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Les arythmies cardiaques
L’objectif d’un traitement antiarythmique est de prévenir l’apparition de récidives et de complications potentiellement graves. Les médicaments sont prescrits en première intention, et relayés, dans certains cas, par des techniques non médicamenteuses.
Les arythmies
Le rythme cardiaque
Le rythme cardiaque normal est le « rythme sinusal » : 60 à 90 battements/min au repos. Les contractions sont initiées par une onde électrique ou potentiel d’action, qui prend naissance dans le nœud sinusal (au niveau de l’oreillette droite) et se propage à travers le myocarde jusqu’aux ventricules. La transmission de cette onde électrique est assurée par l’entrée ou la sortie de certains ions (sodium, calcium ou potassium) à travers les membranes des cellules cardiaques. Le rythme est régulé par le système nerveux autonome. Il peut être influencé par certaines hormones (adrénaline, noradrénaline, hormones thyroïdiennes…), la température, la pression artérielle, le pH et l’équilibre sanguin O2/CO2.
Les troubles du rythme
Les arythmies cardiaques sont des anomalies du rythme des battements du cœur. Elles surviennent en cas de troubles du déclenchement ou de la conduction de l’onde électrique ou lors de perturbations des facteurs de régulation. Diagnostiquées par l’électrocardiogramme (voir encadré p. 27), les arythmies sont classées en deux groupes (voir ci-contre) :
• supraventriculaires. Elles débutent au niveau des oreillettes ou de la jonction entre oreillette et ventricule : bradycardie sinusale, extrasystoles auriculaires, fibrillation auriculaire, tachycardie jonctionnelle.
• ventriculaires. Elles se forment dans les ventricules : tachycardie ventriculaire, fibrillation ventriculaire et torsade de pointe (accès paroxystique de tachycardies).
Les conséquences
Les troubles du rythme peuvent être aigus ou bien chroniques, asymptomatiques ou responsables de symptômes gênants (palpitations, douleurs thoraciques, essoufflements, sueurs, vertiges, malaise, perte de connaissance), potentiellement graves (accident vasculaire cérébral ou mort subite).
Stratégie thérapeutique
But du traitement
Le traitement antiarythmique pemet de traiter un trouble du rythme mais aussi d’éviter une récidive ou l’apparition d’une complication grave. Il est mis en place après corrections d’éventuels facteurs déclenchants (désordres métaboliques, hypothyroïdie…)
En première intention
Les médicaments sont la base de la thérapeutique, mais ne corrigent pas totalement les troubles, leur efficacité ne dépasse pas 80 %. Selon leurs actions sur l’entrée ou la sortie des ions Na+, Ca+ ou K+ à travers les membranes des cellules myocardiques, ils sont répartis en quatre classes et trois sous-groupes (classification de Vaughan-Williams). Les digitaliques, qui constituent une classe à part, sont utilisés pour ralentir les arythmies supraventriculaires. Les antiarythmiques n’ont pas d’indication spécifique. La molécule est choisie selon la nature de l’arythmie, les signes cliniques, la cardiopathie sous jacente et les effets indésirables. Le mode d’administration dépend du stade de l’arythmie : par voie orale (prévention d’une récidive le plus souvent) ou par voie injectable (traitement d’une arythmie en évolution). Leur association est utilisée avec précaution.
En deuxième intention
En cas d’inefficacité du traitement médicamenteux ou d’effets indésirables importants (proarythmies), il existe des techniques non médicamenteuses. L’électrothérapie (défibrillation ou électrostimulation) permet de réduire les accès de tachycardie (traitement de la crise) par stimulation électrique directe du myocarde. L’ablation endocavitaire par radiofréquence et la chirurgie sont des techniques curatives qui réduisent les risques de récidive en detruisant une zone très limitée du myocarde.
Les médicaments
Antiarythmiques de classe I
Ces molécules ralentissent l’entrée des ions Na+ et bloquent la sortie des ions K+ de la cellule : elles sont dites « stabilisantes de membrane ». Le risque de proarythmies est important. On les classe en trois groupes selon leur effet sur le potentiel d’action (onde électrique initiant les contractions cardiaques).
• Groupe Ia (hydroquinidine, disopyramide). Mode d’action : ils allongent le potentiel d’action. Indications : surtout utilisés en traitement d’entretien pour prévenir les troubles du rythme auriculaire (flutter, tachycardie).
◊ Hydroquinidine (Serecor LP 300 mg). Contre-indications : bloc auriculo-ventriculaire, troubles des conductions intraventriculaires, troubles de l’automatisme sinusal, intoxication aux digitaliques, torsades de pointe, intervalle QT long.
◊ Disopyramide (Rythmodan, Isorythm). Précaution d’emploi : posologie diminuée de moitié chez le sujet de plus de 70 ans.
