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La ménopause

Publié le 1 avril 2011
Par Nathalie Belin
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Hygiène de vie adaptée et correction des facteurs de risques osseux et cardiovasculaire sont la base de la prise en charge. Un traitement hormonal est justifié quand les troubles altèrent la qualité de vie.

Définition

Une installation progressive

La ménopause correspond à l’arrêt permanent des menstruations. Ce phénomène naturel résulte de la diminution des sécrétions hormonales ovariennes. La date de la ménopause est connue rétrospectivement devant la constatation d’une aménorrhée d’au moins un an. Elle survient en moyenne en Europe à l’âge de 51 ans.

Des signes très variables

Les manifestations varient d’une femme à l’autre, et au cours du temps chez une même femme. Le climatère désigne la période de changements endocriniens, physiques et psychologiques qui surviennent à la ménopause. L’arrêt de la sécrétion des estrogènes est responsable de l’apparition de signes cliniques particuliers, appelés troubles du climatère. Ce sont :

– les bouffées de chaleur (car les estrogènes participent à la régulation de la température du corps) ;

– les troubles génito-urinaires : sécheresse vaginale, augmentation de la fréquence des infections génitales et urinaires ;

– les effets sur le système nerveux central (troubles du sommeil, irritabilité…) ainsi que sur la peau, qui s’amincit, devient plus sèche et se ride plus facilement.

Il existe souvent une prise de poids avec modification de la répartition des graisses (localisées au niveau du ventre et non plus des hanches et des cuisses). Par ailleurs, la perte osseuse s’accélère en raison de la carence estrogénique, d’où un risque d’ostéoporose. Enfin, l’incidence des accidents cardiovasculaires augmente du fait de perturbations métaboliques : augmentation du LDL cholestérol, baisse de la fraction HDL, diminution de l’élasticité des parois artérielles…

Objectif du traitement

Chez toute femme ménopausée, l’hygiène de vie et la correction des facteurs de risques osseux et cardiovasculaire (diabète, hypertension, hyperlipidémie) restent la première ligne de prise en charge.

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Les troubles du climatère, sans danger pour la santé, peuvent, toutefois, dans certains cas, être difficiles à supporter. Ce qui justifie alors la mise en route d’un traitement hormonal de la ménopause (THM), qui est prescrit dans le respect des indications actuelles et après avoir clairement exposé à la patiente les risques et bénéfices actuels connus (voir Suivi et Complément d’article). Il s’agit d’une décision partagée qui impose un suivi régulier.

Stratégie thérapeutique

Hygiène de vie

– Une activité physique régulière prévient la fonte musculaire et permet de conserver souplesse et équilibre (en prévention des chutes).

– Un apport journalier de 1 000 à 1 200 mg de calcium est recommandé. Une supplémentation en vitamine D doit le plus souvent être associée.

– Il faut encourager le maintien d’un poids normal.? Au-dessous, c’est un facteur de risque d’ostéoporose, au-dessus, c’est un facteur de risque cardio­vasculaire.

– L’arrêt du tabac est recommandé en prévention du risque cardiovasculaire.

Le traitement hormonal

Le traitement hormonal de la ménopause (THM) consiste à utiliser des estrogènes pour pallier les effets de la carence estrogénique. Sa mise en route est justifiée en cas de troubles du climatère gênants, qui altèrent la qualité de vie.

• Durée du traitement. La plus courte possible et à la posologie la plus faible possible. Des interruptions périodiques vérifient l’utilité de poursuivre le traitement. La réapparition des troubles peut justifier sa reprise.

• Principe. Chez les femmes non hystérectomisées : un progestatif est associé aux estrogènes au moins douze jours par mois pour réduire le risque de cancer de l’endomètre (lié à l’action proliférative des estrogènes sur la muqueuse utérine). Chez les femmes hystérectomisées : les estrogènes sont utilisés seuls, car le risque de cancer du sein est plus élevé sous estroprogestatifs que sous estrogènes seuls.

Avec ou sans utérus, la patiente a le choix entre le traitement avec règles (traitement séquentiel) et celui sans règles (traitement combiné).

• Traitements séquentiels. Ils entraînent souvent une hémorragie de privation. Deux types de schémas sont proposés :

– estrogène pendant vingt et un à vingt-cinq jours et progestatif les douze derniers jours de l’estrogène ;

ou

– estrogène en continu et progestatif douze à quatorze jours par mois.

• Traitements combinés dit « sans règles ». Le but est d’obtenir une aménorrhée en administrant en continu l’estrogène et le progestatif. Certains schémas proposent une interruption de cinq à sept jours par mois des estrogènes et des progestatifs (dans ce cas des règles peuvent apparaître). L’association d’un estrogène et d’un progestatif en continu peut entraîner des spottings ou des métrorragies, surtout si ce traitement est instauré en début de ménopause. Certains médecins préfèrent donc ne l’instaurer qu’en relais d’un traitement avec règles, un à deux ans après le début de la ménopause.

