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Une tumeur prostatique qui progresse
M. D., 70 ans, est sous leuproréline depuis trois ans pour un cancer de la prostate localisé à haut risque de progression. Suite à la hausse du taux du PSA, l’oncologue ajoute une hormonothérapie de deuxième ligne.
Ce que je dois savoir
Législation
L’apalutamide est soumis à une prescription initiale hospitalière valable un an et réservée aux spécialistes en oncologie et médecins compétents en cancérologie. Le renouvellement est possible par tout prescripteur durant la validité de l’ordonnance hospitalière.
Contexte
C’est quoi ?
• Le cancer de la prostate est le plus souvent découvert à un stade asymptomatique dans le cadre d’un dosage du PSA (voir Dico+). Diagnostiqué précocement, il est le plus souvent curable. Certaines formes sont plus à risque de progresser vers un stade métastatique.
• Un traitement est justifié chez les patients dont l’espérance de vie est de dix ans au moins car ce cancer évolue lentement en général.
→ En cas de tumeur à faible risque de progression, il repose sur une prostatectomie, une radiothérapie ou une curiethérapie (voir Dico+), voire une « surveillance active », avec dosage du PSA, IRM…, un traitement n’étant justifié qu’en cas d’ évolution de la maladie.
→ En cas de risque de progression intermédiaire ou élevé, une hormonothérapie est associée à la prostatectomie ou à la radiothérapie dont a bénéficié M. D. Cette hormonothérapie consiste à atteindre un taux faible de testostérone (≤ 0,5 ng/ml) afin de supprimer toute stimulation de cellules cancéreuses « résiduelles » (= suppression androgénique, voir Porphyre n° 576-577, juillet-août 2021).
L’hormonothérapie en pratique
• Reposant sur les agonistes ou les antagonistes de la GnRH, l’hormonothérapie est indiquée sur six ou dix-huit mois au moins en cas de tumeur à risque élevé de progression, cas de M. D.
• Une résistance à cette castration médicale survient très souvent après dix-huit à vingtquatre mois, voire plus. Caractérisée par une hausse du taux du PSA alors que la testostéronémie reste basse, elle nécessite d’ajouter une deuxième ligne de traitement : soit une nouvelle hormonothérapie, ce qui a été proposé au patient, soit une chimiothérapie par docétaxel en première intention.
Objectifs
L’augmentation du taux du PSA traduit une reprise de la maladie, avec un risque élevé d’apparition de métastases. L’ajout d’une hormonothérapie de deuxième ligne comme l’apalutamide à la phase de résistance à la castration allonge la durée de vie des patients.
Médicaments
Leuproréline (Enantone LP)
Cet agoniste de la GnRH induit, en cas d’administration prolongée, une diminution des gonadotrophines LH et FSH, et donc une baisse du taux de testostérone, qui devient équivalent à celui d’une castration médicale. En début de traitement, il y a une hausse transitoire des gonadotrophines et de la testostéronémie.
Apalutamide (Erleada)
Anti-androgène non stéroïdien périphérique de deuxième génération, l’apalutamide se fixe sur le récepteur des androgènes et inhibe la liaison des androgènes au récepteur. Cela permet de pallier des mécanismes de résistance.
Repérer les difficultés
• L’aggravation possible avec ce nouveau traitement des effets indésirables liés à la suppression androgénique : bouffées de chaleur, fatigue, dysfonction érectile… et les « silencieux » à l’origine de troubles cardio-vasculaires, avec hausse de la masse grasse, fonte musculaire, dyslipidémie, diabète, troubles de l’humeur et perte osseuse. M. D. est d’ailleurs sous antihypertenseur (candésartan) et hypolipémiant (pravastatine).
• Les autres effets indésirables de cette nouvelle hormonothérapie et le risque d’interactions médicamenteuses, l’apalutamide étant un inducteur enzymatique.
Ce que je dis au patient
J’ouvre le dialogue
« Le médecin a renforcé votre traitement. Que vous a-t-il dit ? » et/ou « Que donnent les dernières analyses ? » font le point sur l’évolution du cancer. « Le médecin a-t-il évoqué les effets indésirables de ce traitement ? », « Vous a-t-il recommandé une surveillance plus rapprochée de la tension artérielle ou un bilan avec votre généraliste dans quelques mois ? » vérifient les informations communiquées, et si une ordonnance de traitements symptomatiques, avec émollients, antidiarrhéiques…, a été proposée.
J’explique le traitement
Mécanismes d’action
• La leuproréline maintient un niveau bas de testostéronémie, essentiel pour limiter la prolifération des cellules tumorales.