Contre-indications : les mêmes que l’hydroquinidine auxquelles s’ajoutent le glaucome et l’hypertrophie prostatique liés à l’effet atropinique de cette molécule et l’insuffisance rénale pour la forme LP.
• Groupe Ib (lidocaïne). Mode d’action : la lidocaïne (Xylocard) est le seul représentant de ce groupe qui raccourcit la durée du potentiel d’action. Indications : utilisée par voie veineuse en préventif et curatif des tachycardies ventriculaires notamment dans la phase aiguë de l’infarctus. Contre-indications : hypersensibilité aux anesthésiques locaux, troubles de la conduction auriculoventriculaire, porphyrie aiguë, et épilepsie non contrôlés.
• Groupe Ic (cibenzoline, flécaïnide, propafénone). Mode d’action : ils ne modifient pas la durée du potentiel d’action. Indications : traitement des arythmies auriculaires et ventriculaires, mais ils sont responsables de nombreux effets indésirables cardiaques (effet proarythmogène, insuffisance cardiaque). Contre-indications : blocs auriculoventriculaires et de branche, insuffisance cardiaque, infarctus du myocarde, hypertrophie ventriculaire gauche. La propafénone est contre-indiquée aussi en cas de cirrhose.
◊ Flécaïnide (Flecaïne). Précautions : instauration progressive du traitement.
◊ Propafénone (Rythmol) et cibenzoline (Cipralan, Exacor). Précautions : adaptation de la posologie chez le sujet âgé.
Antiarythmiques de classe II
Cette classe comprend certains bêtabloquants à activité antiarythmique : acébutolol (Sectral), aténolol (Tenormine), métoprolol (Lopressor, Seloken), nadolol (Corgard), oxprénolol (Trasicor), pindolol (Visken), propranolol (Avlocardyl, Hemipralon). Mode d’action : activité antiarythmique ventriculaire. Indications : d’efficacité limitée, ils sont surtout utilisés dans le post-infarctus et dans les arythmies dues au stress ou déclenchées par l’effort. Contre-indications : asthme, bradycardie insuffisance cardiaque décompensée, BPCO, choc et réactions anaphylactiques, hypotension artérielle, syndrôme de Raynaud.
Antiarythmiques de classe III
Mode d’action : allongent de façon importante la durée des potentiels d’action par blocage de certains canaux potassiques.
• Amiodarone (Cordarone). Indication : tous les types d’arythmies. Mode d’emploi : réaliser des fenêtres thérapeutiques régulièrement. Surveillance : contrôle des hormones thyroïdiennes (l’amiodarone est riche en iode) ; l’apparition d’une toux sèche ou d’une dyspnée peut signer une pneumopathie interstitielle ; contrôler la fonction hépatique ; déceler l’apparition de neuropathie sensitive ; pratiquer un bilan ophtalmologique complet en cas de diminution de l’acuité visuelle. Contre-indications : bradycardie, troubles de la conduction auriculoventriculaire, hyperthyroïdie, deuxième et troisième trimestre de la grossesse, allaitement.
• Sotalol (Sotalex). Indications : arythmies ventriculaires et supraventriculaires. Mode d’emploi : instauration progressive du traitement. Contre-indications : idem bêtabloquants. De plus, risque de torsade de pointe contrairement aux autres bêtabloquants.
Antiarythmiques de classe IV
Mode d’action : ces antagonistes calciques inhibent les flux de calcium et augmentent ainsi la durée du potentiel d’action. Indications : en préventif et en curatif notamment dans les tachycardies paroxystiques.
• Vérapamil (Isoptine). Contre-indications : bloc auriculoventriculaire, insuffisance cardiaque, hypotension artérielle, dysfonctionnement sinusal, enfant.
• Diltiazem (Tildiem injectable). Contre-indications : dysfonctionnements sinusaux, blocs auriculo-ventriculaires, fibrillation, hypotension, choc cardiogénique.
Les digitaliques (digoxine)
Mode d’action : la digoxine (Digoxine, Hemigoxine) ralentit la conduction du potentiel d’action. Indications : traitement de la fibrillation ou du flutter auriculaire. Surveillance : doser régulièrement la digoxinémie. Contre-indications : bloc auriculoventriculaire, hyperexcitabilité ventriculaire, tachycardies, fibrillations, troubles du rythme ventriculaire, hypokaliémie.
Les traitements non médicamenteux
Électrothérapie
• Électrostimulation endocavitaire (overdrive). Principe : une ou plusieurs sondes sont placées dans les cavités cardiaques droites par cathétérisme et stimulent électriquement les cellules du myocarde à une fréquence supérieure à celle de la tachycardie qui s’interrompt alors. Indications : traitement aigu de flutter auriculaire, des tachycardies jonctionnelles et de certaines ventriculaires.
