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les compléments nutritionnels oraux
Les compléments nutritionnels oraux occupent une place de choix dans la prévention et la prise en charge de la dénutrition modérée. Prescrits en complément de l’alimentation habituelle, ils bénéficient d’une posologie et d’un mode d’emploi précis.
Besoins nutritionnels
Les besoins nutritionnels correspondent aux nutriments nécessaires, en quantité et en qualité, au fonctionnement métabolique et physiologique, et au maintien des réserves d’un individu. Ils varient selon l’âge, le sexe, l’activité et l’état de santé.
Dépense énergétique totale (DET)
• Chez l’adulte sain, la dépense énergétique totale se répartit entre la dépense énergétique de repos ou DER (60 % des besoins en moyenne), les dépenses pour la digestion et le métabolisme des nutriments (8 % des besoins) et les dépenses liées à l’activité physique (20 % chez le sédentaire et jusqu’à 50 % chez le sportif). Chez l’adulte, elle est de 30 kcal/ kg/jour et est couverte par l’ensemble des trois macronutriments : les glucides qui sont les substrats énergétiques essentiels (50 à 55 % des besoins), les lipides (30 à 35 %) et les protéines (10 à 12 %).
• Chez l’individu malade, la maladie, les traitements et l’altération de l’état nutritionnel modifient les diverses réactions métaboliques et physiologiques : les DER augmentent proportionnellement à l’intensité de l’agression et la sévérité de la maladie. Par exemple, elles sont en moyenne multipliées par 1,1 en période post-opératoire, par 1,5 en cas d’infection sévère, par 1,3 en cas de cancer et jusqu’à 2 en cas de brûlures étendues. Les besoins nutritionnels sont augmentés d’autant.
Apports nutritionnels recommandés
Les apports nutritionnels recommandés (ANC) pour chaque nutriment sont des valeurs calculées en fonction des besoins nutritionnels dans une population. Quand ils ne sont pas atteints, il existe un risque de déficit.
• Nutriments énergétiques.
– Glucides : 3 à 6g/kg/j.
– Lipides : 1g/kg/j.
– Protéines : chez l’adulte sain : 0,8 g/kg/jour, chez la personne âgée et l’enfant de plus de 1 an : 1 g/kg/jour, chez l’adulte dénutri : 1,5 à 2g /kg /jour.
• Nutriments non énergétiques.
Les apports nutritionnels recommandés en fibres alimentaires, minéraux majeurs (sodium, potassium, chlore, calcium, phosphore, magnésium), en oligoéléments (chrome, cuivre, fluor, iode, fer, manganèse, molybdène, sélénium, zinc) et en vitamines sont généralement couverts lorsque l’alimentation est équilibrée et apporte plus de 1500 kcal/J.
Dénutrition
Définition
La dénutrition est un état pathologique résultant d’un déséquilibre entre les besoins de l’organisme et les apports nutritionnels.
Conséquences
La dénutrition retentit sur les fonctions vitales et augmente la morbidité (pronostic des maladies sous-jacentes aggravé, complications, dépressions, handicap) et le risque de décès. Elle influence en outre le champ et l’efficacité de l’arsenal thérapeutique, notamment en cas de cancer où elle impose parfois une diminution des doses et des cures de chimiothérapie ou de radiothérapie ou rend impossible un acte chirurgical. Enfin, elle multiplie et allonge la durée des séjours hospitaliers.
Prise en charge de la dénutrition
L’importance des conséquences de la dénutrition justifie si possible sa prévention, et le cas échéant une prise en charge adaptée à sa sévérité.
Principes de base
– Dépister systématiquement les personnes à risque.
– Favoriser la prise en charge la plus précoce possible.
– Préférer la voie orale quand elle est possible.
– Augmenter les apports progressivement par paliers de 300 Kcal environ par semaine.
– Prendre en charge les éventuels syndromes dépressifs.
Prévention de la dénutrition
Lorsqu’il existe un risque élevé de dénutrition (personnes âgées, affections chroniques cachectisantes, chirurgie, brûlures…), le prise de compléments nutritionnnels oraux peut éviter de voir s’installer un état pathologique. Mais dans un premier temps, la prévention passe essentiellement par le maintien des apports recommandés, voire un enrichissement calorique et protéique des rations.
Traitement de la dénutrition
On distingue quatre niveaux croissants d’intervention pour la prise en charge des dénutritions avérées.
