Vaccins bivalents anti-Covid-19 : accélération ou précipitation ?

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Vaccins bivalents anti-Covid-19 : accélération ou précipitation ?

Publié le 7 septembre 2022
Par Magali Clausener
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Le 5 septembre 2022, la Haute Autorité de santé (HAS) a annoncé qu’elle « publiera un avis global sur l’ensemble des vaccins bivalents » contre le Covid-19 après la mi-septembre. L’arrivée de cette nouvelle génération de vaccins s’accélère en effet. Les Etats-Unis n’ont pas attendu la fin des essais cliniques. Et en Europe ?

Dits « bivalents », les vaccins anti-Covid-19 de nouvelle génération ciblent la souche originale du Sars-CoV-2 et les variants Omicron. Proposés par Pfizer/BioNTech et Moderna, ils seront utilisés uniquement en rappel et non en vaccination initiale. 

Vaccins bivalents : dans le sillage de la FDA

Les premiers vaccins anti-Covid-19 bivalents validés en Europe concernent la souche originale et le variant Omicron BA.1 du Sars-CoV-2. Il s’agit en fait d’une déclinaison des vaccins utilisés depuis décembre 2020. Autorisés par l’Agence européenne du médicament (EMA) le 1er septembre, ils devraient être disponibles en octobre en France. Mais ce n’est pas tout : Pfizer/BioNTech et Moderna ont présenté aux autorités de santé deux autres vaccins bivalents ciblant cette fois les variants Omicron BA.4 et BA.5, qui circulent le plus dans le monde actuellement. Ces nouveaux vaccins ont été autorisés par l’Agence américaine du médicament (FDA) dès le 31 août, bien que les essais cliniques sur l’homme ne soient pas terminés. La décision de la FDA est basée sur les données concernant l’innocuité et l’efficacité des vaccins originaux et sur les essais cliniques menés pour les vaccins visant le sous-lignage BA.1. En Europe, l’EMA est en train de les évaluer.

Au départ, l’EMA n’était pas favorable à un enregistrement de ces vaccins sans données cliniques, mais la décision de la FDA l’a conduite à avancer l’examen mi-septembre de ces deux nouveaux vaccins bivalents.

Une accélération justifiée ?

Est-il nécessaire d’accorder aussi rapidement l’autorisation des vaccins bivalents ciblant Omicron BA.4 et BA.5 alors que les essais cliniques ne sont pas achevés ? « Nous avons pour l’instant très peu de données sur les essais cliniques de ces vaccins. Que l’EMA commence l’examen du dossier, pourquoi pas, mais qu’on les utilise sans avoir eu de données cliniques est un autre sujet », observe le Pr Mathieu Molimard, chef du service de pharmacologie médicale au centre hospitalier universitaire de Bordeaux (Gironde). Les essais cliniques permettent notamment d’évaluer la réponse immunitaire aux vaccins anti-Covid-19 et les effets indésirables, et d’ajuster les posologies.

Selon le Pr Mathieu Molimard, la situation diffère très nettement de celle de la vaccination antigrippale où, chaque année, les vaccins varient selon les souches en circulation et sont autorisés sans essais cliniques sur l’homme. « Nous avons 40 ans de recul pour la grippe contre 2 ans pour le Covid, explique Mathieu Molimard. De fait, nous connaissons bien la pathogénicité du vaccin contre la grippe. Surtout, nous pouvons prédire les souches qui vont circuler l’hiver suivant, en particulier parce que les épidémies de grippe ont d’abord lieu dans l’hémisphère Sud. Ce qui permet à l’Organisation mondiale de la santé d’indiquer la composition du futur vaccin. Ce qui est loin d’être le cas pour les variants du Covid. Est-ce le variant Omicron BA.4 ou BA.5 qui circulera encore cet automne ou un autre ? Nous n’en savons rien. »

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Alors est-il urgent d’attendre ? Dans son communiqué du 5 septembre, la HAS rappelle que « l’efficacité des vaccins monovalents est prouvée, y compris contre les variants qui circulent actuellement en France ».