• Défibrillations par choc électrique externe. Principe : deux grosses électrodes placées à la surface du thorax délivrent une décharge électrique (200 à 360 joules) pendant un bref moment. Le courant dépolarise (contracte) l’ensemble des cellules myocardiques et les resynchronise. Indications : traitement en urgence des fibrillations ventriculaires, cette méthode est aussi utilisée pour restaurer un rythme normal lors de fibrillation ou de flutter auriculaire.
• Défibrillateur implantable. Principe : l’appareil est constitué d’un boîtier placé dans la région sous-claviculaire, et de sondes fixées dans les cavités cardiaques. Lorsqu’elles détectent l’arythmie cardiaque (fibrillation ou tachycardie ventriculaire rapide), un choc électrique est délivré en fonction de la fréquence et du type de trouble rythmique. Indications : patients présentant un fort risque de mort subite et dont l’arythmie n’est pas contrôlée par les médicaments.
Techniques curatives
L’ablation endocavitaire permet grâce à un courant de radiofréquence ou de cryothérapie, de détruire définitivement une zone très limitée du myocarde ou du tissu nodal responsable du trouble rythmique ou impliqué dans son circuit de propagation. Cette intervention, indolore et sans anesthésie générale, est préférée à la chirurgie qui reste néanmoins indiquée dans le traitement de certaines tachycardies ventriculaires.
Surveillance
De la maladie
Les manœuvres vagales, enseignées par le médecin, permettent au patient de traiter certains troubles rythmiques (tachycardies jonctionnelles surtout) en stimulant le système nerveux autonome : massage de la carotide, appui sur les globes oculaires, gonflement des poumons pour augmenter la pression abdominale (manœuvre de Valsalva), boire rapidement un verre d’eau froide.
Du traitement
• Observance. Le traitement antiarythmique ne doit pas être interrompu sans avis médical. Toujours garder sur soi une ordonnance du traitement.
• Prévenir les proarythmies. Tous les antiarythmiques peuvent induire des proarythmies (troubles du rythme) potentiellement graves (5 à 20 % des cas). Réaliser régulièrement des ECG et contrôler la kaliémie dont la surveillance sera accrue en cas de vomissements ou de diarrhées, de perte d’appétit, de fortes chaleurs et de prise de laxatifs ou diurétiques.
• Automédication. Les antiarythmiques présentent de nombreuses interactions avec d’autres médicaments. Attention en particulier aux molécules agissant sur la kaliémie (laxatifs tels bourdaine, séné et bisacodyl). Éviter les compléments alimentaires à base de maté ou de guarana qui contiennent de la caféine.
Vie quotidienne
Alimentation
Lutter contre les facteurs de risque cardiovasculaires : alimentation saine et équilibrée, pauvre en lipides saturés et en alcool, limiter le surpoids et le tabac. Éviter les stimulants comme le café, le thé, le chocolat, le cola.
Activité physique
Après le feu vert du cardiologue, le malade peut pratiquer une activité physique d’endurance (marche, natation, vélo, jogging) à raison de 30 à 40 minutes trois fois par semaine.
Vie sociale
Le malade doit s’octroyer des plages de repos et détente car le stress et la fatigue favorisent la survenue des troubles du rythme. Les porteurs de défibrillateur implantable doivent le signaler dans les aéroports et faire attention aux interférences électromagnétiques (plaque de cuisson à induction, téléphone portable près de l’appareil, arceaux antivol des magasins).
Vie sexuelle
L’activité sexuelle est autorisée sauf si le malade s’essouffle rapidement. Chez une femme, le désir de faire un enfant impose une consultation en amont. L’allaitement sera aussi discuté.
Soleil
Éviter l’exposition au soleil car les médicaments sont photosensibilisants. Se protéger avec une crème solaire de fort indice et porter une casquette ou un chapeau. Eviter l’exposition au soleil de la zone où se trouve un défibrillateur implantable à cause du risque de brûlures.
Médicaments et torsades de pointe
Les torsades de pointe sont un type de tachycardies paroxystiques(1) ventriculaires pouvant entraîner une syncope ou un arrêt cardiaque. De nombreux médicaments favorisent leur apparition, notamment : les antiarythmiques des classes Ia et III, certains macrolides (érythromycine, clarithromycine), certains antifongiques (kétoconazole, itraconazole, fluconazole), certains psychotropes (lithium, halopéridol, phénothiazines, méthadone, antidépresseurs tricycliques), des antihistaminiques (astémizole, terfénadine, loratadine, desloratadine), le cisapride…
(1) Paroxystique : qui survient par épisode de crises intenses et aiguës.
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