• L’apalutamide renforce l’action de l’agoniste en court-circuitant des mécanismes de résistance mis en place par les cellules tumorales.
Mode d’administration
• Leuproréline : injections en sous-cutanée ou intramusculaire tous les trimestres par une infirmière ou un médecin, afin d’éviter des erreurs de manipulation lors de la préparation ou de l’injection.
• Apalutamide : prendre la dose de 240 mg en une seule prise quotidienne, toujours à peu près à la même heure, avec un verre d’eau, sans croquer ni dissoudre les comprimés.
Effets indésirables
• Leuproréline : réactions au point d’injection, bouffées de chaleur, fatigue, prise de poids, diminution de la libido, gynécomastie, douleurs articulaires. Moins fréquents : troubles métaboliques (diabète, hyperlipidémie…) et de l’humeur, allongement de l’intervalle QT. Au long cours, risque de fracture osseuse et augmentation des pathologies cardio-vasculaires.
• Apalutamide : fatigue, bouffées de chaleur, diarrhées, risque de chutes, prurit, sécheresse, urticaire et éruptions cutanées pouvant nécessiter une réduction des doses, voire un arrêt du traitement, et une hypertension artérielle. Moins fréquents : convulsions, cardiopathies ischémiques et allongement de l’intervalle QT.
J’accompagne
Observance
• Sensibiliser le patient à l’observance, essentielle à l’efficacité. Une prise en même temps que l’antihypertenseur et la statine est possible.
• En cas d’oubli ou de vomissements, prendre la dose manquée dès que possible le jour même.
Gestion des effets indésirables
• Pour optimiser la prise en charge de l’hypertension et de la dyslipidémie, conseiller une visite de suivi chez le médecin traitant quatre à six semaines après.
• Encourager l’exercice physique, bénéfique sur les risques cardio-vasculaires et osseux.
• Signaler au médecin la survenue de convulsions, d’éruptions cutanées ou de diarrhées qui ne s’améliorent pas malgré les mesures diététiques. Antidiarrhéiques, dermocorticoïdes et anti-H1 peuvent être prescrits.
Hygiène de vie
En cas de diarrhées, limiter fibres, céréales complètes, plats gras et café et s’hydrater régulièrement. Le paracétamol peut soulager les arthralgies, fréquentes sous hormonothérapie.
Vente associée
Un autotensiomètre, des produits d’hygiène doux (Cold Cream Avène, Gel nettoyant Jonzac…), un émollient pour calmer le prurit (Dexyane, Dexeryl Crème, Physiogel, Vea Lipogel…) et des solaires très haute protection (Anthelios UVMune 400 50+, Fluide Avène 50+, Medisun 50+, Uveblock 50+…).
Prescription
Dr M., oncologue. M. D., 70 ans, 1,71 m, 77 kg.
• Enantone LP (leuproréline) 11,25 mg
1 injection tous les 3 mois par l’IDE à domicile.
• Erleada (apalutamide) 60 mg 4 cp par jour en une seule prise. QSP 6 mois.
Dosage du PSA dans 3 mois.
Dico +
→ PSA (Prostate Specific Antigen) : glycoprotéine produite par la prostate et sécrétée dans le liquide séminal, présente en très petite quantité dans le sang, mais dont le taux sanguin augmente en cas de pathologie prostatique bénigne (hypertrophie prostatique, prostatite) et encore plus maligne.
→ Curiethérapie : technique qui consiste à implanter des grains d’iode radioactif dans la prostate.
Info +
→ Parfois, après un certain temps et malgré un taux bas de testostérone, la tumeur progresse. Cette phase de résistance à la castration ne signifie pas que les cellules tumorales ne sont plus hormonodépendantes, mais on constate des modifications du récepteur aux androgènes ou des sécrétions locales d’androgènes. Les hormonothérapies de nouvelle génération, tel l’apalutamide, contournent ces mécanismes de résistance.
Le patient me demande
« Je n’ai plus de Mopral pour soulager des remontées acides. Pouvez-vous m’en donner ? »
Les concentrations sanguines de l’oméprazole, substance active du Mopral, peuvent être diminuées par l’hormonothérapie. Je vous conseille un anti-acide ou un alginate, à prendre à deux heures de distance de vos traitements pour vous soulager. Parlez-en à votre médecin la prochaine fois. L’oméprazole fait partie des substrats des CYP 3A4 et 2C19, dont l’action peut être modifiée par l’apalutamide, inducteur enzymatique puissant de ces cytochromes. Les autres inhibiteurs de pompe à protons sont aussi concernés.
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