• La place du traitement local. Lorsqu’une action sur la sécheresse vaginale est recherchée, les estrogènes par voie locale sont efficaces (Gydrelle, Physiogyne, Trophigil, Colpotrophine). La voie locale n’expose pas – ou moins – aux effets indésirables et risques associés à la voie générale. Les estrogènes locaux sont utilisés seuls ou en complément du THM si celui-ci se révèle insuffisant, ou au début d’un THM (les effets bénéfiques sur la sécheresse vaginale nécessitent parfois quelques semaines avant de se manifester).

Autres traitements

La bêta-alanine est un traitement non hormonal indiqué dans le traitement des bouffées de chaleur. C’est une solution alternative au THS, mais son action est modérée.

Traitements

Estrogènes systémiques

Les estrogènes remplacent l’estradiol naturelle. Ils agissent donc sur les symptômes liés à la carence en estrogène. Ils sont efficaces contre les troubles du climatère (bouffées de chaleur, sueurs nocturnes…) et la sécheresse vaginale. Ils jouent aussi un rôle sur l’élasticité de la peau, qui paraît moins sèche, moins fine.? Ils freinent l’accélération de la perte osseuse qui survient après la ménopause et diminuent le risque de fractures. Deux voies d’administration sont utilisées : la voie orale (17 bêta-estradiol, estriol) et la voie percutanée (estradiol uniquement). Les effets sur les troubles du climatère, la peau ou la prévention de la perte osseuse sont identiques. Le 17 bêta-estradiol est un estrogène de synthèse identique à l’estradiol endogène humain. L’estriol est un estrogène naturel d’action courte. Administration par voie orale : indifférent par rapport au repas. Si les bouffées de chaleur prédominent la nuit, prendre de préférence le soir au coucher. L’estriol ne doit pas être pris au cours d’un repas riche en graisses ; par voie percutanée : appliquer le gel au niveau de l’abdomen, des cuisses, des bras ou de la région lombaire. Appliquer le patch sur une zone non irritée au niveau des fesses ou des cuisses, et jamais deux fois de suite au même endroit. Ne jamais mettre gels et patchs au niveau des seins ou à leur proximité. Surveillance : contrôle régulier du poids, de la tension artérielle, des seins et de l’appareil génital avant instauration du traitement, puis de façon régulière. Contre-indications : tumeurs du sein et de l’utérus, hémorragies génitales non diagnostiquées, accidents ou antécédents thromboemboliques veineux, accident thromboembolique artériel, affections hépatiques sévères ou récentes, grossesse, allaitement.

Progestatifs

On recourt plutôt à des progestatifs sans activité androgénique ou avec une activité androgénique très faible (donc sans risque d’acné, d’hirsutisme, de chute de cheveux…) : progestérone naturelle micronisée (Utrogestan, Menaelle, Estima) et son dérivé, la dihydrogestérone (Duphaston). Les dérivés à noyau pregnane (chlormadinone, médrogestone, médroxyprogestérone) et les norpregnanes (nomégestrol, promégestone) ont très peu ou pas d’activité androgénique. Ils sont aussi utilisés. Le progestatif est associé aux estrogènes (chez la femmes non hystérectomisée) au moins dix jours par mois pour réduire le risque de cancer de l’utérus. Administration : identique aux estrogènes. La progestérone naturelle peut induire une somnolence ou des sensations vertigineuses, préférer dans ce cas une prise unique au coucher (la voie vaginale est une solution alternative). Surveillance : identique aux estrogènes. Contre-indications : altérations graves de la fonction hépatique ; et pour les progestatifs de synthèse : accidents thromboemboliques en évolution, hémorragie génitale non diagnostiquée.

Tibolone (Livial)

Stéroïde de synthèse possédant des effets estrogéniques, progestatifs et androgéniques. La tibolone correspond à un THM sans règles. Elle tend à être moins prescrite. Surveillance et Contre-indications : identique aux estrogènes.

Bêta-alanine (Abufène)

La bêta-alanine est un acide aminé qui agirait sur les phénomènes de vasodilatation périphérique comme inhibiteur non hormonal des bouffées de chaleur. Contre-indications : grossesse et allaitement.

Suivi

Du traitement

Une surveillance annuelle permet de vérifier la bonne tolérance du traitement et l’utilité de le poursuivre.

• Réexpliquer si besoin. Le THM reste le traitement le plus efficace des symptômes du climatère. Il prévient l’ostéoporose et le risque de fractures ostéoporotiques. Il améliore les troubles génito-urinaires. Ces indications ont été limitées, et il est prescrit pour la durée la plus courte possible, car il existe des incertitudes sur les risques à long terme (en particulier cancer du sein, risque coronarien).

• Adaptation du traitement. La dose efficace pour corriger les symptômes de la carence estrogénique est variable. Signaler au médecin la persistance des troubles (bouffées de chaleur, sueurs…) ou l’apparition de signes de surdosage (douleurs des seins, légère prise de poids, sensation de gonflement abdominal…).

• Oubli de prise ou de changement de patch. Continuer le traitement comme si l’oubli n’avait pas eu lieu. Le seul risque est l’apparition de saignements dans les jours qui suivent.

