d’un centre de santé, mais elle peut aussi rester plus informelle et, dans ce cas, chaque professionnel de santé continue d’exercer dans son cabinet. Cependant, quelle que soit sa forme, l’ESP doit élaborer un projet de santé commun comportant une ou des thématiques qui doit être validé par l’agence régionale de santé (ARS) : patients chroniques, personnes âgées, soins non programmés…

La MSP réunit aussi, généralement dans un même lieu physique, médecins généralistes et autres professionnels de santé. Elle assure des activités de soins de premier recours et, le cas échéant, de second recours. Elle participe à des actions de santé publique, de prévention, d’éducation pour la santé. Toute MSP doit aussi rédiger un projet de santé soumis à l’ARS. Le pharmacien peut faire partie d’une MSP même s’il est évidemment « hors murs ». D’ailleurs, plusieurs pharmaciens sont à l’origine de créations de MSP. A noter que l’ordonnance n° 2021-584 du 12 mai 2021 ouvre la possibilité aux MSP constituées sous forme de société interprofessionnelle de soins ambulatoires (Sisa) de salarier des professionnels de santé dans le but de faciliter leur recrutement, notamment dans les zones de faible densité médicale. En juin 2021, on comptait 1 889 maisons en fonctionnement et 366 projets de MSP, selon le ministère de la Santé.

La CPTS est le « dernier » niveau d’exercice coordonné. Elle regroupe les professionnels de santé d’un même territoire qui veulent s’organiser autour d’un projet de santé, en cohérence avec le projet régional de santé, pour répondre à des problématiques communes. Dans le cadre de l’accord conventionnel interprofessionnel (ACI), des missions socles et optionnelles sont définies, donnant lieu à un financement. Les CPTS couvrent parfois des territoires très larges, jusqu’à plus de 175 000 habitants. Elles peuvent aussi comprendre des ESP et des MSP et regrouper jusqu’à 300 professionnels de santé libéraux. En décembre 2021, on recensait 238 CPTS en fonctionnement avec un contrat ACI, soit un tiers de la population française couverte. Le pays compte aussi 27 CPTS « prochainement en fonctionnement » avec un projet de santé validé et 221 CPTS en cours de création, toujours selon le ministère de la Santé.

Seule l’implication du pharmacien dans une ESP, une MSP ou une CPTS ouvre droit au versement de la Rosp. Or nous sommes loin des 1 000 CPTS prévues en 2018 ! De fait, seulement 15 % des médecins sont membres de l’une de ces trois structures, alors que celles-ci dépendent de leur mobilisation.

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Escap game

Certes, la crise sanitaire a retardé nombre de projets. Surtout, leur faible déploiement est dû aux contraintes réglementaires, comme l’élaboration d’un projet de santé, et au peu de souplesse de fonctionnement de ces structures. Pour ces raisons, le syndicat interprofessionnel Les Libéraux de santé, qui regroupe 11 syndicats dont la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), propose la création d’équipes de soins coordonnées autour du patient ou Escap. Concrètement, si un médecin, un infirmier ou un kiné estime qu’un patient a besoin de soins coordonnés, il évalue sa situation avec une grille d’inclusion comprenant antécédents chirurgicaux, hospitalisations récentes, capacités en matière de mobilité, de continence, de fonctions cognitives… Ensuite, si les conditions sont remplies, il prend contact avec les autres professionnels (pharmacien, biologiste, orthophoniste, podologue, spécialistes, etc.) désignés par le patient pour créer l’Escap. Un outil numérique interopérable permet à tous de communiquer et d’échanger informations et données de santé. L’Escap ne dépend donc ni d’une patientèle partagée, ni d’un territoire, ni d’un projet de santé. Une solution simple qui pourrait séduire les professionnels libéraux. A condition que les négociations avec l’Assurance maladie concernant cette nouvelle structure, entamées en mars 2022, aboutissent.