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Quand le patient est un enfant

Publié le 1 février 2009
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Lorsque le « client » est un enfant, on doit adapter son langage et son attitude à son développement cognitif. Lui parler, se mettre à son niveau, éviter la culpabilisation et l’avertir des désagréments sont indispensables.

S’adresser à l’enfant

Chez l’enfant, la compréhension de la maladie, est largement influencée par son développement cognitif, c’est-à-dire par les processus mentaux qu’il acquiert pour prendre conscience des évènements et objets de son environnement et construire ses premiers raisonnements.

S’adapter à son développement cognitif •

De 0 à 3 ans. Tout bébé, ce sont les mimiques (sourcils froncés, cris) qui renseignent sur le malaise et demandent une attention maternante. Entre 1 et 3 ans, l’enfant commence à désigner là où il a mal. Il n’a ni la notion de temps, ni de causalité et ne comprend qu’une consigne à la fois. On adapte son langage à celui de l’enfant, très variable selon son âge.

Entre 3 et 6 ans. Il a besoin d’aide pour désigner sa douleur ou sa maladie (pas de notion de temps) dont il attribue la cause à des personnes ou des évènements extérieurs objectivables. La douleur est souvent vécue comme une punition. Ses peurs sont diffuses et il a besoin d’être rassuré sur son intégrité corporelle.

À partir de 6 ans. Dès 6 ans, l’enfant peut faire le lien de causalité et comprendre les objectifs d’un traitement. Il apprécie les explications.

Chez l’adolescent. Bien souvent, l’adolescent vit la douleur comme une injustice l’excluant des autres. À cet âge, la capacité d’abstraction apparaît.

Parler en direct

Quel que soit l’âge de l’enfant, on s’adresse à lui. Simplement, avec un ton calme et rassurant.

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Il ne s’agit pas de détailler la prise d’un sirop antibiotique à un bébé de 4 mois ! « On peut lui sourire, dire bonjour. À défaut de comprendre le sens des mots, il va saisir l’attention, ses parents également : il est une personne », conseille Françoise Galland, directrice de l’association Sparadrap*.

Aider les parents

Cette parole officinale peut être un appui pour des parents qui tendent à projeter sur l’enfant leur compréhension d’adulte. « Certains parents sont dans l’incapacité de se mettre à la place de l’enfant et de le prendre en compte tel qu’il est, complète le Dr Roger Verdeau, pédopsychiatre au centre hospitalier de Montfavet (Vaucluse), avec un langage simple et compréhensible, l’officinal qui s’adresse à l’enfant ne peut être que positif. »

La bonne attitude

Bannir la culpabilisation

Entre 3 et 6 ans – âges de la pensée magique -, l’enfant peut se sentir responsable ou coupable face à la maladie. Bannir « c’est parce que tu n’as pas mis ton manteau que tu t’es enrhumé ! » On ne le réprimande pas parce qu’il est tombé de vélo alors que l’on délivre des pansements et un antiseptique ! On ne se moque pas de lui s’il a du mal à avaler un comprimé. Éviter : « mais tu es une grande fille pourtant ! »

Se mettre à son niveau

Regardez l’enfant, parlez-lui, passez devant le comptoir ou asseyez-vous près de lui, afin de lui laisser le temps de répondre à une question. Évitez de détourner la tête dès la question posée. La communication non verbale est capitale : montrez-lui que vous avez le temps d’attendre sa réponse et contentez-vous de mots et de gestes réconfortants s’il reste mutique.

Le faire participer

Si le parent parle sans arrêt et écarte l’enfant de la relation, n’hésitez pas à demander au gamin dès 6 ans environ, « ta mère dit que…, tu es d’accord, cela te convient ? »

Adapter les questions

Simplifier

– Évitez les questions trop ouvertes auxquelles il est difficile pour un enfant de moins de 3 ans (en moyenne) de répondre. Montrez l’organe (sur vous) ou dites : « est-ce à la tête (dos, ventre…) que tu as mal ? »

– À partir de l’âge de 6 ans, on peut expliquer la posologie, mais avant, on privilégiera la notion de « nombre de dodos ou de goûters ». Ou bien, on reliera la prise du médicament à un événement repéré par l’enfant : « après le repas avec papa et maman ».

