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Les assureurs font de la prévention
La prévention santé s’invite de plus en plus dans notre vie… et dans les prestations des complémentaires santé ! Plus que jamais, les pharmacies ont intérêt de réagir et de se forger une réelle place sur ce créneau.
On la connaît avant tout sous la forme de campagnes d’affichages à grande échelle contre le cancer, le tabac ou le VIH : la prévention santé fait partie de notre paysage. Elle se définit comme l’ensemble des moyens médicaux et médicosociaux mis en œuvre pour empêcher l’apparition ou l’aggravation ou l’extension des maladies et leurs conséquences à long terme. A la suite des pouvoirs publics, mutuelles et assureurs investissent eux aussi ce champ d’action. Ils cherchent à changer leur image de financiers aux yeux du public en adoptant une posture d’accompagnement sur toute la durée de la vie, du bien-être aux risques. Dans l’Hexagone, Swiss Life s’est lancé dans l’ouverture d’un réseau de boutiques regroupées sous le nom d’enseigne Ma Santé facile (voir Pharmacien Manager n° 121). L’assureur offre tests et conseils de santé et valorise l’information sur la prévention. D’autres, comme Mondial Assistance, ont mis en place pour leurs assurés depuis septembre 2012 une plate-forme de téléconseil santé destinée à orienter les patients dans leur parcours de santé : lorsqu’un usager appelle, un médecin détermine grâce à un questionnaire rigoureux s’il a besoin d’une consultation médicale et sil possède chez lui l’automédication qui lui permettra de se soigner. En Suisse, ce service a montré qu’une fois sur deux les patients avaient ainsi évité de se rendre chez un médecin.
Maîtrise des coûts pour les complémentaires
Le Baromètre Axa paru en novembre 2012 est formel : pour trois Français sur quatre, la santé est une préoccupation majeure. Ils attendent aujourd’hui que les soins, mais aussi l’individu dans son ensemble, son capital santé, soit préservés et pris en charge.
Cette préoccupation nouvelle vient légitimer les actions que les complémentaires mènent en matière de prévention, si l’on en croit Laurent Goldstein, médecin et président de Mondial Assistance, « à l’heure où les Français se posent la question de l’intérêt de leur complémentaire santé étant donné l’importance du reste à charge qu’ils supportent, les compagnies d’assurances ne pourront à l’avenir justifier leurs tarifs qu’en valorisant et enrichissant leurs services ». La demande de prévention des Français passe également par l’entreprise : les salariés considèrent en effet à 89 % qu’elle est désormais un lieu légitime pour s’occuper de leur santé et de la prévention. Une aubaine pour les assurances ! Jacques Fiorentino, directeur santé d’Itelis, société de services qui travaille avec les assureurs, explique : « Lorsque les contrats collectifs s’inscrivent dans la durée, la prévention devient un moyen pour les complémentaires santé de maîtriser leurs coûts, de contenir la hausse des cotisations. En jouant le rôle de tiers de confiance et de conseil, elles fidélisent leurs clients. » Ainsi, les complémentaires santé trouvent leur compte dans la prévention. Chez Mondial Assistance, agir préventivement représente un intérêt à la fois financier et qualitatif. Laurent Goldstein précise : « Lorsque l’assuré passe par notre plate-forme, nous n’avons pas à rembourser de consultation ni de médicament de prescription, et nous donnons au patient, épaulé par le pharmacien, une conduite à tenir par rapport à un symptôme. » Car dans un cas sur quatre, lorsque le patient n’a pas les médicaments qu’il faut chez lui, il est orienté chez son pharmacien qui lui proposera une automédication. Et il pourra se faire rembourser par Mondial Assistance même s’il se procure des produits OTC stricts, simplement parce qu’il est passé par la plate-forme téléphonique. « En tant qu’assureur, je préfère rembourser une automédication fléchée qu’une prescription associée à des visites médicales non coordonnées. Il s’agit ainsi de mieux débusquer les risques auxquels les assurés sont exposés, de donner le traitement au bon moment pour réduire les coûts », complète Laurent Goldstein.
Enjeu de fidélisation pour l’officine
Toutefois, exception faite des contrats collectifs négociés par les grosses entreprises, la prévention pratiquée par les assurances complémentaires santé en direction des particuliers reste timide. Il y a deux ans, Lucien Bennatan, président du groupe PHR, a souhaité mettre en place dans les officines un service de prévention lié aux réseaux de diététiciens et d’infirmières. Et a contacté des assureurs pour une prise en charge de la prestation. Ils n’ont jamais donné suite. « Ils n’ont pas vu le bénéfice immédiat qu’ils pouvaient en tirer, explique Lucien Bennatan. De plus, la notion de qualité et d’efficacité du service n’était pas leur priorité. Les mutuelles ont choisi d’organiser des programmes de prévention, mais en appuyant sur la médecine du travail et les services des grandes entreprises. Malakoff Médéric fait de la prévention cardiovasculaire pour Peugeot, April et Swisslife ont ouverts des points de rencontre avec des diététiciennes. Cependant, le peu de fréquentation de ces points de vente montre que les complémentaires ne peuvent remplacer les professionnels de santé. »
Les officinaux ont donc un rôle à jouer dans la prévention de proximité, rôle qui devrait être renforcé par la désertification médicale. Jacques Fiorentino objecte cependant que « les pharmaciens devront pour ce faire accepter de rendre un service sur lequel le retour financier ne sera pas immédiat ». Et Lucien Bennatan de conclure : « Tôt ou tard les assureurs viendront nous proposer non pas de nous apporter des clients, mais d’acheter la qualité des services fournis par l’officine. Soyons force de proposition dès maintenant pour structurer un réseau de prévention. Ne nous limitons pas à une offre produit mais proposons une offre globale qui inclue produit, service, qualité. Derrière cette dynamique de prévention, qui est un investissement à long terme, tout comme derrière les missions facultatives de la loi Hôpital, patients, santé et territoires, l’enjeu demeure bien la fidélisation du client. »
ContratsLes Français mal informés
Bien qu’elle détienne l’une des meilleures espérances de vie d’Europe, la population française est marquée par une entrée en invalidité/incapacité plus prématurée qu’ailleurs : ainsi les Suédois, qui misent sur la prévention depuis plusieurs années, passent 90 % de leur vie sans incapacité, contre 79 % pour les Français. La prévention santé préoccupe les Français, selon le Baromètre Axa, mais si 90 % d’entre eux sont conscients que dans notre pays on consomme trop de médicaments, paradoxalement, seuls 16 % estiment qu’ils sont concernés. 9 % de nos compatriotes déclarent avoir participé à un programme de prévention dans les 12 derniers mois et 55 % ne savent pas si leur contrat d’assurance santé comporte des services de prévention. Au moment de l’achat d’une complémentaire, les consommateurs se focalisent de façon parcellaire sur des éléments comme l’optique, le dentaire, le coût de la cotisation, et font un choix poussé par les promotions et les effets marketing, qu’ils oublient le lendemain. Pourtant la grande majorité des contrats de complémentaire santé proposent des prestations de prévention.
C.F.
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