• Enrichissement des rations alimentaires en calories et en protéïnes et correction des carences en micronutriments.
• Administration de compléments nutritionnels lorsque la voie orale est possible,
– en cas de carence d’apport chronique : les apports sont augmentés jusqu’à 35 kcal/kg/j en moyenne,
– en cas de dénutrition récente et d’hypercatabolisme : les apports sont augmentés jusqu’à 35-45 Kcal/kg/j en moyenne.
• Mise en oeuvre de la nutrition entérale.
• Nutrition parentérale, par voie veineuse.
Les compléments nutritionnels oraux
Définition
Les compléments nutritionnels oraux sont utilisés par voie orale, en complément d’une alimentation orale habituelle. Leur composition répond aux besoins nutritionnels en énergie, macronutriments et micronutriments et permet un apport de densité élevée sans nécessiter de préparation culinaire. Ils appartiennent essentiellement au groupe des « aliments diététiques destinés à des fins médicales spéciales » (ADDFMS). Deux produits, Renutryl et Cétornan, ont le statut de médicament.
Objectifs
L’objectif est de maintenir l’état nutritionnel et/ou de corriger un état de dénutrition modérée. Ils font partie du traitement médical et devraient être proposés précocement chaque fois que l’alimentation orale d’un patient dénutri modérément ou à haut risque de dénutrition est évaluée comme insuffisante.
Indications
Classiquement, on considère que la complémentation orale est nécessaire lorsque les apports alimentaires couvrent moins des deux tiers des besoins nutritionnels alors que le tube digestif est fonctionnel et que les possibilités de déglutition sont satisfaisantes.
• Difficultés d’accès à la nourriture : troubles de la déglutition, sténose oesophagienne, chirurgie ORL ou dentaire, problèmes sociaux.
• Prévention d’une augmentation des besoins protéinoénergétiques (post ou préopératoire, traitements agressifs, infections sévères, escarres…).
• Anorexie primaire ou secondaire chez les personnes âgées, en cas d’hospitalisation…
• Dénutrition avérée modérée. • Relais d’une nutrition entérale ou parentérale.
Contre-indications
– Besoins nutritionnels couverts.
– Fausses routes répétitives.
– Troubles de la conscience.
– Vomissements.
– Occlusions intestinales.
– Diarrhées sévères, fistules digestives.
– Pancréatite aiguë.
Posologie
La posologie correspond à un objectif nutritionnel adapté à chaque patient : le plus souvent, deux à trois prises quotidiennes réparties sur la journée. En soins palliatifs, ils peuvent cependant être prescrits « à la demande » pour améliorer la qualité de vie des patients.
Choisir le bon complément
Le choix de la texture (boissons lactées, fruitées, barres, compotes, crèmes, mixés…) permet de varier les apports et de s’adapter aux possibilités de déglutition et à la dextérité du malade. Les gammes d’arômes (sucré, salé, neutre…), très étendues, permettent de respecter les préférences gustatives du patient, condition primordiale pour une bonne observance. Mais le choix des produits se fait surtout en fonction de leur composition.
Les complets
Les compléments nutritionnels oraux sont dits complets quand ils apportent des protéines, lipides, glucides, vitamines, électrolytes et oligoéléments. Mais ils se différencient par leurs proportions ou d’autres spécificités.
• À différencier selon leurs apports caloriques.
– Les normo ou isocaloriques (NC), peu nombreux, apportent 1 Kcal/ml. Ils sont indiqués pour les sujets dont l’alimentation orale est équilibrée.
– Les hypercaloriques (HC) qui apportent plus de 1 Kcal/ml, sont indiqués lorsque l’alimentation est faible et/ou la dépense énergétique élevée.
• À différencier selon leurs apports protidiques.
– Les normoprotidiques : les protéines représentent 15 % de l’apport énergétique total du produit.
– Les hyperprotidiques (HP) : les protéines représentent plus de 19 % de l’apport énergétique total. Ils sont indiqués lorsque l’apport protidique est faible ou augmenté (dénutritions par hypercatabolisme, chirurgies).
• Présence éventuelle de lactose ou de gluten, en cas d’intolérance ou de diarrhées.
• Teneur en fibres en cas de constipation (traitement palliatifs morphiniques en particulier) ou au contraire « sans résidus».
• Composition glucidique : les produits édulcorés sont élaborés pour les diabétiques.
