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À chacun d’être responsable
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Le risque zéro n’existe pas, y compris en pharmacie, où la moindre erreur peut être fatale. Face à cette éventualité, le préparateur doit assumer ses responsabilités. Être conscient, savoir dire « non » et passer la main pour respecter les limites de sa compétence en sont les clés.
Chargée de préparer des gélules, Marie (1) confond sulfate de manganèse et sulfate de magnésium. Une erreur qui sera fatale. La patiente ingère les gélules et décède. Marie écopera de dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis, tout comme l’adjoint « donneur d’ordre ». Une peine de douze mois d’emprisonnement avec sursis sera prononcée à l’encontre du titulaire de la pharmacie sous-traitante. Tous trois seront également condamnés à verser 68 000 € de dommages et intérêts à l’époux et aux filles de la patiente décédée…(2) Si l’erreur est humaine, elle peut coûter très cher. Surtout pour un professionnel qui détient la santé, voire la vie des patients entre ses mains, le temps d’un acte de délivrance. Les préparateurs sont conscients de cette responsabilité intrinsèque au métier, mais ils ignorent parfois comment l’assumer.
Respecter son champ de compétences, savoir passer la main et être bien formé sont les qualités d’un préparateur responsable.
Les conséquences de l’erreur
« La moindre erreur, je la prends vraiment pour moi. Et si le patient est sorti quand je m’en aperçois, je lui cours après, lance Calogéro, préparateur à Rive-de-Gier (Loire). Défaire le préparateur de cette responsabilité au moment de la délivrance viderait le métier de sa substance et ferait de nous de simples vendeurs ». Les préparateurs partagent souvent cet avis, mais ils ne sont pourtant pas toujours conscients des risques encourus en cas d’erreur. Près de trois quarts des préparateurs sondés par Porphyre (voir encadré ci-dessous) craignent un licenciement, mais « l’erreur doit être vraiment grave pour en arriver là », tempère Maître Matthieu Blaesi, avocat au barreau de Paris. L’erreur vaudra plutôt un avertissement, et affectera parfois la confiance du patron. « Après une erreur de délivrance, mon titulaire me surveillait dès que je sortais une boîte de Doliprane », ironise Nicole Cardinale, préparatrice saisonnière en Rhône-Alpes. L’erreur peut aussi se traduire au pénal. Le code de la santé publique est formel, les préparateurs « assument leurs tâches sous la responsabilité et le contrôle effectif d’un pharmacien », mais « leur responsabilité pénale demeure engagée ». En cas d’imprudence ou de négligence entraînant la mort d’un patient, ils s’exposent par exemple à trois ans d’emprisonnement, et à une amende de 45 000 € (voir encadré p. 24). La plupart du temps, le versement de dommages et intérêts à la victime ou à ses ayants droit est en revanche assuré par l’employeur, via son assurance en responsabilité civile professionnelle…
(1)Les prénoms ont été changés.
(2)Tribunal de grande instance de Bobigny, 15e chambre correctionnelle, 29 novembre 2007.
Les préparateurs et leur responsabilité sondés par Porphyre
Sondage Porphyre sur la responsabilité des préparateurs, effectué en ligne en avril 2014 auprès de 318 préparateurs.
94 % des préparateurs ont conscience d’engager leur responsabilité en cas d’erreur.
La majorité pense que le licenciement est le risque encouru en cas d’erreur
Les préparateurs qui se sont trompés craignent :
– un licenciement pour faute (77 %) ;
– une amende ou une peine d’emprisonnement (10 %) ;
– le versement de dommages et intérêts à la victime (3 %).
3 préparateurs sur 4 ont déjà commis une erreur de délivrance
Après cette erreur, ils ont eu peur :
– d’aller devant les tribunaux (82,8 %) ;
– que la notoriété de l’officine soit écornée (37,7 %) ;
– d’avoir échoué dans leur devoir d’être des bons professionnels (32,8 %).
Le contrôle effectif systématique est rare
– 1 préparateur sur 2 n’est pas soumis au contrôle effectif d’un pharmacien dans son officine.
– 1 sur 4 l’est de façon « exceptionnelle ».
– 1 sur 10 (12 %) l’est systématiquement.
Le poids de la responsabilité est plus important en l’absence de contrôle effectif
– 3 préparateurs sur 4 ont le sentiment de devoir assumer une responsabilité plus importante.
– 1 sur 4 se sent mal à l’aise.
Ils outrepassent leurs responsabilités à l’officine…
– 85,5 % n’appellent pas systématiquement le médecin
pour avancer un produit.
– 64,5 % ne demandent pas automatiquement l’avis
du pharmacien.
– 34,5 % ouvrent parfois l’officine en l’absence d’un pharmacien.
– 16 % gèrent parfois des cas « complexes » sans appeler
le pharmacien au préalable.
… mais, en cas de doute sur le conseil à dispenser, 9 sur 10 questionnent le pharmacien
– 82 % ont le sentiment d’endosser la même responsabilité que l’adjoint au comptoir.
Rigueur et vigilance sont la base de la responsabilité
–75 % estiment qu’être rigoureux et vigilant sont les qualités premières d’un préparateur qui assume ses responsabilités.
Le point sur la responsabilité civile, pénale, disciplinaire
La responsabilité civile est engagée en présence d’une faute, d’un dommage, et d’un lien de cause à effet entre la faute et le dommage. En d’autres termes, le dommage subi par un patient doit être la conséquence d’une faute commise par le préparateur : erreur de délivrance ayant entraîné la mort, etc. L’engagement de la responsabilité civile vise alors à dédommager la victime ou ses ayants droit (époux, enfants, etc.) en leur versant une somme au titre des dommages et intérêts. Cette responsabilité est généralement couverte par l’employeur, qui doit souscrire une assurance à cet effet. Le préparateur ne doit l’assumer que dans de rares cas : lorsque la faute commise était intentionnelle, lorsqu’il a agi hors du cadre des missions qui lui étaient imparties, lorsque la faute est jugée particulièrement grave, etc.
La responsabilité pénale est engagée lorsqu’une personne commet une infraction. Une infraction est un comportement prohibé par la loi, sanctionné par une peine : principalement l’amende, la peine d’emprisonnement (en cas de délit) ou réclusion criminelle (en cas de crime). Le droit pénal punit un comportement car il est jugé très grave, même s’il ne fait aucune victime (ex. : infractions à la sécurité routière, tentative d’homicide, mise en danger délibérée d’autrui, etc.). Les sanctions sont prévues par le code pénal ou toute autre disposition pénale (ex. : dispositions pénales du code de la santé publique). On distingue trois types d’infractions selon leur gravité : les contraventions, les délits et les crimes. La responsabilité pénale est personnelle. Elle vise à punir l’individu fautif et n’est donc ni assurable, ni couverte par l’employeur.
La responsabilité disciplinaire vise à punir un manquement à la déontologie professionnelle. À l’officine, elle ne concerne que les pharmaciens, soumis au code de déontologie. Saisi d’une plainte, c’est l’ordre des pharmaciens qui statue en chambre disciplinaire sur le cas litigieux (ex. : erreur d’un préparateur ayant entraîné la mort d’un patient), et décide ou non de sanctionner le pharmacien (ex. : contrôle effectif défaillant). Selon la gravité de la faute, les sanctions peuvent aller de l’avertissement à l’interdiction définitive d’exercer (radiation de l’Ordre).
NB : le fait que le préparateur ne soit pas soumis au code de déontologie n’empêche pas la sanction prononcée par l’employeur en cas de faute (avertissement, licenciement, etc.).
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À lire dans Porphyre n°503 de Juin 2014
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