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- Les génériques sont-ils bioéquivalents ?
NOS EXPERTS
Pr Georges Houin, directeur du laboratoire de pharmacocinétique et de toxicologie clinique de l’hôpital Purpan (Toulouse).
Dr Haleh Bagheri, praticien hospitalier, service de pharmacologie clinique, centre de pharmacovigilance de Midi-Pyrénées.
Qu’est-ce que la bioéquivalence ?
Deux spécialités sont dites bioéquivalentes si elles ont une biodisponibilité équivalente, c’est-à-dire si le principe actif arrive au site d’action à la même concentration et à la même vitesse. La bioéquivalence des génériques par rapport au princeps fait partie intégrante de leur définition dans le code de la santé publique. L’obtention de leur AMM impose que les études la démontrent.
Bioéquivalent signifie-t-il identique ?
Non. Le générique a la même composition qualitative et quantitative en principe actif (PA) et la même forme pharmaceutique que le princeps, mais il n’en est pas obligatoirement une copie conforme (sauf pour les auto-génériques, identiques au princeps et fabriqués par le même laboratoire).
Modes de production, excipients, enrobage, sel du PA… peuvent différer et modifier la biodisponibilité. Ces différences ne sont acceptées que si elles n’ont pas d’impact sur l’activité thérapeutique, d’où la nécessité de le prouver grâce aux études de bioéquivalence.
Deux produits bioéquivalents ont-ils la même activité thérapeutique ?
Cette notion, démontrée dans les années 1970, est aujourd’hui acceptée au niveau international. Ainsi, pour tous les médicaments ayant un effet général, la biodisponibilité du PA est mieux corrélée aux effets bénéfiques et indésirables du médicament que la dose administrée. L’Agence européenne du médicament considère dans ses recommandations que deux produits bioéquivalents sont « à un tel point similaires que leurs effets, tant du point de vue de leur efficacité que de leur sécurité, sont essentiellement les mêmes ».
Quels sont les paramètres qui évaluent la bioéquivalence ?
Évaluer la bioéquivalence de deux produits revient à comparer leur biodisponibilité. On mesure les concentrations de principe actif dans les liquides biologiques (sang, urine…) après administration chez des volontaires. Les mesures permettent de tracer une courbe d’action, d’où sont tirés trois indicateurs : la concentration plasmatique maximale atteinte (Cmax), le temps pour y parvenir (Tmax) et la fraction de la dose administrée qui atteint la circulation générale (aire sous la courbe des concentrations). Les courbes d’action du princeps et du générique doivent être comparables. On considère qu’il y a bioéquivalence si ces valeurs ne diffèrent pas de + ou – 20 %. Ce sont les écarts de tolérance.
À quoi correspondent ces écarts ?
Ces écarts acceptables ou « intervalle de confiance » sont ceux fixés au niveau international pour tous les médicaments. Ils correspondent à la variabilité de l’homme, qui n’est pas une machine ! Deux mêmes comprimés pris à des heures différentes, à jeun ou non, chez une même personne – et a fortiori chez deux personnes différentes – ne sont pas absorbés pareillement. Un consensus international admet qu’à l’intérieur de ces bornes d’acceptabilité, les effets thérapeutiques bénéfiques et indésirables ne sont pas cliniquement et significativement modifiés pour la grande majorité des médicaments.
« Pour la grande majorité »…, mais pour les autres ?
Les produits à faible marge thérapeutique, comme certains antiépileptiques, les hormones thyroïdiennes, etc., sont des exceptions à ce consensus. Pour eux, les écarts de biodisponibilité risquent d’avoir un impact sur les effets thérapeutiques, dans un sens comme dans l’autre. Les bornes d’acceptabilité ont donc été réduites au niveau international. Par exemple, la ciclosporine impose que l’écart soit réduit à 10 %.
Comment sont menées les études de bioéquivalence ?
Les études comparent deux produits après administration aléatoire d’une dose unique à des sujets sains, au nombre de douze à une centaine selon le produit. Les résultats sont ensuite évalués par les autorités de santé.
Sont-elles insuffisantes pour les génériques comme certains le dénoncent ?
Les normes de ces études sont définies par la « guideline » européenne et ne sont pas propres aux génériques. Les mêmes sont utilisées lors du développement d’un princeps, pour comparer par exemple la bioéquivalence des lots commerciaux aux lots cliniques.
Que dire aux patients qui s’inquiètent ?
Un médicament générique peut avoir statistiquement un effet moindre ou supérieur que le princeps, mais cette différence d’effet est calculée pour qu’elle n’ait pas d’impact sur l’efficacité globale du médicament. Le générique n’est pas toujours une copie conforme, mais c’est un médicament avec la même qualité pharmaceutique et sa performance a été étudiée avant commercialisation.
Repères
→ Février 2012 : le rapport de l’Académie de médecine – Place du générique dans la prescription – remet en cause, entre autres, l’équivalence thérapeutique des formes orales à libération immédiate.
→ Avril : le Gemme, association de laboratoires de médicaments génériques, répond à l’Académie de médecine sur www.medicamentsgeneriques.info
→ Juillet : généralisation du tiers payant contre génériques (TPCG).
→ Septembre : l’association de patients Renaloo obtient que le mycophénolate mofétil (Cellcept) soit exclu du TPCG.
Le Collectif interassociatif sur la santé (Ciss) remet en cause la bioéquivalence des génériques dans une lettre ouverte à la ministre de la Santé, Marisol Touraine.
→ 1er octobre : remise au gouvernement du rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur les génériques. À suivre…
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