• Rénutryl 500 (médicament avec AMM) est un produit complet hypercalorique et hyperprotidique destiné à la voie orale ou à la voie entérale, en complément d’une alimentation orale insuffisante ou de façon exclusive.
Les monomériques en cas de besoins ciblés
Les compléments nutritionnels oraux dits monomériques n’apportent qu’un type de macronutriments.
• Monomériques en protéines : se présentent sous forme de poudre hyperprotidique à ajouter à un yaourt, une soupe, un plat mixé ou une boisson (Protifar Plus Nutricia, SP 95 Poudre hyperprotidique DHN, Hyperprotéiné Beaubour).
• Monomériques en glucides : compléments hypercaloriques en poudre (Resource Dextrine Maltose Novartis, Caloreen Nestlé).
• Monomériques en lipides : huiles hypercaloriques (Liprocil Nestlé).
Enrichis en pharmaco-nutriments à action ciblée
• Arginine et autres acides aminés précurseurs du collagène sont particulièrement indiqués pour favoriser la cicatrisation en cas d’escarres ou de brûlures étendues (Cubitan Nutricia, Clinutren repair Nestlé, Strengor. 5 mixé et Strengor. 2 dessert Beaubour…). Cétornan, qui a le statut de médicament, est composé d’oxoglurate d’ornithine, qui freine le catabolisme et stimule la synthèse des protéines. Il peut être administré par voie orale en le diluant dans un verre d’eau ou le mélangeant à un yaourt à raison de deux sachets par jour ou encore par voie entérale.
• Acides Gras Polyinsaturés -3, antiinflammatoire et immunomodulateur et la vitamine E, le sélenium ou la vitamine C, anti-oxydants, sont particulièrement indiqués en oncologie (Resource Support Novartis, Fortimel Care Nutricia, Clinutren Protect Nestlé). Les sachets Oral Impact Novartis enrichis en huiles de poisson et en arginine sont prescrits en nutrition périopératoire lors d’une chirurgie digestive carcinologique ou chez les patients immunodéprimés.
• Certains produits sont spécifiques de maladies : Scandishake Mix (Nutricia) pour la mucoviscidose apporte 600 Kcal par portion sans enrichissement en vitamines ou Modulen IBD (Nestlé), enrichi en Transforming Growth Factor, dans la maladie de Crohn.
Les pédiatriques
Ce sont des compléments adaptés aux enfants de plus de 1 an mais ils sont rares et peu variés ! Les apports et l’osmolarité des produits pédiatriques étant spécifiques, il est difficile de les substituer par des produits adultes. Chez les plus de 12 ans ou de 40 kg, les formes adultes sont souvent prescrites.
Observance
Varier les « plaisirs »
Pour éviter la lassitude, alterner selon le goût des patients, sucré et salé, soupe en hiver, boissons fraîches en été, barres ou crèmes, yaourts liquides, compotes pour le goûter… Si le produit est de goût neutre, on peut l’aromatiser avec des sirops de fruit, du caramel, du chocolat en poudre. Les formes crème peuvent être mises au congélateur et devenir des glaces.
Adapter aux handicaps
• Troubles de la déglutition : épaissir les textures avec une poudre épaississante d’amidon de maïs ou de pomme de terre comme Clinutren Poudre épaississante, Resource Thicken up, Nutilis, Epailis…
• Troubles de la préhension : éviter les ouvertures complexes (canettes, briquettes…).
• Patients alités : utiliser une paille ou un verre à bec.
Vie quotidienne
L’utilisation des compléments nutritionnels doit se faire en compléments d’une alimentation équilibrée et adaptée.
Augmenter les apports alimentaires
• Respecter les principes nutritionnels de base :
– manger du pain, des pommes de terre ou des légumes secs à chaque repas, au moins cinq fruits et légumes et trois produits laitiers par jour, de la viande, du poisson ou des oeufs deux fois par jour ;
– boire au moins 1 à 1,5 litre d’eau par jour, davantage en cas de fortes chaleurs ;
– aménager la fréquence des repas ;
– maintenir si possible le rythme quotidien de trois repas et un goûter à heures fixes ;
– si la satiété est trop rapide, fractionner et augmenter la fréquence des repas, bien mastiquer, manger lentement, décaler la prise des médicaments en fin de repas ;
– éviter une période de jeûne nocturne longue (> 12 heures).
