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Un homme dont le glaucome s’aggrave
Monsieur Pierre X., 65 ans, diabétique et hypertendu bien contrôlé, est suivi depuis plusieurs années pour un glaucome.
La dernière visite de contrôle chez son ophtalmologiste a révélé une aggravation des lésions glaucomateuses. Le spécialiste choisit une bithérapie en remplaçant Xalatan par Duotrav. Il prescrit également un traitement contre la sécheresse oculaire.
Prescription
Dr O., ophtalmologiste
M. Pierre X., 65 ans, 77 kg, 1,80 m
Duotrav 1 flacon
1 goutte par jour dans les deux yeux pendant 1 mois.
Lacryvisc unidoses 2 boîtes
1 goutte jusqu’à quatre fois par jour dans les deux yeux si besoin pendant 1 mois.
CE QUE JE DOIS SAVOIR
Législation
L’ordonnance, conforme à la législation, ne pose pas de problèmes particuliers.
Contexte
C’est quoi ?
La prescription vise à prendre en charge un glaucome chronique à angle ouvert. Cette neuropathie optique évolue de façon chronique et progressive. Elle a pour origine une hypertonie oculaire et/ou une insuffisance circulatoire au niveau des capillaires sanguins irriguant le nerf optique. Ces deux phénomènes aboutissent à une destruction progressive des fibres optiques.
La maladie touche les deux yeux, mais de façon asymétrique, l’un plus précocement que l’autre. Elle reste longtemps asymptomatique, le diagnostic étant souvent posé lors d’une visite de routine chez l’ophtalmologiste. L’altération du champ visuel apparaît progressivement et tardivement, après déjà plusieurs années d’évolution. Sans traitement, les lésions s’aggravent, l’acuité visuelle centrale diminue. La maladie peut conduire à la cécité dans des stades très avancés.
Les facteurs de risque
L’élévation de la pression intra-oculaire (PIO) est le premier, même s’il existe des glaucomes chroniques à pression intra-oculaire normale.
Autres facteurs de risque : antécédents familiaux de glaucome, âge (> 40 ans), ethnie noire, myopie, facteurs qui diminuent la perfusion oculaire, tels que diabète, hyper- et hypotension artérielle, migraine, tabac…
Objectifs
Diminuer la pression intra-oculaire
Le glaucome ne se guérit pas et la fonction visuelle perdue ne pourra pas être récupérée. L’objectif est de stopper ou de freiner la destruction des fibres optiques afin de ralentir le retentissement sur le champ visuel.
La prise en charge est centrée sur l’abaissement de la PIO car c’est le seul facteur « local » sur lequel agir. Malgré une bonne observance, le collyre à base d’analogue de prostaglandines (Xalatan) n’a pas suffi. Plutôt que de changer de classe en donnant un bêta-bloquant, l’ophtalmologiste a décidé d’associer les deux dans une seule spécialité – ici, Duotrav –, afin de favoriser l’observance.
Pallier la sécheresse oculaire
Le suppléant lacrymal (Lacryvisc) est prescrit car M. X. s’est plaint d’une sensation de grains de sable dans les yeux et de larmoiement, témoins d’une sécheresse oculaire fréquente sous collyre au long cours. En cause, la toxicité des conservateurs, notamment le chlorure de benzalkonium.
Idéalement, les unidoses ou les flacons filtres permettant de s’affranchir des conservateurs (systèmes Abak et Comod) sont privilégiés, mais il n’existe pas de tels dispositifs en bithérapie. Duotrav, à base de Polyquad (ou polyquaternium) serait moins toxique.
Médicaments
Duotrav (travoprost, timolol)
Cette association d’un analogue des prostaglandines et d’un bêta-bloquant réduit la pression intra-oculaire chez les patients qui présentent une réponse insuffisante à l’une de ces molécules seule. Duotrav se conserve quatre semaines après son ouverture.
Lacryvisc (carbomère 974 P)
Ce substitut lacrymal est un gel fluide de polymère hydrophile de haut poids moléculaire. Sa viscosité supérieure à celle des larmes artificielles permet de diminuer la fréquence d’administration.
Repérer les difficultés
Bêta-bloquant par voie ophtalmique
La tolérance locale des analogues des prostaglandines est à surveiller mais les effets indésirables (voir plus loin) sont déjà connus puisque Monsieur X. était déjà sous latanoprost (Xalatan), un autre analogue des prostaglandines.
Un bêta-bloquant par voie opthalmique est susceptible d’induire des effets indésirables. Des conseils pour limiter le passage systémique du collyre sont à donner car les bêta-bloquants peuvent interférer avec ses autres traitements en favorisant une hypotension artérielle et en masquant les signes d’une hypoglycémie.
Administration de plusieurs collyres
Il est possible d’instiller Duotrav après Lacryvisc. Pour éviter toute interférence, attendre au moins quinze minutes.
CE QUE JE DIS AU PATIENT
J’ouvre le dialogue
« Je vois que votre médecin a renforcé votre traitement antiglaucomateux et qu’il vous a également prescrit un traitement contre la sécheresse oculaire » vérifie les informations données au patient sur l’évolution du glaucome et les effets indésirables éventuels. « L’avez-vous informé de votre traitement antihypertenseur et antidiabétique », les facteurs de risque et leur contrôle doivent être connus du spécialiste. « Depuis combien de temps êtes-vous suivi pour votre glaucome » permet au patient d’évoquer les contraintes du traitement et d’éventuels oublis occasionnels compromettant l’efficacité et « Avez-vous des difficultés pour instiller le collyre » ou « Sentez-vous bien la goutte tomber »
J’explique le traitement
Le mécanisme d’action
→ L’action synergique de l’analogue des prostaglandines et du bêta-bloquant enraye l’évolution du glaucome en abaissant la pression intra-oculaire. Il est important de prévenir de nouvelles lésions car, une fois constituées, celles-ci sont irréversibles.
