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Faites respecter les règles

Publié le 1 mars 2009
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Un ordinateur resté allumé, une commande oubliée, un accueil aux abonnés absents… Cette fois, la coupe est pleine. Il faut remettre les pendules à l’heure. Toute la difficulté est de faire preuve d’autorité sans tomber dans l’autoritarisme. Petite leçon de recadrage.

Ni trop, ni trop peu. S’il est inutile d’aboyer sans cesse, pas question non plus de mettre de l’eau dans son vin en permanence, histoire d’éviter le conflit. « L’autorité, ça se conquiert et se construit dans la durée », explique Daniel Feisthammel, dirigeant de AxCiome C. Des règles claires et un comportement cohérent évitent d’aboutir à des situations extrêmes.

1. Fixez les règles du jeu

« Après mûre réflexion, explique Muriel Jouas (2), consultante en communication sensible et gestion de crise au cabinet Com2crise, le manager doit fixer ses principes, y croire et les porter. Ces valeurs constituent les bases de la culture de l’entreprise. » Une fois ce travail préliminaire accompli, ces règles de fonctionnement (aussi bien pratiques qu’éthiques), définies une fois pour toutes, doivent être exposées lors de l’embauche, mais aussi régulièrement lors de réunions ou d’entretiens. Bref, vous devez jouer la carte de la transparence pour garantir à tous le même niveau d’information. Pour mettre le maximum de chances de réussite de votre côté, vous devrez également jouer la carte de l’équité. Tout le monde est soumis au même régime, même vous ! L’exemplarité est un levier essentiel dans le respect des règles.

2. Gagnez en autorité

Une fois le cadre fixé, encore faut-il le faire vivre en visant le stade ultime de l’autorité, le leadership, ce moment où, comme le qualifie Daniel Feisthammel, « il n’est plus besoin de demander pour obtenir ». Pour cela, répondez à la question : « A quoi mon collaborateur est-il sensible ? » En effet, constate Daniel Feisthammel, « les ressorts de l’autorité sont d’autant plus faciles à observer qu’on se met du côté de celui qui l’accorde ». On obéit en effet plus facilement :

.à quelqu’un qui demande de faire quelque chose de réalisable, qui fixe un objectif atteignable,

.à quelqu’un qui valorise comportements et actions,

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.à quelqu’un de fiable, qui tient ses engagements,

.à quelqu’un de respectueux.

Sur la longue route qui vous sépare du leadership, vous aurez sans doute à gérer quelques dérapages. Avant de sortir l’artillerie lourde pour rectifier le tir, à vous d’évaluer l’ampleur du problème.

3. Identifiez le dérapage

Erreur, négligence, faute ou sabotage ? A chaque situation sa solution.

< Erreur Tout le monde peut se tromper. Si vous relevez un manquement à la règle, et surtout si c’est la première fois, prenez le temps d’échanger avec votre collaborateur. « Il n’a pas forcément conscience de ce qui se passe, souligne Muriel Jouas. Attirez son attention sur son attitude et rappelez-lui la règle en lui expliquant combien il est important pour vous et pour l’équipe que tout le monde aille dans la même direction. »

< Négligence Il s’agit là de la répétition d’une erreur connue, qui à terme peur poser un problème insoluble. La sanction doit être rapide, explique Daniel Feisthammel, et, au minimum, verbale. Vous devez mettre votre collaborateur en cause («Ta justification n’est pas valable, tu aurais pu faire autrement»…). Les gens négligents surfent sur le fait que «ça va se tasser» et en prennent vite à leur aise avec le règlement. »

< Faute Dans la faute, celui qui la commet sait pertinemment que son attitude n’est pas adaptée. « Il n’agit pas pour nuire, prévient Daniel Feisthammel, mais par flemme. La sanction doit être à la mesure de l’inconvénient causé et de l’intention. » Une simple intervention verbale est insuffisante. Laissez des traces écrites en utilisant le registre autorisé par le droit du travail.

< Sabotage Dans ce cas, il y a intention de nuire et il n’existe pas d’autre solution que l’exclusion.

4. Faites une critique FISSA !

« Lorsque la règle n’est pas respectée, explique Muriel Jouas, il est important de ne pas attendre pour le dire. » Plusieurs méthodes sont envisageables, dont la critique FISSA : F comme Faits, I comme Incidence, S comme Solutions et Soutien et A comme Action. Lors d’un entretien, faites une critique limitée. Evitez les généralisations et restez-en aux faits sans interprétation. Exprimez à votre collaborateur les conséquences de sa conduite (désorganisation, risque pour le patient…). Vérifiez que le message que vous souhaitez faire passer est bien compris. Montrez que vous voulez un changement d’attitude, sans remise en cause personnelle, de la relation que vous avez avec lui. Vous proposez des solutions pour remédier au problème en l’assurant de votre soutien. Enfin, incitez au passage à l’action. Rappelez rapidement les engagements pris et fixez un rendez-vous pour faire le point. « Une critique est utile si elle est suivie de ce qu’on peut appeler un «plan de progrès» », rappelle Muriel Jouas.

5. Recadrez façon DESC

Face à la répétition des faits, la critique orale laisse la place à un recadrage plus formel (traces écrites). La méthode DESC peut vous guider utilement. Tout comme pour la critique FISSA, vous commencerez par décrire les faits (le D de DESC). Ici aussi, restez factuel. Ayez recours à des notes prises lorsque vous avez constaté les différents manquements. La deuxième étape consiste à exprimer son ressenti (E). Attention, cela ne signifie pas que vous faites place aux sentiments. Il s’agit là d’expliquer en quoi l’attitude est gênante (« Ça nous a causé un vrai problème »…). Vous proposez alors une tactique pour mettre fin à cette accumulation, vous suscitez une solution (S). Enfin, concluez (C) rapidement sur une note la plus positive possible (« Maintenant, nous allons repartir sur de bonnes bases »…).

Frédéric Rey-Millet, président de Ethikonsulting, insiste sur le fait que cette méthode doit être incisive, objective et utilisée en dernier recours. « L’entretien ne doit pas dépasser une dizaine de minutes. Ne perdez pas de temps en introduction polie, allez aux faits. Ne laissez surtout pas votre collaborateur argumenter et se justifier. Proposez-lui de reparler de l’entretien le lendemain ou un autre jour de façon à ce qu’il ait le temps de réfléchir et d’analyser la situation. Une réaction à chaud, trop émotionnelle, est souvent stérile. »

Erreurs à éviter pour préserver son autorité*

. Réagir sans avoir pris de l’information.

. Intervenir à tout bout de champ.

. Considérer qu’on apporte une valeur ajoutée sur tout.

. Se jeter au fur et à mesure dans la réponse immédiate aux événements.

. Ne pas s’arrêter régulièrement pour faire le point.

. Ne pas noter, faire confiance à sa mémoire.

. Vouloir convaincre à toute force et discutailler.

. Faire preuve d’autorité quand on n’obtient pas ce que l’on veut tout de suite.

. Faire copain-copain avec les uns plutôt qu’avec les autres.

. ndividualiser les relations.

. Evacuer, éviter ou repousser les sujets désagréables.

* Extrait de « Développer son autorité », Daniel Feisthammel, Edition Eyrolles.

Lectures utiles : « Développer son autorité », collection « Autorité mode d’emploi », Editions d’Organisation ; « S’affirmer », de Muriel Jouas, collection « Tout le savoir-faire des bosseuses », Edition Eyrolles.