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Appels d’offre : les pharmaciens oseront-ils faire grève ?
L’article 30 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2023 prévoit la mise en place d’appels d’offre pour certains médicaments et génériques. Seuls les médicaments référencés seraient alors remboursés. Mesure entérinée, grève annoncée ?
Le référencement sélectif de médicaments princeps et génériques, prévu dans l’article 30 du PLFSS 2023, a surpris tous les acteurs du marché du médicament, les pharmaciens en premier. « Cette disposition a été prise sans concertation », souligne ainsi Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). « Cela ne plaît à personne », ajoute Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
Les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) dans le viseur
Et pour cause. Il s’agirait de mettre en place « un système de référencement périodique de certains médicaments à l’échelon national permettant de renforcer la concurrence entre les acteurs, et ainsi de générer des économies pour l’assurance maladie tout en renforçant la garantie d’approvisionnement en médicaments sur certaines classes de médicaments répondant à un même besoin thérapeutique », est-il détaillé dans l’annexe du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). En outre, « des critères supplémentaires tels que le respect de normes environnementales ou l’impact carbone de la production et de l’acheminement des médicaments pourront être inclus, aux côtés du prix, dans le cahier des charges du référencement ». Les produits de santé non référencés seraient tout simplement déremboursés.
L’annexe met en avant les référencements déjà mis en œuvre en Suède, ce qui « permet d’obtenir une baisse de prix autour de 20 % lorsque peu de concurrents sont sur le marché, et jusqu’à 90 % en cas de concurrence forte ». Dans l’évaluation de l’impact financier global, il est proposé de commencer par un référencement sur une classe de médicaments pour laquelle « de nombreux laboratoires (4 et +) avec plus de 5 % de part de marché sont déjà présents et avec un montant remboursé important, par exemple la classe des IPP (dépense assurance maladie de 287 M€, plus de 8 acteurs sur le marché) ».
Souveraineté nationale et marges
« Les appels d’offre sont une catastrophe dans les petits pays. Au Danemark, le référencement de médicaments pour un an a conduit à des ruptures d’approvisionnement dans les trois premiers mois. Désormais, les appels d’offre sont pour 15 jours. Les pharmaciens danois doivent donc retourner les médicaments aux laboratoires pour réceptionner ceux qui sont référencés », explique en effet Pierre-Olivier Variot. Pour le président de l’USPO, cette mesure est même contradictoire avec les discours du Gouvernement sur la réindustrialisation de la France : « Seuls les laboratoires chinois et indiens pourraient être concurrentiels sur les prix. Dans le contexte actuel, est-ce que cela serait raisonnable ? ». Se pose aussi la question des marges. « Cette mesure pourrait priver les pharmaciens d’un milliard d’euros, soit un tiers de leur résultat net et donc de leur rémunération », commente Philippe Besset.
Menace de grève
Les deux syndicats demandent donc la suppression de cette disposition et font appel aux députés et sénateurs pour qu’ils déposent des amendements dans ce sens. Les députés de la Commission des affaires sociales, qui examinent le texte, l’ont déjà fait.
Les industriels ne sont pas non plus favorables à un référencement des médicaments. De fait, Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’Industrie, a annoncé le 6 octobre, lors des 11es Rencontres du G5, que le Gouvernement déposerait un amendement pour transformer la procédure de référencement en « une simple expérimentation ». Ce qui ne convient pas à la FSPF : « Cette demi-mesure annoncée dans la précipitation ne signifie nullement l’abandon du dispositif et ne s’accompagne donc pas de garanties suffisantes pour les pharmaciens d’officine », déclare Philippe Besset dans un communiqué en date du 6 octobre. « Procéder à une expérimentation sur la classe thérapeutique des antiulcéreux au 4e trimestre 2023, pourquoi ?, se demandent également Alain Grollaud et Laurent Filoche, respectivement présidents de Federgy et de l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO), à l’origine d’un communiqué commun le 7 octobre 2022. Pourquoi expérimenter une mesure délétère dont on sait déjà que partout où elle a été mise en place, elle n’a pas permis les économies espérées et a provoqué des perturbations majeures pour les patients ? » Et Philippe Besset de conclure de son côté : « Devant l’ampleur des conséquences potentielles de cette mesure, la profession n’aura d’autre solution que de faire grève, si le Gouvernement ne procède pas à son retrait ».
Le 7 octobre, lors du congrès du groupement Giropharm à Antibes (Alpes-Maritimes), Philippe Besset a été encore plus précis et incisif ; il a annoncé que, jeudi 13 octobre, des actions seraient lancées, pouvant aller jusqu’à la fermeture de pharmacies, si la mesure n’était pas retirée dès mercredi 12 octobre. L’USPO suivrait le mouvement. Quant à l’UDGPO et Federgy, ils demandent eux-aussi un retrait pur et simple de l’article 30, faute de quoi leurs adhérents engageront « toutes les actions possibles pour faire reculer le gouvernement. » Pour l’heure, la FSPF et l’USPO discutent sur des actions graduées (conséquences sur le service de garde et/ou sur la collecte des Dasri...). Les missions liées au Covid-19 (vaccination, tests) ne seraient dans tous les cas pas concernées par les mesures de protestation envisagées par ces deux syndicats.
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