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Le boom des crèmes cicatrisantes

Publié le 7 mai 2013
Par Peggy Cardin-Changizi
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Dans un contexte de crise, peu de segments dermo-cosmétiques peuvent se vanter de croissance à deux chiffres. C’est chose faite pour les crèmes cicatrisantes qui connaissent une vraie renaissance, insufflée par Cicalfate. Profitez-en !

Ne passez pas à côté du formidable succès des crèmes cicatrisantes dermo-cosmétiques (sans AMM). Elles se payent actuellement le luxe d’afficher une croissance de + 12,9 % en volume (4,8 millions d’unités vendues) et + 14,6 % en valeur (environ 45 millions d’euros), selon IMS, en cumul annuel mobile à janvier 2013. Une aubaine pour les pharmaciens. « Ce marché dispose d’un véritable monopole officinal. Ce qui est logique, dans la mesure où les consommateurs viennent exposer leurs motifs d’achat (Ndrl irritations cutanées) en priorité en pharmacie », explique Yann Kerhervé, directeur marketing de La Roche-Posay.

Initié historiquement par les crèmes Dalibour à base de cuivre et de zinc, le secteur de la cicatrisation s’est d’abord construit autour de produits « médicaux » avec AMM ou ayant le statut de dispositif ­médical comme Bepenthen pommade, Biafine, Cicatryl, Ialuset, Mitosyl (voir encadré ci-contre)… Puis A-Derma a investi le segment avec Dermalibour et Epitheliale. Mais c’est la commercialisation de Cicalfate (Avène) en 2001 qui a réellement lancé le marché cosmétique des cicatrisants. Toujours leader du segment aujourd’hui avec 45 % de parts de marché en volume, la première référence du laboratoire Avène en France progresse encore d’environ 9 % en volume et en valeur (source IMS, CAM à janvier 2013). Depuis, les principaux concurrents dermo-cosmétiques (La Roche-Posay, Bioderma, Uriage, A-Derma, Eucerin…) se sont également positionnés sur le rayon « avec des solutions globales qui jouent à la fois sur la cicatrisation et la prévention des infections », précise Anne Gecs, chef de produit Uriage.

Aujourd’hui, les quatre leaders du segment — Avène, La Roche-Posay, Bioderma, A-Derma — occupent 87 % du marché en valeur, et 88 % en volume. Ces deux dernières années le marché de la cicatrisation a littéralement explosé, et les lancements se sont succédé : Cicalfate post-acte (Avène), Ialugen cica (Genévrier), Urgo Cicatrices Crème (Urgo), Porphyral HSP Derm (Pileje), Aquaphor (Eucerin), Cicactive P.I (Uriage) ou Cicaplast baume B5 (La Roche Posay). « Ces nouvelles références ont généré certes de nouvelles ventes mais elles ont aussi boosté l’ensemble du marché. Du coup, les marques leaders en ont aussi profité », observe David Durand, directeur marketing Bioderma. Côté composition, l’acide hyaluronique a été choisi comme ingrédient star dans Epitheliale AH, Ialugen cica et Urgo Cicatrices. Alors que Cicaplast B5 et Aquaphor misent sur le panthénol. Pileje a quant à lui élu une algue, porphyra umbilicalis, récoltée sur le littoral breton, pour ses capacités de défense spécifiques.

Comment les crèmes cicatrisantes sont-elles devenues des incontournables de l’armoire à pharmacie ? Grâce à l’évolution des modes de vie, de leur utilisation ou de leur cible ? Ou serait-ce grâce au soutien de la visite médicale ?

En fait, la réponse tient dans tous ces éléments. « L’emploi des crèmes cicatrisantes s’est développé en même temps que les pratiques dermo-esthétiques, constate David Durand (Bioderma). Après un laser, un peeling, une micro-dermabrasion ou un acte de chirurgie esthétique, les femmes utilisent ces produits pour cicatriser plus vite. Même s’ils ne remplaceront jamais un produit médicamenteux, ils améliorent la zone lésée de la patiente, soucieuse de son apparence. » Le prix des cicatrisants proposés par les marques dermocosmétiques n’est pas étranger à l’essor des ventes. Il faut compter 10 euros en moyenne. Au-delà de l’utilisation spécifique en post-acte chirurgical, les crèmes cicatrisantes sont devenues des produits multifonctions et multi-usages, que le pharmacien peut facilement proposer au comptoir. « La peau est le premier organe touché par les variations saisonnières, constate Yann Kerhervé. En hiver, on a des dartres, des gerçures, le nez rouge… Et en été, des coups de soleil, des piqûres d’insecte, des égratignures… Sans oublier l’érythème fessier, soutenu par le boom des naissances, toute l’année ! Autant d’occasions pour le pharmacien de conseiller un cicatrisant. De même lorsqu’il délivre des médicaments pour une infection nasale, ou qu’il voit une maman avec un nourrisson ou de jeunes enfants. »

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Vive la prescription

Les crèmes cicatrisantes s’adressent désormais à toute la famille. Du coup, les formats grandissent et passent pour certains à 100 ml (Cicalfate notamment). Cet élargissement de la cible a poussé les laboratoires concernés à soutenir ces produits auprès du corps médical. « C’est parce que la prescription est importante que le marché est aussi concentré. Les quatre premiers acteurs du marché sont ceux qui investissent le plus en visite médicale et en soutien aux dermatologues », note Yann Kerhervé. « 50 % du marché serait dû à la prescription, ajoute Morgan Guéritault, chef de produit Avène France. La caution d’un médecin (généraliste, dermatologue, gynécologue, pédiatre ou chirurgien esthétique) médicalise le produit, cautionne son efficacité et rassure si besoin la patiente qui va l’acheter, surtout si elle vient pour ses enfants. » On l’aura compris, les crèmes cicatrisantes sont tendance. Mais pour combien de temps ? Les laboratoires sont, bien sûr, optimistes et s’accordent à dire que le potentiel reste important, compte tenu de la multiplication des utilisations concernant les produits. « Pour ne pas que le marché s’essouffle, il faudra apporter encore plus de valeur ajoutée en termes d’actifs et d’efficacité », confie Marine Sire, chef de produit Dermalibour (A-Derma). En attendant, pensez à créer un rayon « cicatrisation » au sein de votre linéaire dermo­cosmétique, avec un rappel derrière le comptoir. Car le segment ne demande qu’à être peaufiné en termes de merchandising à l’officine.

OTC

Cicatryl superstar

Du coté des cicatrisants médicaux (statuts AMM ou dispositif médical), on ne retrouve pas les mêmes performances qu’en dermo-cosmétique. Plus ancien, le marché est néanmoins encore en progression : + 3 % en volume (13,2 millions d’unités vendues) et + 5,5 % en valeur (89,2 millions d’euros) selon IMS, en cumul annuel mobile à janvier 2013. Parmi les références concernées, citons Bepenthen pommade, Biafine, Ialuset, Mitosyl… Reste que Cicatryl (Pierre Fabre Santé) est leader de ce segment avec plus de 80 % de parts de marché. « C’est un produit qui plaît par son conditionnement nomade (sachet unidose) et sa formule complète (chlorocrésol, vitamine E + allantoïne et guaiazulène) », explique le laboratoire. Avec en prime des indications qui vont des petites plaies aux brûlures de toute la famille, Cicatryl est devenu un incontournable de la trousse à pharmacie. Le soutien en communication (campagne TV sur trois mois, campagne de vitrines, campagne Internet…) entretient les ventes.