L’impliquer •

Revenir sur la prescription : « sais-tu pourquoi le médecin t’a prescrit un médicament ? » Précisez par exemple : « c’est pour enlever la douleur », pour s’assurer que l’enfant a compris, d’autant plus si le traitement est désagréable ou douloureux.

Favoriser sa participation : « tu prends le médicament dès que tu as mal. » On peut le laisser manipuler la seringue d’un sirop ou un aérosol après lui avoir montré le fonctionnement. Et lui indiquer comment avaler un comprimé : « bois un grand verre d’eau en position debout ou assise, jamais allongé », l’encourager si c’est difficile.

Recueillir son avis. Jusqu’à l’âge de 9 ans (en moyenne), les enfants préfèrent que ce soit le parent qui décide. On peut demander son avis à l’enfant sur le choix d’une galénique ou d’un goût de sirop, mais ce n’est qu’à partir de 11-12 ans qu’il acquiert la capacité à affirmer un choix propre. Dire : « ta mère pense que c’est ça que tu préfères, est-ce que cela te convient ? »

Prévenir des difficultés

Les désagréments

Dans la mesure du possible, délivrez une galénique et un goût acceptés par l’enfant en demandant au parent : « avez-vous l’habitude de lui donner ce médicament ? » Si le choix est possible, appelez le médecin pour modifier la prescription. Si le médicament est désagréable, proposez une solution : « si tu bois juste après, cela passera vite. » Cherchez des alternatives : broyer un comprimé, le mélanger à un aliment apprécié par l’enfant, changer de forme galénique… Si cela s’avère impossible, dîtes : « ce médicament n’est pas bon, je le sais, mais je ne peux pas faire autrement. » Sinon, l’enfant sera surpris et se sentira « trahi ».

Gérer les angoisses parentales

– Face à une demande de solution « miracle » de la part du parent (la gélule qui fait dormir ou manger !), essayez de lui faire comprendre que ce qu’il cherche n’existe pas.

– Si le parent est angoissé en raison de troubles alimentaires ou de sommeil remettant en doute sa fonction maternante, encouragez-le à consulter une personne en qui vous avez confiance (un médecin à l’écoute, un psychologue…). Et si l’enfant nécessite des examens médicaux, donnez les coordonnées d’association spécialisée comme l’association Sparadrap*.

*

Avec l’aimable participation de Roger Verdeaux, pédopsychiatre (Vaucluse) et de Françoise Galland, directrice de l’association Sparadrap.

Quelques « tuyaux » !

• Introduire de la « souplesse » chez le parent. Livres et articles sont écrits pour « les » enfants. Or, il n’existe pas deux enfants identiques. Rassurez-les.

• Face au doute parental du type : « que pensez-vous de cette prescription ? », ne critiquez pas le prescripteur mais demandez plutôt : « pourquoi avez-vous des doutes ? » Téléphonez au médecin pour adopter une stratégie commune si nécessaire.

• En complément d’une prescription, orientez vers des solutions de bon sens favorisant la relation maternante (bain chaud, tisanes, confort, repos, détente, jeux…).

• Votre rôle est de proposer au parent une écoute attentive et bienveillante. Vos conseils doivent concerner la santé. Ne critiquez pas l’éducation… Si l’on sollicite votre avis en la matière, restez pondéré.

• Commandez des documents spécifiques à l’association Sparadrap pour mieux communiquer avec les enfants et leur famille pour en disposer au sein de l’officine. Il existe une collection de guides pratiques (dépliants) pour expliquer les examens médicaux, les rôles des professionnels de santé etc., dans un langage adapté aux enfants.