Prix des médicaments : entre contraintes budgétaires et financement de l’innovation, quel sera le gagnant ?

(Ré)Inventer l’économie du médicament : tel était le thème du colloque organisé par le Leem (Les entreprises du médicament) le 27 juin à Paris. Un sujet ambitieux qui a mobilisé des intervenants de marque : Jean Tirole, Prix Nobel d’économie et président honoraire de la Toulouse School of Economics (TSE), Philippe Bouyoux, président du Comité économique des produits de santé (CEPS), Dominique Libault, directeur de l’Ecole nationale supérieure de Sécurité sociale (EN3S) et président du Haut Conseil du financement de la protection sociale, Pierre Dubois, professeur de sciences économiques à TSE ou encore Margaret Kyle, professeure d’économie à Mines Paris…

Réinventer la régulation des prix des médicaments

Baisses de prix des médicaments, remises, clause de sauvegarde et maîtrise médicale, les outils de régulation existent déjà. Peut-on les réinventer pour à la fois tenir compte des contraintes budgétaires et de l’attractivité industrielle de la France ?

Corinne Blachier-Poisson, vice-présidente et directrice générale d’Amgen France évoque trois « tensions » financières : la première porte sur le maintien des dépenses dans une enveloppe fixée chaque année qui ne tient pas compte de l’arrivée des nouvelles substances actives sur le marché (30 à 40 en moyenne par an, voire plus de 50 l’année dernière) ; la deuxième concerne le financement des innovations et celui des réindustrialisations qui nécessite de revoir la politique de prix afin de les rendre plus attractifs pour les industriels ; la troisième s’exerce sur les coûts avec l’inflation.

Dominique Libault insiste, lui, sur le court-termisme du système de régulation. Quant à Philippe Bouyoux, il souligne le « challenge » de la régulation, qui ne doit pas se faire au détriment de l’innovation et des industriels, mais aussi la difficulté de n’avoir qu’un seul outil, le prix, pour répondre à de multiples objectifs. « Un défi encore plus compliqué en période de crise sanitaire et dans une situation où l’écart entre la croissance tendancielle et la croissance souhaitée des dépenses est en train de s’accroître », a expliqué le président du CEPS.

Ajuster les prix à la réalité…

Margaret Kyle insiste sur le fait qu’il faut « payer plus pour les innovations importantes et moins pour les innovations moins importantes ». Elle constate aussi le trop-plein de dépenses en France lié à l’insuffisance d’utilisation des génériques en regard des médicaments de marque. Pierre Dubois pointe les prix parfois trop faibles en France et critique le système de prix de référence prenant en compte les prix d’autres pays européens mais pas leurs modes de remboursement.

« Quels nouveaux outils de régulation alors que les économistes n’ont justement pas su trouver de solutions ? », s’interroge Jean Tirole. Pour autant, un consensus s’établit sur la prévention qui permettrait de réaliser des économies.