→ Lacryvisc est un traitement de confort qui pallie l’insuffisance de larmes et va ainsi calmer l’inconfort lié à la sécheresse oculaire.
Les horaires d’administration
→ Duotrav : instiller le matin ou le soir, à peu près à la même heure chaque jour. M. X. a l’habitude d’instiller Xalacom le soir (meilleure efficacité des analogues des prostaglandines en monothérapie). Il peut garder ce même horaire. Contrairement à Xalatan, Duotrav ne se conserve pas dans le réfrigérateur.
→ Lacryvisc : à la demande, selon la gêne ressentie, jusqu’à quatre fois par jour et à distance de Duotrav – cinq minutes au moins – pour éviter une dilution et une perte de son efficacité. Il vaut mieux administrer Lacryvisc, plus visqueux et donc davantage rémanent à la surface de l’œil qu’un collyre classique, après Duotrav. Monsieur X. peut instiller Lacryvisc dans la journée.
Les effets indésirables
→ Duotrav. Travoprost : irritations oculaires, prurit, rougeur conjonctivale s’atténuant généralement après quelques jours ou semaines de traitement, assombrissement de l’iris et des paupières, allongement des cils parfois gênant chez les porteurs de lunettes. Ces changements peuvent être définitifs. Timolol : troubles cardiaques, bronchospasme, troubles du sommeil (cauchemar…), de l’érection… Chez M. X., il existe un risque de potentialisation de son traitement hypotenseur. Les bêta-bloquants peuvent aussi masquer certains signes de l’hypoglycémie, notamment chez les patients sous insuline ou insulinosécréteurs, ce qui n’est pas le cas de M. X. qui est sous metformine.
→ Lacryvisc : picotements et trouble passager de la vision après instillation.
Instiller le collyre
→ Se laver les mains. Déposer une goutte en regardant vers le haut et en tirant la paupière inférieure vers le bas, sans toucher l’œil ni la paupière avec le collyre. Fermer l’œil et comprimer la racine du nez quelques minutes pour limiter la diffusion systémique.
→ Jeter l’unidose de Lacryvisc après avoir traité les deux yeux.
→ Noter sur le flacon la date d’ouverture de Duotrav.
J’accompagne
Surveillance
→ Contacter le médecin en cas d’hypotension ou d’autres effets indésirables : bradycardie, troubles du sommeil… Toutefois, le risque d’effets indésirables systémiques est faible si le collyre est correctement instillé.
→ Pour éviter une coloration de la peau des paupières, essuyer l’excédent de collyre qui coule à côté de l’œil.
Aides à l’instillation
Interrogez Monsieur X. pour savoir s’il instille facilement le collyre ; si non, demandez-lui de vous montrer comment il fait. S’il ne « sent » pas la goutte, conseillez-lui de placer le collyre au réfrigérateur.
Il existe également des applicateurs de collyre (gamme Opticare…) qui facilitent le geste.
Prévention du glaucome
Sédentarité, tabac et consommation excessive d’alcool diminuent la perfusion vasculaire et favorisent donc la maladie. Le glaucome étant en partie héréditaire, Monsieur X. peut sensibiliser sa famille – quel que soit le niveau de parenté (frères, sœurs, enfants…) – au dépistage précoce du glaucome dès 40-50 ans.
Vente associée
→ Il peut être nécessaire de tester plusieurs substituts lacrymaux avant de trouver celui qui convient, en privilégiant toujours ceux « sans conservateurs ». Des alternatives pourront être essayées en accord avec le médecin : suppléants lacrymaux à base d’acide hyaluronique tels que Vismed, Hylo-Comod, ou ceux avec une macromolécule type Systane Ultra, ou encore sous forme de spray à pulvériser type Vyseo Tears Again.
→ Les oméga 3 pourraient avoir un intérêt dans la protection neuronale, donc dans les neuropathies, tel le glaucome. Ils sont présents dans des compléments alimentaires visant à lutter contre la sécheresse oculaire, associés à des oméga 6 et des antioxydants (sélénium, vitamine A, zinc<…) : Dioptec, Hydrofta, Naturophta sécheresse oculaire… À utiliser sur recommandation médicale en complément des substituts lacrymaux. Monsieur X. pourra en discuter avec son médecin lors de la prochaine visite.
Le patient me demande…
« Puis-je continuer à mettre des lentilles malgré le traitement ? »
Oui. Cependant, les conservateurs voire les autres composants des collyres sont susceptibles d’endommager les lentilles souples, plus fragiles que les rigides. Il faut donc les retirer avant d’instiller un collyre et attendre quinze minutes avant de les remettre. Le port des lentilles rigides ne pose pas de problème.
« J’ai lu qu’il était préférable de mettre ce collyre le soir mais puis-je l’instiller le matin ? »
Comme vous le savez, le traitement doit être le plus souvent suivi à vie. Le principal est de le mettre régulièrement dans les yeux. Pour ne pas oublier, vous pourriez le mettre avant ou après le brossage des dents ou après le journal télévisé. Sinon, mettez-le matin si vous préférez, l’essentiel est de ne pas l’oublier.
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