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Cousins germains

Publié le 24 septembre 2022
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Si tous les textes réglementaires sont publiés et les conditions de rémunération du pharmacien définies, le nouvel enjeu économique va porter sur la substitution des « cousins germains » des génériques, les médicaments hybrides (des molécules tombées dans le domaine public associées à un dispositif médical).

La spécialité hybride ne répond pas à la définition d’une spécialité générique car elle comporte des différences par rapport à la spécialité de référence. La définition de la spécialité hybride d’une spécialité de référence a été introduite à l’article L. 5121-1 du Code de la santé publique (CSP). Voyons plus précisément ce qui la distingue du générique.

Un générique « Canada Dry »

La spécialité hybride comporte des différences relatives aux indications thérapeutiques, au dosage, à la forme pharmaceutique (au dispositif médical associé) ou à la voie d’administration, ou lorsque la bioéquivalence par rapport à cette spécialité de référence n’a pu être démontrée par des études de biodisponibilité. L’autorisation de mise sur le marché (AMM) d’une spécialité hybride repose au moins pour partie sur les résultats des essais précliniques et cliniques appropriés déterminés en fonction de ces différences.

Le terme de « Registre » a été retenu pour le distinguer du Répertoire des médicaments génériques et de la liste de référence des groupes biologiques similaires. Un groupe hybride est le regroupement d’une spécialité de référence et des spécialités qui en sont hybrides.

Il est prévu qu’une spécialité de référence puisse appartenir à la fois à un groupe générique et à un groupe hybride.

Fixation des prix des médicaments hybrides

Le marché est en attente de décision concernant la décote des prix des hybrides, le plafond de remise (a priori 2,5 % sur le prix fabricant hors taxe ou PFHT), l’équivalence de marge et les honoraires de dispensation.

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A ce jour, dans le cadre de l’article 66 de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2019, le moratoire de 24 mois ne s’applique pas. Le patient qui choisit le princeps doit payer immédiatement la différence de tarif entre ce dernier et l’hybride ; s’il choisit l’hybride, il bénéficie bien sûr du tiers payant. Les médicaments disposant d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) de spécialité hybride ne font pas l’objet de précision particulière dans l’accord-cadre Les Entreprises du médicament (Leem)-Comité économique des produits de santé (CEPS). Le CEPS a été amené à traiter plusieurs demandes de prix en 2020 pour lesquelles il a adopté une approche constante : demande de décote de 30 % par rapport au prix net du médicament de référence. L’ampleur de cette décote peut toutefois être minorée lorsque la spécialité de référence est soumise à la concurrence de génériques depuis plusieurs années.

Introduction de la base de remboursement

Selon le texte issu de l’article 66 de la LFSS 2019, « la base de remboursement des frais exposés par l’assuré au titre de la spécialité délivrée par le pharmacien d’officine […] est limitée à la base de remboursement la plus chère en vigueur pour les spécialités génériques ou hybrides appartenant au groupe générique ou hybride concerné, lorsque le pharmacien délivre une spécialité :

– sur présentation d’une prescription libellée en dénomination commune qui peut être respectée par la délivrance d’une spécialité figurant au sein d’un groupe générique ou hybride mentionné au point 5 de l’article L. 5121-1 du même code ;

– ou pour laquelle la spécialité prescrite ou délivrée appartient à un groupe générique ou hybride […].

Le pharmacien propose au patient, le cas échéant par substitution, une spécialité dont la base de remboursement n’excède pas la plus chère en vigueur pour les spécialités génériques ou hybrides appartenant au groupe générique ou hybride concerné. »

Le III de l’article L. 162-16 du Code de la Sécurité sociale (base de remboursement limitée à la plus chère en vigueur pour les spécialités hybrides aPpartenant au groupe hybride concerné) n’est pas applicable lorsque le prescripteur a exclu sur justification médicale la possibilité de substitution conformément au deuxième alinéa du II de l’article L. 5125-23 du Code de la santé publique, ou lorsque la délivrance par substitution d’une spécialité hybride n’est pas admise en application du dernier alinéa du II du présent article.

Une liste à développer, une rémunération à définir

« Le développement de ce nouveau marché du générique est suspendu à la publication d’un arrêté égalisant les marges des princeps et génériques », indique Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Car sur le plan conventionnel, « l’Assurance maladie est d’accord philosophiquement sur l’égalisation des marges », glisse Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), confiant sur un dénouement favorable quant aux conditions économiques de cette nouvelle substitution.

Le problème serait technique avec les médicaments hybrides. « L’Assurance maladie rapporte qu’elle n’arrive pas à calculer exactement l’égalité des marges entre princeps et génériques, compte tenu de la diversité des dispositifs médicaux associés aux médicaments », rapporte-t-il.

Un arrêté publié le 14 avril 2022 au Journal officiel officialise la création de deux premiers groupes de médicaments hybrides, intitulés « Médicaments pour les maladies obstructives des voies respiratoires : adrénergiques en inhalation » et « Médicaments pour les maladies obstructives des voies respiratoires : autres médicaments en inhalation pour les maladies obstructives des voies respiratoires ».

« Cette première liste tient compte d’une première annulation d’une décision de classer comme générique le fluticasone/salmétérol en forme Diskus, précise Denis Millet, secrétaire général de la FSPF. Les deux classes retenues englobent la quasi-totalité des produits inhalés, ce qui permettra d’inclure rapidement dans ces groupes soit tous les médicaments ayant été administrativement exclus du Répertoire des génériques, soit ceux ayant postulé directement à ce nouveau Répertoire des hybrides. »

Les sprays inhalés représentent le gros de ce nouveau Registre (potentiel de 700 M€) qui devrait également accueillir la copaxone (50 M€) et les collyres (200 M€), soit un total de 950 M€. Outre l’indispensable équivalence des marges requise, les syndicats pharmaceutiques demandent la mise en place d’un mécanisme incitatif à la substitution, comme un plafonnement des remises à 40 %, calqué sur les génériques classiques.

LES TEXTES DE RÉFÉRENCE

• Création du Registre des hybrides à l’article L. 5121-10 du Code de la santé publique (CSP).

• Introduction de la possibilité de substitution à l’article L. 5125-23 du CSP.

• Introduction de la base de remboursement sur la spécialité hybride la plus chère à l’article L. 162-16 du Code de la Sécurité sociale (CSS).

• Décret 2019-1192 du 19 novembre 2019 fixant les conditions d’élaboration de ce registre.

• Arrêté fixant la liste des classes de médicaments pouvant faire l’objet de groupes inscrits au Registre des hybrides (article L. 5121-10).

• Arrêté paru le 12 avril 2022 (Journal officiel du 14 avril 2022).

• Médicaments pour les maladies obstructives des voies respiration en inhalation – classes ATC : R03A et R03B.

• Introduction de la substitution : autorisée à certaines conditions. Arrêté fixant, après avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), les situations médicales dans lesquelles la substitution peut être effectuée par le pharmacien au sein d’un groupe hybride (art. L. 5125-23). Selon le décret 2019-1192, cet arrêté doit également mentionner le délai dans lequel est rendu l’avis de l’ANSM.

A ce jour, des décrets sont en attente concernant les situations médicales d’exclusion de substitution et les situations médicales de substitution.