Enrichir l’alimentation
Lorsque l’appétit fait défaut ou lors d’une alimentation mixée, il est difficile de conserver une ration alimentaire suffisante. Enrichir les plats permet d’augmenter l’apport protéino-énergétique sans trop augmenter le volume de l’alimentation.
Ajouter aux plats habituels :
– des protéines (poudres de lait, lait concentré, pâtes ou semoules dans les soupes, oeufs durs et croûtons dans les crudités…) ;
– des lipides (beurre, crème fraîche, gruyère râpé, dés de fromages dans les salades…) ;
– des glucides (miel, confiture, crème de marron, nappages dans les laitages…).
Déjouer les obstacles à une bonne alimentation
• Troubles de la mastication : privilégier les purées, hachis, mixer les aliments et mouiller les plats avec des sauces.
• Diarrhées : limiter le lait et consommer les mélanges liquides lentement.
• Handicap (Alzheimer, Parkinson…) : utiliser un verre à bec, privilégier les aliments sans couverts (bâtonnets de poisson ou de légumes crus, yaourts à boire).
• Problèmes financiers : la viande peut être remplacée par des oeufs ou du jambon.
• La solitude : manger accompagné augmente la prise alimentaire. Encourager les personnes âgées et seules à déjeuner dans un établissement (maison de retraite…).
Activités
Maintenir autant que possible une activité physique (marche, exercices, faire les courses, le ménage) pour stimuler l’appétit et entretenir la masse musculaire.
État dentaire
Le mauvais état dentaire et/ou un dentier mal adapté est fréquemment à l’origine d’un déficit alimentaire. Consulter le dentiste régulièrement.
Accompagnement
La dénutrition peut être liée à différents facteurs dont la vieillesse, la dépression, les maladies chroniques et le malade peut avoir à subir des thérapies lourdes qui ne favorisent pas son appétit, bien au contraire. Le succès de la complémentation orale passe par une adhésion au traitement. Le rôle de l’entourage, primordial, sera de l’encourager, de lui rappeler ses horaires de prise par exemple ou de noter les quantités absorbées sur une fiche de suivi. Bien entendu, l’état d’esprit dans lequel se trouve le malade est déterminant mais plus l’environnement sera attentif et source d’affection, plus cela favorisera son appétit. •
Prise en charge
La prescription des compléments nutritionnels oraux est réservée aux médecins pour une durée de un mois renouvelable à raison de 2 à 3 produits par jour. Ils sont inscrits au titre de dispositif médical à la LPPR comme « nutriments pour supplémentation orale ». Ils sont pris en charge :
• pour les patients présentant une dénutrition caractérisée par une perte de poids supérieure ou égale à 5 % du poids habituel atteints d’épidermolyse bulleuse dystrophique ou dermolytique, de mucoviscidose, de tumeurs ou d’hémopathies malignes, de maladies neuromusculaires ou infectés par le VIH.
• pour les enfants présentant une stagnation staturopondérale durant une période de six mois.
Cétornan et Rénutryl qui ont le statut de médicament sont tous deux sont pris en charge à 35 %.
Comment évaluer la dénutrition ?
Aucun critère individuel n’est suffisant. On utilise des données cliniques et biologiques, ainsi que certains questionnaires.
La perte de poids et sa vitesse : la dénutrition est avérée si la perte de poids atteint 2 % en une semaine, 5 % en un mois ou 10 % en 6 mois.
L’indice de masse corporelle : c’est le rapport poids en kg/taille en m2 qui permet d’évaluer la corpulence. La dénutrition est avérée si la valeur est 17 chez l’adulte ou 21 chez le patient de plus de 70 ans.
Données biologiques : un dosage plasmatique d’albumine inférieur à 35g/l et de transthyrétine (pré-albumine) inférieur à 200 mg/l témoignent d’une dénutrition.
Estimation de l’appétit et/ou des apports alimentaires (état du réfrigérateur, est-ce que la personne mange ? À besoin d’une aide pour les courses et les repas…)
Recherche des situations à risque (cancer, deuil, perte de ressources et/ou d’autonomie et/ou de repère, difficultés motrices…)
Questionnaire spécifique comme le MNA (Mini Nutritional Assessment). Pour les personnes âgées (HAS), on parle de dénutrition quand la perte de poids est supérieure ou égale à 5 % en 1 mois ou 10% en 6 mois ; IMC < 21 ; Albuminémie < 35 g/l ; MNA global < 17.
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