De la femme

Dans tous les cas, à partir de 50 ans, une mammographie est recommandée systématiquement tous les deux ans chez toute femme ménopausée ou non, sous THM ou non. Un frottis cervico-utérin est réalisé tous les deux à trois ans.

Vie Quotidienne

Hygiène

Changements brusques de température, douches ou bains très chauds, sauna, ces situations à l’origine d’une vasodilatation favorisent la survenue de bouffées de chaleur. Garder près de soi de quoi se rafraîchir : éventail, vaporisateur d’eau thermale, lingettes…

Se vêtir

Préférer des vêtements en fibres naturelles. Les fibres synthétiques favorisent et emprisonnent la transpiration, ce qui empire les symptômes des bouffées de chaleur. Le coton, la laine et le lin permettent une meilleure ventilation du corps. Oublier les cols roulés, opter pour des vêtements qui s’enlèvent et se remettent facilement (gilets, écharpes ou foulards).

Alimentation

La prise de poids en période de périménopause est fréquente. En prévention (entre 45 et 55 ans), être attentif à son alimentation (limiter l’alcool, les graisses, les sucres rapides, éviter de grignoter entre les repas). Lorsqu’il est bien dosé en progestatif et en estrogène, le THM ne fait pas grossir et permet au contraire une meilleure répartition des graisses, en évitant leur accumulation au niveau abdominal.

Activité physique

Un exercice physique régulier (30 à 45 minutes de marche rapide par jour ou l’équivalent : ménage, jardinage…) contribue à limiter la prise de poids.

Sexualité

Il est important de prendre en charge la sécheresse vaginale, car la douleur au moment des rapports génère une crainte, qui est elle-même responsable d’un défaut de lubrification. Cependant, la lubrification vaginale n’est pas uniquement hormono-dépendante ; même sans estrogène, une lubrification persiste. Il faut peut-être un peu plus de temps pour être stimulée à la ménopause…

En l’absence de THM ou de traitements estrogéniques locaux, des lubrifiants intimes peuvent être proposés : ceux à longue durée d’action agissent sur vingt-quatre heures et jusqu’à trois jours pour certains, d’où un confort d’utilisation (Replens, Mucogyne, Premeno Duo…). Il n’y a pas de durée limite de traitement. Ils peuvent également être associés au THM.

Le diagnostic de ménopause

On considère qu’une femme est ménopausée après au moins douze mois d’arrêt des règles.

• Parfois une évidence. Le diagnostic est souvent évident : aménorrhée depuis plusieurs mois, associée à des bouffées de chaleur chez une femme de plus de 50 ans. Aucune exploration complémentaire n’est nécessaire.

• La possibilité d’un test. Toutefois pour s’assurer de l’arrêt des sécrétions estrogéniques sans attendre systématiquement un an d’aménorrhée, il est fréquent de proposer un traitement par progestatif 10 ou 12 jours par mois durant 3 mois consécutifs : l’absence d’hémorragie de privation à l’arrêt du progestatif confirme la survenue de la ménopause.

• Des dosages pour confirmation. Par ailleurs, dans certaines situations, il est nécessaire d’effectuer un dosage de FSH et d’estradiol pour s’assurer que la ménopause s’est bien instaurée. Par exemple, en cas d’hystérectomie, en cas de prise de la pilule (celle-ci provoque des règles artificielles et empêche souvent les bouffées de chaleur de se manifester), lorsque l’aménorrhée apparaît précocement (avant 45 ans). Un taux de FSH élevé (plus de 40 UI/l) et un taux d’estradiol inférieur à 20 pg/ml signent la ménopause.

Les alternatives aux hormones

Les phytoestrogènes sont des plantes ayant une activité de type estrogénique (fenouil, houblon, lin, kudzu, luzerne ou alfalfa). Les isoflavones de soja font partie des phytoestrogènes. Ces dérivés sont proposés pour soulager les troubles liés à la ménopause. Ils peuvent agir efficacement chez certaines femmes sur les bouffées de chaleur. Ils ne préviennent pas le risque d’ostéoporose et semblent peu efficaces sur la sécheresse vaginale. Les phytoestrogènes sont contre-indiqués en cas d’antécédents de cancer du sein ou de l’endomètre (comme le THM). L’Afssa recommande de ne pas dépasser la dose quotidienne de 1 mg/kg d’isoflavones ou autres phytoestrogènes en « équivalent aglycone ». En pratique, cela signifie qu’il faut éviter de cumuler plusieurs sources de phytoestrogènes (aliments dérivés du soja et compléments alimentaires). Dans sa brochure d’information à destination du grand public, l’Afssaps déconseille la prise de phytoestrogènes, car leur efficacité n’est pas démontrée et leur sécurité n’a pas été évaluée.

Site : Association française pour l’étude de la ménopause (AFEM).

www.menopauseafem.com

Livre : Ménopause, la vérité sur les hormones. « J’accuse », Dr Henri Rozenbaum, éditions J. Lyon, 2006.